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"Terrorisme", "prise d'otage": quand le langage sert à casser les grèves

Le langage se durcit à l'égard des grévistes.

Le langage se durcit à l'égard des grévistes. - Montage BFMTV

Depuis le début des blocages, certains politiques s'emploient à décrédibiliser les grévistes et la CGT. En utilisant le champ lexical du terrorisme et de la guerre.

La France est-elle "prise en otage"? La CGT est-elle un syndicat "terroriste"? C'est en tout cas ainsi que nombre de personnalités politiques, et de médias, qualifient la situation de blocage que connaît la France depuis plusieurs semaines. Si l'utilisation d'un tel langage n'est pas nouvelle, le climat actuel rend l'exercice beaucoup moins anodin. 

Syndicats, prise d'otage et terrorisme

Luc Châtel en 2014 à propos du bac, Frédéric Lefevbre en 2010 à propos des aéroports, Nicolas Sarkozy en 2010 à propos des retraites: tous ont qualifié une grève ou un mouvement social de "prise d'otages". Beaucoup plus récemment, c'est Manuel Valls qui s'en est pris aux manifestants anti-loi Travail, estimant que "la démocratie est prise en otage". 

La "prise d'otages", immédiatement associée à une action criminelle ou terroriste, devient rapidement l'expression de référence pour désigner une grève gênante pour les usagers des transports par exemple.

Plus fort que la "prise d'otage", il y a les syndicats "terroristes". C'est ce que laissent entendre certains médias après la journée sans journaux du 26 mai au cours de laquelle la CGT a étendu son mouvement de grève aux imprimeries après que certains titres avaient refusé de publier une tribune de son patron, Philippe Martinez.

Le public se souvient trop bien du terrorisme

Problème pour les tenants d'un langage guerrier: la France a connu le terrorisme et les prises d'otages, les vraies. Il y a six mois et un an et demi, par deux fois des groupes terroristes ont frappé Paris, Vincennes et Saint-Denis, tuant 17 personnes en janvier et 130 en novembre 2015.

Une mémoire qu'entretiennent de nombreux internautes, ulcérés de voir un tel langage utilisé pour qualifier des grèves, et des problèmes de transport. L'un d'entre eux a interpellé le Figaro sur sa une, qualifiant Philippe Martinez de "l'homme qui veut mettre la France à genoux", rappelant que le dernier "journal" à avoir utilisé cette expression était celui de Daesh, à propos des attentats du 13 novembre.

Paul Aveline