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"Ça va continuer à augmenter à l'hôpital": le monde médical mitigé après les nouvelles annonces contre le Covid-19

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Des épidémiologistes et infectiologues s'interrogent sur l'efficience des mesures annoncées lundi par Jean Castex et Olivier Véran et leur capacité à faire baisser les contaminations.

Fermeture des discothèques pour quatre semaines, renforcement du télétravail, masque obligatoire à l'extérieur à l'école et limitation du brassage des élèves... Face à la forte reprise épidémique, un nouveau Conseil de défense sanitaire s'est tenu lundi à l'Élysée. Jean Castex et Olivier Véran ont annoncé en début de soirée de nouvelles mesures pour tenter d'endiguer la cinquième vague de Covid-19.

Si l'avancée des vacances scolaires, les mesures de couvre-feu, de confinement ou de jauge sont à ce stade exclues, le Premier ministre a appelé à "lever le pied" concernant les interactions sociales. "Mon message est très simple, jusqu’aux fêtes de fin d’année, on lève le pied, on arrête, on se protège et on protège ainsi notre capacité à profiter de Noël", a exhorté le chef du gouvernement.

Ces mesures suffiront-elles à préserver les fêtes de fin d'année, comme l'appelle Jean Castex de ses voeux? Pour plusieurs épidémiologistes, ces annonces peuvent contribuer à freiner l'épidémie mais risquent de ne pas suffire.

Bulle sanitaire

"La décision a été de ne pas faire peser le poids d'éventuelles restrictions sur les vaccinés", analysait lundi soir sur BFMTV l'infectiologue Benjamin Davido, qui exerce à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine). Le soignant aurait souhaité, que soit "clairement" réexpliquée "la nécessité de diminuer les contacts sociaux", en reprenant "des images plus fortes comme la bulle sanitaire l'année dernière". "Ce sont des messages qui fonctionnent extrêmement bien et qui donnent un cap pour passer cette période un petit peu difficile", juge le spécialiste.

Il avait été recommandé l'année dernière en vue des fêtes de fin d'année de ne pas dépasser les cinq convives attablés afin de limiter les risques de contamination.

Pour Benjamin Davido, "on aurait pu imaginer un système de jauges, qui existait initialement à l'instauration du pass sanitaire. Au même titre que le télétravail reste très superficiel, deux jours par semaine" est "insuffisant".

"Je pense que tout ceci laisse des marges de manoeuvre que se garde le gouvernement en cas de dégradation de la situation", analyse-t-il.

"On voit un peu partout en Europe monter les hospitalisations"

"Les épidémiologistes ont plutôt tendance à vouloir appuyer sur le frein de façon encore plus proactive lors des vagues épidémiques comme on en connaît en ce moment en Europe", soulignait ce mardi matin sur notre antenne Antoine Flahaut, épidémiologiste et directeur de l'Institut de santé globale de Genève.

"On ne sait pas si ça va passer, ce qu'il faut c'est que ça 'passe', qu'on arrive à éviter la saturation des hôpitaux, ça c'est le pari qui est fait" poursuit-il.

"C'est très difficile de le prévoir, aujourd'hui on voit un peu partout en Europe monter les hospitalisations, y compris dans les pays bien vaccinés donc ce n'est pas certain que ça puisse passer", craint l'épidémiologiste, qui regrette aussi qu'aucune norme ne soit "édictée pour la ventilation". "Je pense que ce n'est pas une mesure liberticide, ce n'est pas une mesure qui aurait gêné beaucoup de personnes", étaye-t-il.

"Ça va continuer à augmenter à l'hôpital"

Invitée à réagir à ces mesures sur France 2 ce mardi matin, Dominique Costagliola voit une seule bonne nouvelle parmi les mesures: "L'annonce du calendrier vaccinal pour les 5 à 11 ans. Pour le reste, compte-tenu du fait qu'on vit à l'intérieur, que les écoles restent ouvertes, que le protocole n'est pas vraiment modifié dans les écoles, j'ai peur que l'augmentation se poursuive et que ça conduise à la diffusion du variant Omicron en France", redoute-t-elle.

Selon l'épidémiologiste, le virus va "continuer à circuler même avec ces mesures en plus. (...) On sait d'ores et déjà que dans les trois semaines qui viennent ça va continuer à augmenter à l'hôpital".

La directrice de recherche émérite à l'Inserm n'aurait pas souhaité des mesures au niveau de mars 2020, avec le confinement strict et la fermeture des écoles, mais aurait vu d'un bon oeil des écoles en distanciel "pour amener à une circulation moindre".

"Tout ce qui va permettre de limiter la diffusion est bon à prendre pour arriver à contrôler la situation, sans avoir à prendre les mesures qui ont été prises en mars (2020)", explique Dominique Costagliola.

Réduire les contaminations sans "aplatir" la courbe

Pour l'endocrinologue Boris Hansel, consultant santé de BFMTV, les mesures prises par le gouvernement pourraient se révéler efficaces pour permettre une diminution des contaminations.

"Aplatir complètement, ça on ne sait pas", a-t-il toutefois tempéré ce mardi sur notre antenne.

"Réduire d'à peine 10% le taux de reproduction du virus, le fameux R0, c'est démontré, ça diminuera le pic des hospitalisations et des contaminations. Or pour réduire un petit peu le taux de reproduction, les mesures qui ont été annoncées devraient être efficaces", estime le médecin, qui regrette néanmoins le fait qu'on n'a "peut-être pas assez (parlé) du lavage des mains".

Clarisse Martin Journaliste BFMTV