Don du sang: la justice européenne contre l'exclusion des homosexuels

Une collecte de sang en 2012, dans une usine à Chambéry. - -
L'homosexualité ne constitue pas un comportement qui justifierait l'exclusion permanente du don de sang, comme c'est encore le cas en France, a estimé jeudi l'avocat général de la Cour de justice européenne.
"Une telle exclusion peut être justifiée au regard de l'objectif de protection de la santé publique, à condition qu'elle n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire ce qui, dans l'exemple français, pourrait ne pas être le cas", a ajouté Paolo Mengozzi.
Le droit français exclut du don de sang, de manière permanente, les hommes qui ont eu ou ont des rapports homosexuels. Un Français a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Strasbourg, qui a demandé à la Cour de justice européenne si une telle exclusion permanente était "compatible" avec le droit de l'UE. La loi européenne prévoit que "les personnes dont le comportement sexuel les expose au risque de contracter des maladies infectieuses graves transmissibles par le sang sont exclues de manière permanente du don de sang".
Une discrimination indirecte
Dans ses conclusions, l'avocat général considère que "le seul fait pour un homme d'avoir eu ou d'avoir des rapports sexuels avec un autre homme ne constitue pas un 'comportement sexuel' qui justifierait l'exclusion permanente d'un tel homme du don de sang". "Le critère retenu par la France est ainsi formulé d'une manière trop large et trop générique".
Les États membres "peuvent maintenir ou établir des mesures de protection plus strictes que celles édictées dans la directive", mais leur liberté "s'arrête dès que le respect (...) des droits et libertés fondamentaux est menacé", rappelle Paolo Mengozzi. "Or, en excluant de manière définitive du don de sang tout homme ayant eu ou ayant des rapports sexuels avec un autre homme, la réglementation française introduit une évidente discrimination indirecte fondée, de manière combinée, sur le sexe (les hommes) et sur l'orientation sexuelle (l'homosexualité et la bisexualité)".
L'avocat général souligne "l'incohérence de la réglementation française", qui ne prévoit "pas de contre-indication spécifique visant une femme dont le partenaire aurait eu ou aurait des rapports sexuels avec d'autres hommes". Par ailleurs, une personne dont le partenaire est séropositif "ne fait l'objet que d'une contre-indication temporaire de quatre mois, alors que, dans un tel cas, l'exposition au risque est réelle".