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Délais, dons de gamètes: les défis que soulève l'explosion des demandes de PMA

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La loi bioéthique, adoptée début août, a élargi à toutes les femmes la Procréation médicalement assistée. Celle-ci a suscité une explosion des demandes d'après les spécialistes. Toutefois, les dons de gamètes ne parviennent pas à suivre le rythme des rendez-vous.

Adoptée le 2 août, et parue le lendemain au Journal officiel, la loi bioéthique s'est gravée voici près de trois mois dans le droit. Elle élargit désormais à l'ensemble des femmes - qu'elles soient en couple ou célibataires - l'accès à la Procréation médicalement assistée (PMA). Si les évaluations sont encore embryonnaires, les spécialistes du secteur sont catégoriques: on voit déjà une explosion des demandes de PMA.

Un "symbole" pour les demandeuses

Lucille et Laëticia ont soumis la leur. En couple depuis six ans, les deux femmes ont confié à BFMTV qu'elles réflechissaient depuis "un an et demi" à enclencher la procédure. Longtemps, elles ont pensé franchir la frontière et se rendre en Espagne afin de mener leur projet à bien. La promulgation de la loi a changé leur projet.

"Il y a l'aspect symbolique. Maintenant c'est légal, ça ne l'était pas avant. Aujourd'hui savoir qu'on peut le faire en France, c'est une fierté et surtout on se dit que pour notre famille, ce sera un peu moins de discrimination du fait que ce sera légal", témoigne à présent Lucille.

Six mois pour obtenir un premier rendez-vous

Finalement, c'est à l'Hôpital Cochin, à quelques minutes de leur domicile parisien, que les deux jeunes femmes ont pris rendez-vous. Sur place, Céline Chalas, médecin biologiste au CECOS local (Centre d'Etudes et de Conservation des Œufs et du Sperme Humain), donne un aperçu de la flambée des dossiers.

"En deux ou trois mois, on a eu quasiment autant de demandes qu'en une année. Là, on est à des niveaux multipliés par cinq ou six. Sachant qu'on prend déjà normalement 150 couples par an et là on a eu quasiment 200 demandes depuis le vote de la loi."

Un engouement qui pose un premier problème, d'intendance. "C'est peut-être ce point-là, le plus difficile à gérer pour nous: les délais de rendez-vous", précise-t-elle. Il faut ainsi compter en moyenne six mois pour obtenir un premier rendez-vous, puis dix mois supplémentaires pour recevoir un don de gamète - c'est-à-dire un spermatozoïde ou un ovocyte.

Et à nouveau, le bât blesse. Car les ressources manquent pour étancher la cadence qui s'annonce. Selon les derniers chiffres officiels fournis par la Fédération française des CECOS, 836 femmes ont donné en 2019, et 317 hommes les ont imitées.

Une campagne de sensibilisation initiée dès ce mercredi

En conséquence, l'Agence de biomédecine a lancé ce mercredi une campagne d'information autour du don de gamètes. Une sensibilisation qui vise à doper l'arrivée de ces matières premières de la PMA et peut mettre en avant la gratuité de ces dons, ainsi que leur anonymat... enfin pour un temps. Car l'équation doit changer dans moins d'un an.

"À partir du 1er septembre 2022, le fait d'accepter la transmission de son identité à la personne issue de son don, une fois qu'elle aura atteint sa majorité devient une condition du don. Il ne pourra donc plus y avoir de don de gamète en France que si le donneur ou la donneuse accepte le principe de ce droit d'accès aux origines", développe Emmanuelle Cortot-Boucher, directrice de l'Agence de la biomédecine, sur notre antenne.

La mesure ne sera pas automatiquement rétroactive bien entendu. Emmanuelle Cortot-Boucher complète ainsi: "Pour les personnes qui ont donné avant le 1er septembre 2022 - peut-être même il y a vingt ou trente ans - la loi prévoit qu'il ne pourra y avoir accès à l'identité de ces personnes que si elles y consentent expressément."

Robin Verner
Robin Verner Journaliste BFMTV