Coronavirus: pourquoi se précipiter hors des grandes villes n'est pas une bonne idée

Alors que le confinement des Français prendra effet ce mardi à midi et pour 15 jours, les gares voient affluer des personnes cherchant à éviter la quarantaine en ville. Mais cette réaction pourrait aggraver la propagation du coronavirus, car il se déplace avec les personnes.

"Sauvez des vies. Restez chez vous". Cet ordre, asséné depuis ce week-end et répété par le président de la République lundi soir, n'a pas encore convaincu tout le monde. Depuis la fin de la semaine dernière, le gouvernement demande aux Français de limiter leurs déplacements, afin d'endiguer la propagation du nouveau coronavirus. Mais avec l'annonce potentielle d'un confinement, certains avaient déjà commencé à fuir les grandes villes ce week-end, pour rejoindre des espaces plus spacieux, de la familles, des proches, en province.

L'annonce officielle du confinement lundi soir - effectif à partir de ce mardi midi - n'a pas calmé cet exode. Des reporters de BFMTV ont pu observer aux aurores ce mardi la gare Montparnasse, à Paris, bondée de personnes quittant la capitale. Mais cette réaction ne peut avoir pour conséquence que de propager un peu plus l'épidémie.

"Ce n'est pas une bonne idée, le virus se déplace avec les personnes"

"On l'a vu en Italie quand on a commencé à parler de quarantaine les gens se sont précipités à la gare de Milan pour partir", rappelle sur BFMTV Vincent Maréchal, professeur et spécialiste en virologie. "C'est un réflexe qui est humain, mais il faut expliquer aux gens que ce n'est pas une bonne idée parce que le virus se déplace avec les personnes".

Les études sur le nouveau coronavirus ont jusque là mis en avant le fait que parmi les personnes contaminées, une grande partie ne présente pas de symptômes, ou très peu, mais reste infectée et contagieuse. Rentrer voir ses parents, plus âgés et plus fragiles, n'est pas la démarche la plus raisonnable pour le moment, transporter le virus dans une zone peu touchée non plus. Selon les derniers chiffres, l'Île-de-France concentre actuellement plus de cas confirmés de coronavirus que toute autre région en France.

De plus, les transports en train sont loin de respecter les consignes des mesures barrières: queues devant les entrée, sièges collés, couloirs exigus... Il s'agit d'endroits où les personnes saines pourraient se retrouver infectées. 

"La distanciation sociale c'est le seul moyen qu'on ait pour éviter la contagion", rappelle le docteur Alain Ducardonnet, consultant Santé pour BFMTV. Pour éviter d'attraper ou de propager le coronavirus, il faut se laver les mains régulièrement, rester à un mètre des autres ou encore tousser dans son coude pour ne pas répandre ses miasmes.

"On est hallucinant d'inculture d'hygiène"

Comme le précise Santé Publique France, "il est probable que ce coronavirus soit similaire aux autres coronavirus humains, qui sont généralement transmis lors de contacts étroits par l’inhalation de gouttelettes infectieuses émises lors d’éternuements ou de toux par le patient ou après un contact avec des surfaces fraîchement contaminées par ces sécrétions".

"On en a assez de l'incivilité sanitaire des Français!", a lâché ce mardi matin sur BFMTV Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Tenon, devant ces images dans les gares. "Les images sur les personnes qui se précipitent confinées dans les gares, qui poussent pour monter dans les trains, il y en a un sur mille qui porte un masque... On est hallucinant d'inculture d'hygiène".

Par ailleurs, retourner en province c'est "se mettre au vert dans une région dans laquelle la structure hospitalière en cas de problème n'est pas forcément très bien fournie pour accueillir les cas", souligne également Vincent Maréchal. "Ce n'est pas forcément non plus une très bonne idée".

"Nous déplacer le moins possible"

Interrogé sur ce phénomène de fuites lors de sa conférence de presse lundi soir, le ministre de l'Intérieur a minimisé le phénomène et déclaré qu'il ne s'agissait pas de "l'essentiel des Français. L'essentiel des Français ont un domicile, ils vivent dans ce domicile et nous devons les accompagner dans ce cadre là."

"Cette guerre on ne la gagnera que si nous changeons tous nos modes de vie, nos façons de nous déplacer, nous déplacer le moins possible et vraiment il faut respecter tous les gestes barrières qui sont répétés", a de son côté déclaré la ministre des Transports Elisabeth Borne, ce mardi matin sur BFMTV. Elle ajoute toutefois qu'il y aura une "tolérance" pour les personnes cherchant à rejoindre une résidence secondaire, "mais il faut le faire dans l'ordre, il faut le faire sans se précipiter dans les gares".

Le gouvernement avait pris la décision dès dimanche de réduire drastiquement et progressivement les transports longue distance, afin de limiter la propagation du coronavirus, avec un trafic ferroviaire bientôt divisé par deux et seulement "quelques vols" internationaux. Mardi matin, le gouvernement a annoncé que la fréquence des trains allait être encore réduite dans les prochains jours.

Salomé Vincendon