Avec 3 à 4°C au-dessus des normales de saison, la Méditerranée est en surchauffe
Le mercure grimpe dans les airs, mais aussi dans les mers et les océans. Des températures situées de 3 à 4°C au-dessus des normales de saison ont été relevées dans la mer Méditerranée en ces premiers jours d'été par le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (ECMWF). Loin d'être anodin, le phénomène s'inscrit dans une tendance de fond de réchauffement climatique qui bouscule l'écosystème marin.
+0,4 °C tous les dix ans
La chaleur a pris ses quartiers dans l'Hexagone. Depuis le mois de mai, les instituts de météorologie relèvent des températures situées bien au-dessus des normales de saison. En conséquence, la température de l'eau s'avère déjà élevée en cette fin juin. D'autant que le mistral et la tramontagne ont soufflé de façon moins importante, alors qu'ils ont tendance à refroidire le littoral méditerranéen.
L'eau de la Méditerranée gagne 0,4°C tous les dix ans. Le chiffre peut paraître faible, mais cette augmentation est en réalité gigantesque et induit de nombreuses conséquences.
"Le réchauffement régulier de l'eau, mais aussi des vagues de chaleur peuvent entraîner une augmentation de la température des masses d'eau et qui atteignent l'écosystème sous-marin", met en garde sur BFMTV Frédéric Bachet, chargé de mission pour le parc marin de la Côte bleue à Carry-le-Rouet, dans les Bouches-du-Rhône.
Bouleversement pour algues, coraux et poissons
Parmi les êtres vivants touchés, les algues marines, tels que les herbiers de posidonie ou le coralligène. Mais aussi les coraux, dont la mise en danger s'avère particulièrement inquiétante. En effet, ces animaux aquatiques sont essentiels à la biodiversité marine.
"Ce sont des puits de carbone, c'est-à-dire qu'ils ont la capacité à absorber le gaz carbonique de l'air et à le stocker. Ils permettent ainsi de lutter contre le réchauffement", explique le scientifique.
En raison de l'augmentation des températures marines, la Méditerranée est par ailleurs confrontée à une prolifération d'algues nocives pour l'être humain. Frédéric Bachet évoque en particulier l'Ostreopsis ovata, algue qui peut créer des "déséquilibres dans le plancton", mais aussi "des intoxications par inhalation ou par absorption".
Toujours en raison de l'augmentation des températures et de la modification des habiats marins, les mammifères aquatiques se déplacent. Près de 1000 espèces étrangères ont ainsi migré en mer Méditerranée ces dernières années.
"Ces espèces viennent du bassin oriental de la Méditerranée. Avant, on a eu des espèces qui venaient de la Corse comme le mérou, mais là ces espèces arrivent petit à petit comme le poisson-lapin qui a été pêché il y a une dizaine d'années, le poisson-flûte", mentionne Frédéric Bachet.
Les méduses plus nombreuses
Ces évolutions ont des conséquences sur l'équilibre des fonds marins car certains poissons ont des habitudes alimentaires différentes qui peuvent bouleverser la chaîne alimentaire locale.
"Dans le bassin oriental de la Méditerranée, le poisson-lapin a supplanté l'herbivore local", évoque notamment le scientifique.
Souvent synonymes d'inquiétudes pour les vacanciers, les méduses sont également plus nombreuses sur les cotes.
"Le réchauffement est l'un des facteurs, additionné aux pollutions et aux bouleversements qu'apporte l'être humain. Cela crée des déséquilibres au niveau des compositions planctoniques", explique le biologiste.
Le phénomène est bien connu. En 2019 déjà, une étude de l'association environnementale eco-union décrivrait la mer Méditerranée comme "l'un des plus grands points chauds du changement environnemental et climatique" de la planète, marquée par un réchauffement de 20% plus rapide que le reste du monde.