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"Vers un nettoyage ethnique" à Gaza: Jean-Yves Le Drian estime qu'Israël est "en train de devenir un État paria"

L'ancien ministre de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, le 25 septembre 2023 à Paris.

L'ancien ministre de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, le 25 septembre 2023 à Paris. - JULIEN DE ROSA / AFP

L'ancien ministre des Affaires étrangères et de la Défense Jean-Yves Le Drian dénonce la situation humanitaire dans la bande de Gaza et l'attitude d'Israël.

Des mots forts. L'ex-ministre des Affaires étrangères (2017-2022) Jean-Yves Le Drian, actuellement envoyé personnel d'Emmanuel Macron pour le Liban, dénonce ce vendredi 6 juin sur France Inter la situation à Gaza et la politique menée par Israël dans ce dossier.

"On a dépassé les limites de l'inacceptable. Le fait d'utiliser l'arme humanitaire, l'arme de la famine comme un outil d'action militaire est absolument dramatique", s'alarme-t-il.

Actuellement, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu n'autorise qu'une quantité limitée d'aide humanitaire à entrer dans la bande de Gaza via la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), soutenue par les États-Unis et Israël, après deux mois de blocus.

Un pays "en faillite morale"

"Netanyahu, par sa politique, aboutit au fait qu'Israël aujourd'hui est un peu au bord de l'abîme. C'est le contraire des fondamentaux qui avaient permis la construction d'Israël parce qu'Israël, c'était la démocratie, le respect du droit, le respect des valeurs humaines", estime l'ex-ministre des Affaires étrangères et de la Défense.

"Or, aujourd'hui, ce pays est en faillite morale, il est en train de devenir, du fait de l'action de Netanyahu, un État paria au niveau international, c'est une situation extrêmement dramatique", déplore l'ancien socialiste.

"Lorsqu'on critique la politique du gouvernement de Netanyahu, on est accusé immédiatement d'antisémitisme, ça ce n'est pas possible, cet amalgame est tout à fait condamnable", condamne Le Drian.

"Lorsque le président de la République (Emmanuel Macron) fait une intervention en demandant à ce que l'aide humanitaire arrive (à Gaza, NDLR), il est taxé de complice du Hamas, ça ne va plus", ajoute encore le représentant personnel du président au Liban.

Pas de "génocide", mais "vers un nettoyage ethnique"

"Je ne vois pas aujourd'hui d'autre issue que le fait que le peuple israélien lui-même marque l'arrêt de cette dérive considérable qui va entraîner Israël dans les années qui viennent dans une situation à mon avis dramatique", analyse-t-il.

Interrogé sur l'existence d'un génocide en cours à Gaza, Jean-Yves Le Drian dit préférer ne pas employer ce terme, estimant qu'il a une "connotation juridique" et "historique".

"Nous allons vers un nettoyage ethnique", préfère-t-il, reprenant les mots de l'ex-Premier ministre israélien Ehud Olmert.

Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin à la guerre qui ravage Gaza, déclenchée par l'attaque du 7-octobre, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils.

En retour, Israël a lancé une campagne militaire de représailles, passant par des bombardements massifs et des combats au sol, qui a tué plus de 54.600 Palestiniens, majoritairement des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.

Une plainte contre X pour meurtre et génocide est déposée ce vendredi en France par une grand-mère accusant les autorités israéliennes d'être responsables de la mort de ses deux petits-enfants français à Gaza en octobre 2023.

Juliette Desmonceaux