Assaut de Saint-Denis: blessé pendant l'assaut, un habitant de l'immeuble a frôlé l'expulsion

Blessé par la police, Ahmed a reçu un avis d'expulsion sur son lit d'hôpital. - Dominique Faget - AFP
Ahmed, 63 ans, est Egyptien. Jusqu'au 18 novembre, il habitait à Saint-Denis, dans un immeuble de la rue Corbillon. Ce jour-là, plusieurs terroristes se cachent dans l'appartement situé au-dessus du sien. A 4h30 du matin, il est réveillé par une explosion.
"Je frappais sur les murs pour qu'on vienne me chercher"
Interrogé par Le Parisien, Ahmed raconte la peur qui l'a saisi au petit matin, lorsque l'assaut de la police contre l'immeuble a commencé.
"Il y a eu une explosion. Ma porte s'est ouverte. J'ai cru que l'immeuble était en train de s'écrouler! Des policiers avec des lampes torches m'ont dit de rentrer dans mon logement. Ils voulaient savoir si les appartements du palier communiquaient. Moi, je me suis tout de suite dit: Je vais mourir..."
La suite est un déluge de feu. Dans l'immeuble d'en face, des tireurs criblent de balles l'appartement des terroristes mais pas seulement. Ahmed raconte ainsi que des dizaines de balles ont traversé ses fenêtres, touchant au passage son lavabo, sa télévision, son réfrigérateur.
"Je frappais sur les murs pour qu'on vienne me chercher", se rappelle l'homme que les policiers finissent par lui demander d'aller à la fenêtre en levant les bras.
"J'ai à peine eu le temps de bouger que j'ai ressenti une vive douleur dans le bras gauche. Ensuite, j'ai vu du sang autour de moi. J'ai compris que j'avais été touché par la police", se rappelle Ahmed.
Un avis d'expulsion à l'hôpital
Transporté à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, Ahmed est placé en garde à vue quelques heures plus tard. La police veut s'assurer qu'il n'a pas de lien avec les terroristes qui habitaient l'étage du dessus. Des terroristes qu'Ahmed a bien vu la veille de l'assaut. Ils ont frappé à sa porte dans la soirée.
"Ils parlaient en français. Ils s'étaient trompés de porte. Quand j'ai ouvert, ils se sont précipités dans un autre appartement. J'ai eu l'impression qu'ils ne voulaient pas montrer leur visage. Ils portaient des chapeaux, des manteaux et ils avaient les mains dans les poches".
Une fois son témoignage noté, Ahmed ne sera plus inquiété par la police. Mais ses ennuis ne s'arrêtent pas là. Sur son lit d'hôpital, Ahmed, qui est sans-papiers, reçoit un avis d'expulsion du territoire. Une décision que son avocat, Karim Morand-Lahouazi, dénonce.
"Y avait-il urgence à lui notifier de quitter le territoire sans qu'il ait pu faire valoir ses droits en tant que victime?" se demande l'avocat. Devant l'émoi suscité par une telle décision, la préfecture des Hauts-de-Seine a finalement décider d'annuler en urgence l'obligation pour Ahmed de quitter la France. Il y vit depuis neuf ans et attend désormais de savoir où il va pouvoir habiter.