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Pour l'infectiologue Gilles Pialoux: "les décisions politiques ont l'air déconnectées du scientifique depuis début janvier"

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Le chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Tenon, à Paris, s'inquiète de la situation des hôpitaux.

Face à la hausse des contaminations au Covid-19 en France, le professeur Gilles Pialoux tire la sonnette d'alarme. "On vit une période compliquée" et "les décisions politiques ont l'air déconnectées du scientifique depuis le début du mois de janvier", déplore ce vendredi sur BFMTV le chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Tenon, à Paris.

"À la fin du mois de janvier, le Conseil scientifique avait proposé un confinement à la semaine 5 [à partir du 1 février, ndlr] (…). La semaine 5, c'était déjà cinq semaines de confinement. Là, de toute façon, que ce soit le confinement ou la fermeture des écoles, on est dans des décisions beaucoup plus compliquées à prendre et de façon plus dure et plus durable", s'inquiète le professeur. Or, "l'hôpital vit quelque chose de plus difficile que la première crise, du moins en Île-de-France".

"Il y a quelque chose de central (…) et qui donne des tensions dans les cellules de crise, notamment avec les cancérologues, les chirurgiens, les gens qui prennent en charge les maladies chroniques, c'est de maintenir l'offre de soins pour les personnes qui sont non-Covid, et c'est beaucoup plus compliqué que la première vague où les gens sont restés chez eux", souligne Gilles Pialoux, évoquant notamment une baisse du nombre d'accidents de la route. "On n'avait pas cette problématique de coexistence" entre les malades du Covid-19 et les autres patients.

Situation critique en Île-de-France

"On nous demande aussi des choses qui sont infaisables: quand les ARS [agences régionales de santé, ndlr] parlent de 80% de déprogrammations, c'est infaisable sur le terrain. On n'a pas de marge en termes de personnel et pas de marge en termes de déprogrammations des personnes non-Covid, alors que la marée monte, et elle monte très fortement en réanimation", ajoute-t-il.

80% de déprogrammations vont être "sans doute" nécessaires dans les hôpitaux en Ile-de-France pour augmenter les capacités en lits de réanimation, a en effet annoncé jeudi le ministre de la Santé Olivier Véran lors de sa conférence de presse.

Pour Gilles Pialoux, en Île-de-France, "pour le week-end du 3 et 4 avril, on s'achemine vers 2000 personnes en réanimation, ce qui est 200% du capacitaire de réanimation. C'est extrêmement tendu", alerte-t-il. 1.410 malades étaient soignés mardi en réanimation sur près de 7.000 patients hospitalisés, dans la région la plus peuplée du pays (12 millions d'habitants).

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV