Covid-19: quels sont les enjeux de la vaccination pour les adolescents de 12 à 15 ans?

Vaccination contre le Covid-19 avec une dose de Pfizer-BioNTech. - Fred TANNEAU © 2019 AFP
La vaccination contre le Covid-19 gagne chaque jour en vitesse. Depuis lundi, il est désormais possible à chaque Français majeur de se faire vacciner. Et dès le 15 juin, ce sera au tour des 12-18 ans de pouvoir accéder à la vaccination, comme l'a annoncé Emmanuel Macrin mercredi depuis le Lot.
"À partir du 15 juin eh bien nous commencerons à ouvrir la vaccination pour les adolescents, aux 12-18 ans, dans des conditions d'organisation, dans des conditions sanitaires, de consentement des parents et de bonne information des familles qui seront précisées dans les prochains jours par les autorités sanitaires", a déclaré le chef de l'État.
Vendredi dernier, l'Agence européenne du médicament a élargi l'accès du vaccin à ARN messager Pfizer/BioNTech aux adolescents âgés de 12 à 15 ans. "L'utilisation recommandée du vaccin Comirnaty Covid-19 (le vaccin Pfizer / BioNTech, NDLR) chez les enfants de 12 à 15 ans sera la même que chez les personnes âgées de 16 ans et plus. Il est administré en deux injections dans les muscles du bras, à au moins trois semaines d'intervalle", a complété l'instance.
L'institution a cependant rappelé qu'il restait loisible aux 27 États membres de l'Union européenne de mettre cette autorisation en application ou non, et qu'il leur revenait aussi de décider de ses modalités. BFMTV.com en rappelle les enjeux.
"Les jeunes adolescents transmettent aussi le virus"
Sur LCI lundi, Alain Fischer, le "Monsieur Vaccin" désigné par le gouvernement, a certes noté que le rythme de cette vaccination dépendrait des doses disponibles mais il a souligné l'importance incarnée par ce virage amorcée par la campagne: "Les jeunes adolescents transmettent aussi le virus. Donc s'ils se vaccinent, on limite la transmission, et ils participeront de l'immunité collective." Une immunité collective qui ne sera pleinement effective que lorsque 80% de la population aura été vacciné, comme l'a posé notamment la vaccinologue Marie-Paule Kieny, présidente du Comité scientifique vaccin Covid-19 auprès de France Info.
Car c'est bien l'accélération de la construction de l'immunité collective qui apparaît comme le principal enjeu de cette nouvelle étape. L'Académie nationale de médecine estimait déjà, mardi dernier, la vaccination des enfants et des adolescents "nécessaire pour l'acquisition d'une immunité collective" dans un communiqué. Elle ajoute dans ce même texte: "L'extension de la vaccination contre le SARS-CoV-2 aux adolescents et aux enfants devra être envisagée dès que les protocoles vaccinaux seront homologués dans ces tranches d’âge."
Bienfaits psychiques
Dans le JDD paru ce dimanche, Arnaud Fontanet, épidémiologiste à l'Institut Pasteur et membre du Conseil scientifique, a même expliqué que la vaccination des adolescents serait de plus en plus cruciale dans la lutte pour l'immunité collective au fil des mois:
"Projetons-nous à l’automne. À ce moment-là, comme une grande partie des adultes auront été protégés, les collèges et les lycées deviendront les principaux lieux de circulation du virus. Il suffirait que des variants encore plus contagieux entrent dans le jeu pour qu’on connaisse de nouvelles tensions dans les hôpitaux. Ce ne serait pas forcément une quatrième vague, mais le risque de devoir fermer des établissements scolaires resurgirait".
Une conséquence bien sûr dommageable pour les scolarités mais aussi pour le confort psychique des concernés, a développé le spécialiste: "Or les pédiatres nous le disent : si les ados font en majorité des formes mineures du Covid et si le syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique est rarissime, ils sont de plus en plus nombreux à souffrir de troubles psychiques comme l’anxiété, la dépression ou l’anorexie."
Gravité mineure, intérêt sanitaire majeur
Pourtant, l'adhésion de la population ne va pas de soi. C'est en tout cas ce que montre ce passage du communiqué de l'Académie nationale de médecine: "Cet élargissement rencontrera un autre obstacle à surmonter: la réticence de parents qui ne manqueront pas d’objecter que la Covid-19 est généralement bénigne dans le jeune âge". L'Inserm le confirme d'ailleurs dans une publication du 3 mai:
"Les cas sévères de Covid-19 chez les moins de 18 ans demeurent rares et se retrouvent surtout chez ceux souffrant de comorbidités et de déficits immunitaires."
L'intérêt sanitaire autour des écoles est cependant double, excédant les seuls élèves. En effet, d'après l'étude ComCor (pilotée par l'Institut Pasteur, la Caisse nationale d'Assurance Maladie, Santé Publique France et Ipsos), citée justement le 3 mai dernier par l'Inserm, être parent d'un élève scolarisé dans le secondaire (comme en maternelle d'ailleurs) expose à un surrisque de contamination évalué à 30%.
Une réponse au vaccin très satisfaisante
L'élargissement de la vaccination aux 12-15 ans peut se prévaloir d'un atout de poids: les données des essais cliniques conduits auprès de ce segment de la population dévoilées par l'Agence européenne du médicament appuient son efficacité. "La réponse immunitaire à Comirnaty dans ce groupe était comparable à la réponse immunitaire dans le groupe d'âge de 16 à 25 ans", a ainsi affirmé le communiqué qui a chiffré: sur les 1005 enfants ayant reçu le vaccin, "aucun n'a développé de Covid-19 contre 16 enfants sur les 978 ayant reçu le placebo".
Bien sûr, si le vaccin est efficace, il ne va pas sans provoquer parfois des effets secondaires passagers. Une étude clinique de phase 3 menée auprès de plus de 2200 adolescents américains - le vaccin est accessible depuis début mai auprès des 12-15 ans aux États-Unis et au Canada - a ainsi détaillé, dans un rapport rendu public le 12 mai et relayé par le site de LCI, que jusqu'à 66,2% des 12-15 ans inoculés avaient fait état d'une fatigue, jusqu'à 64,5% de maux de tête, et 41,5% de frissons ou encore 19,6% de fièvre. Aucun événement indésirable grave lié au vaccin n'a en revanche été signalé.
