Nièvre: des arrêtés interdisent de "tomber malade", une alerte sur la désertification médicale

C'est une situation qui agace sérieusement les élus locaux depuis plusieurs années: dans le département de la Nièvre, l'état des urgences médicales se dégrade constamment.
C'est cet agacement qui a motivé plusieurs communes à prendre des arrêts symboliques "interdisant" aux habitants de tomber malade, rapportent l'AFP et France Bleu Bourgogne faute de quoi ils ne pourraient être correctement soignés.
Le département de la Nièvre, dans lequel il existe des "ponts médicaux aériens" permettant à des médecins situés ailleurs de venir dans les structures locales afin de pallier la pénurie de personnel médical à Nevers, par exemple. Il s'agit d'un des pires déserts médicaux de l'Hexagone.
Un sujet "très grave"
"Il est formellement interdit à tout habitant de tomber malade, sous peine de ne recevoir aucune prise en charge médicale en raison de la fermeture répétée des services d'urgences", précise l'arrêté municipal pris début octobre par Justine Guyot (Parti socialiste), maire de la commune de Decize.
Pourtant, le sujet est "très grave", explique l'élue de ce bourg qui compte environ 5.600 habitants. Depuis mars dernier, les urgences de l'hôpital de Decize "ont été placées en mode dégradé voire complètement fermées à 24 reprises", souligne Justine Guyot.
Il est même arrivé que les urgences de Nevers, situées à 40 minutes, soient elles aussi fermées privant ainsi 200.000 habitants (toute la Nièvre) d'accès aux soins, rapporte France Bleu.
"Je voulais donc interpeller" en prenant cet arrêté "ironique" le 8 octobre dernier, explique Justine Guyot à l'AFP. Une décision originale qui a séduit "une vingtaine" d'autres élus du département, à l'image de Christian Perceau, maire du petit village de Montigny-aux-Amognes.
"On a des énormes soucis avec les urgences à Nevers. C'est géré par le 15 à Dijon", la capitale régionale à environ 2h30 de route, "mais il y a des erreurs...", souligne le maire de Montigny-aux-Amognes, évoquant le cas de sa tante dirigée, en raison d'un mal de ventre, vers un médecin d'une commune alentour. "Quand elle y est arrivée, elle a trouvé porte close: la généraliste avait déménagé..."
Un département transformé petit à petit en désert médical
La Nièvre ne compte que 68 médecins pour 100.000 habitants contre une moyenne de 121 en France. Il n'y a pas de dermatologue, un seul rhumatologue, un allergologue... Et 20% des patients n'ont pas de médecin traitant.
La situation est telle qu'un "pont aérien" a été mis en place en janvier 2023 afin d'amener depuis Dijon, une fois par semaine au moins, un maximum de huit médecins à l'hôpital de Nevers.
Dernièrement, au mois de mars, un collectif d'urgentistes de Nevers a averti que la sécurité des patients n'était "plus assurée" au regard de la situation catastrophique des urgences médicales dans le département. Au total, les urgences tournent avec 6 praticiens, contre 27 en temps normal.