Bisphénol A, aluminium, phtalates: les dangers des emballages alimentaires

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Actuellement, l'Agence de sécurité alimentaire (Anses) mène une expertise sur le risque de contamination des denrées alimentaires par les huiles minérales à partir des emballages. De par leur présence dans les encres ou les adhésifs des emballages alimentaires en papier et en carton, ces huiles minérales (MOH) peuvent en effet migrer vers les aliments. En attendant des conclusions complètes, l'Anses recommande de réduire la contamination des denrées alimentaires par ces composés en priorité.
Mais une enquête de la Répression des fraudes (DGCCRF) menée en 2015 montre que les huiles minérales ne sont pas les seules substances qui peuvent contaminer les aliments de cette manière. L'enquête qui consistait à "contrôler l’aptitude des matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires et le respect de la réglementation applicable à ces produits" montre que la situation reste peu satisfaisante malgré la loi.
Des interventions ont été menées chez les responsables de la première mise sur le marché de ce type de matériaux et d'objets, les grossistes et les détaillants. Au total, 894 établissements ont été visités et 1895 actions de contrôle réalisées. Les contrôles ont particulièrement ciblé les emballages en plastique, les biberons et autres articles destinés à l’alimentation des nourrissons, les bocaux en verre et les articles en céramique ou en verre.
Attention aux matériaux en plastique, sauf les biberons
Sur les 313 échantillons prélevés, les résultats ont révélé 32 non conformités par "migration d’éléments chimiques" sur différents produits (assiette, bol, louche, barquette, boîte à goûter, plat, coupelle, raclette, sauteuse…). Les articles non conformes ont fait l’objet de mesures administratives en fonction du niveau de risque: suspension de la mise sur le marché, retrait, rappel, destruction, etc.
Les essais effectués sur quatre biberons et sur un bac à biberons ont montré qu'ils n'étaient pas concernés car bien exempts de bisphénol A. Une substance qui s'inscrit dans la liste des perturbateurs endocriniens, interdits de tout conditionnement à vocation alimentaire depuis 2012. Si la loi est respectée pour les biberons, ce n'est pas le cas pour tous les articles et conditionnements en matière plastique. Douze échantillons se sont ainsi avérés non conformes, dont trois notamment pour des contaminations par le bisphénol A.
"Pour ces articles, il a été demandé aux entreprises de se conformer aux bonnes pratiques de fabrication", indiquent les enquêteurs. Les autres non conformités concernent une louche en nylon (dépassement de la limite en amines aromatiques primaires), une barquette (migration globale), une boîte à goûter et une autre boîte (présence d’un phtalate interdit), un bidon de cycliste et une pince à cuisine jaune (migration du colorant).
Des étiquetages obligatoires pas toujours présents
Les experts se sont également intéressés aux bocaux en verre, susceptibles de contaminer les aliments qu'ils contiennent en phtalates: ces substances chimiques également considérées comme des perturbateurs endocriniens ont été découvertes dans neuf échantillons d'aliments. Les articles en céramique, quant à eux, peuvent exposer le consommateur à des taux trop élevés d'aluminium.
Onze non conformités ont été relevées sur les 51 prélèvements réalisés (articles de tables, plats, pots, coupelles, verrines…). "Dix échantillons ont été jugés dangereux, à la suite de la migration de l’aluminium en une quantité dépassant le niveau maximum admissible", affirment-ils. A titre d'exemple, une coupelle colorée présentait un dépassement en aluminium et en plomb supérieure au seuil réglementaire, tout comme un coffret de verres à thé décorés (contact buccal).
Parmi les autres non conformités relevées figurent également un saladier en caoutchouc, deux coupes métalliques (plomb et phtalate) et un égouttoir présenté en "fibres de bambou" composé essentiellement de matières plastiques. Côté réglementation, les analyses montrent que "la grande majorité des distributeurs de taille importante et des grandes surfaces spécialisées présentent un faible taux de non conformité en matière d’étiquetage et la mention de contact alimentaire est assez présente sur les articles."
Mais les enquêteurs font savoir que de leur côté, les petits distributeurs indépendants, les autoentrepreneurs, les enseignes non spécialisées, les magasins d’usine et autres commerces de détail (bazars, solderies…) peinent à connaître les règles applicables dans ce domaine. En outre, ils ont pu relever des allégations laissant croire aux consommateurs à une origine française, locale ou "écologique" des articles commercialisés, souvent sans justification. "Cette pratique est susceptible de relever d’une tromperie ou d’une pratique commerciale trompeuse", concluent-ils.