Covid-19: avec 200.000 cas quotidiens, quand pourrait-on atteindre le prochain pic de l'épidémie?

Avec 217.480 nouveaux cas confirmés mardi par Santé Publique France, un taux de positivité des tests à 30% et un R effectif à 1,3 - s'il est supérieur à 1, cela signifie que l'épidémie se propage - la pandémie de Covid-19 et bel et bien de retour en France, après une décrue progressive durant le mois de février.
Prépondérance de BA.2
Sixième vague ou rebond de la cinquième? Experts et politiques divergent. Interrogé par Ouest-France, Antoine Flahault, directeur de l'Institut de la santé globale de Genève, évoque bien une nouvelle vague, qui "a démarré en France début février". Une analyse qui n'est pas partagée par l'épidémiologiste Mircea Sofonea, qui s'exprimait lui dans 20 minutes: "ce qu'il faut appeler 'vague', c'est plutôt une reprise qui dure un certain temps". Un constat partagé par le gouvernement. À l'issue du conseil de défense sanitaire qui s'est tenu mardi, un membre de l'exécutif confiait à BFMTV: "c'est un rebond, pas une vague".
Contacté par BFMTV.com, le médecin Yvon Le Flohic tempère. "J’ai envie de dire, peu importe. On a vu des pays où les vagues d’Omicron et de BA.2 se sont chevauchées, d’autres où il y a eu un rebond puis où ça a remonté. Peu importe le terme que l’on donne, on voit que ça circule beaucoup".
À l'origine de cette circulation active du virus, on retrouve donc BA.2, une sous-variation du variant Omicron. Plus contagieux et moins dangereux que son grand-frère, BA.2 représentait 73% des cas positifs des séquences interprétables dans la semaine du 7 au 13 mars, selon Santé Publique France.
En observant les courbes épidémiques, sa plus grande positivité saute aux yeux. Depuis le 4 mars, les cas positifs augmentent de manière continue. Pour dépasser le seuil des 200.000 cas journaliers mardi. Reste à savoir jusqu'où ira la courbe. Doit-on s'attendre à dépasser les 300.000 nouveaux cas quotidiens comme en janvier 2022? Les biologistes sont notamment inquiets de la capacité du sous-variant à recontaminer les mêmes personnes en seulement un mois d'intervalle.
Les prévisions de l'Institut Pasteur
Dans un document publié le 10 mars, l'Institut Pasteur a exploré le développement probable de l'épidémie, en prenant en compte la levée de la quasi-totalité des mesures de freinages épidémiques le 14 mars. Tablant sur des taux de transmission devenant 50 à 130% supérieurs à ceux observés en janvier-février.
"Dans tous les scénarios explorés, le pic des cas reste très inférieur au pic de janvier. Il pourrait dépasser 100.000 cas quotidiens en mars dans les scénarios où les taux de transmission augmentent de façon très importante suite au relâchement des mesures de contrôle", analysaient à l'époque les auteurs du document.
Dans les graphiques présentés, les épidémiologistes évoquaient un pic des cas atteint à la fin du mois de mars, où ces derniers ne dépasseraient pas les 170.000 quotidiens. À l'aune des chiffres actuels, doit-on considérer que les épidémiologistes ont sous-évalué la virulence qui s'abat actuellement sur la France?
Une décrue prochaine?
Interrogé sur BFMTV, Yves Coppieters, médecin épidémiologiste et professeur en santé publique à l'Université libre de Bruxelles met en garde contre la surinterprétation des chiffres actuels.
"Il est vrai que le nombre de contaminations aujourd'hui comme hier est très important. Mais on sait très bien qu'en début de semaine, on rattrape le retard du week-end. Il faut donc regarder les tendances d'une semaine à une autre. Et qu'observe-t-on entre mardi dernier et ce mardi? Une baisse de la croissance de l'épidémie. Avant, on avait une augmentation de 50% des cas. Mais là, on est à une augmentation entre 20 et 30% des cas. On peut donc être dans une régression des contaminations", analyse-t-il.
Une décrue pourrait donc se dessiner, mais encore une fois, il faut analyser ces données avec la plus grande précaution. "D’emblée, il faut être clair sur le fait que la production de telles projections est un exercice particulièrement difficile et incertain. Il convient donc de toujours les considérer avec précaution", mettait en garde dans sa publication l'Institut Pasteur.
Du côté du gouvernement, on évoque désormais un pic atteint d'ici au 15 avril, comme l'a confié à BFMTV un membre de l'exécutif. En se voulant rassurant du côté des hospitalisations: "Il n'y a pas de hausse des admissions en soins critiques".
Selon Covid tracker, le nombre de personnes placées en réanimation avec Covid-19 continue de baisser, et ceci de manière continuelle depuis le 20 janvier. Moins 9,5% lundi, moins 8,6% mardi. "En France, on voit moins de cas graves, car on a une population très bien vaccinée. On a tendance à penser qu'on a atteint une possible immunisation de la population", analyse pour BFMTV.com Yvon Le Flohic.
"On essuie une vague moindre dans un hôpital plus affaibli"
Publiées ce mercredi, les dernières prévisions de l'Institut Pasteur concernant les chiffres des hospitalisations prévoient néanmoins une légère remontée des hospitalisations durant la première quinzaine d'avril, à relier à la remontée actuelle des cas.
Interrogé par Ouest-France ce mercredi, Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses à l'hôpital Tenon à Paris, met en garde les autorités: "la tension hospitalière est modérée, aux alentours de 30% et les prévisions de l’Institut Pasteur ne font pas craindre de saturation. Mais l’état des forces de l’hôpital public continue à se dégrader, avec plus d’absentéisme, plus de burn-out, plus de départs. On essuie une vague moindre dans un hôpital plus affaibli".
"Il faut faire attention à ce que le relâchement à tout prix, surtout avec les plus fragiles, ne soit pas trop précoce. Mais il est clair qu'on a une bonne immunité", déclare sur BFMTV Yves Coppieters. Mais comme l'indique Yvon Le Flohic, sixième vague ou rebond, le plus important réside dans la prise en compte par la population des gestes à adopter en fonction de leur situation.
"C'est aussi aux personnes de prendre les mesures qui les concernent. La santé publique fonctionne uniquement quand les gens sont bien informés, et qu'ils prennent les bonnes décisions les concernant", avertit le médecin.