Guerre des gauches: ces élus qui croient à la mort du PS

De nombreux socialistes s'inquiètent de l'avenir du parti. - PHILIPPE LOPEZ / AFP
Ils n'ont pas besoin de boule de cristal, ceux qui depuis des semaines prédisent "la fin", "la mort" ou "la disparition" du Parti socialiste. Pour étayer cette théorie, ils s'en tiennent aux faits. A la faible participation au premier tour de la primaire à gauche, au renoncement de François Hollande et à son flagrant désintérêt pour la primaire, au tropisme plus ou moins assumé de nombreux socialistes, dont des ténors du parti, pour Emmanuel Macron, au fait que Manuel Valls ne veuille pas dire qu'il soutiendra Benoît Hamon s'il ce dernier l'emporte.
Derrière ces prédictions se cache une vraie crise, incarnée par le duel à venir. L'antagonisme entre Manuel Valls et Benoît Hamon transparaît dans les flèches décochées par l'ancien Premier ministre sur le projet de revenu universel de son opposant, ou les prétendus "accommodements" de ce dernier avec l'islam radical. Il est encore criant ce mercredi, dans la profession de foi envoyée par les candidats avant l'ultime débat qui devra aider à les départager.
"C'est violent"
Le député des Yvelines s'en prend une nouvelle fois à la "vieille politique", tandis que son adversaire s'érige en adversaire des "poussées communautaristes" et tout simplement en seul candidat capable de faire gagner la gauche. Il est effectivement difficile dans ces conditions d'imaginer le rassemblement que tous appellent de leurs voeux après le second tour.
Et les premiers à pâtir de cette situation sont les élus socialistes, dont beaucoup se retrouvent au milieu du gué. Coincés entre l'aile gauche et l'aile droite du PS, ceux qui ne sont pas tentés de rallier le leader d'En Marche! sont pris entre la volonté de ne pas soutenir un frondeur qui a contribué à la défaite du quinquennat, et la peur que Manuel Valls, tout ancien chef du gouvernement qu'il soit, ne soit pas capable de faire gagner la gauche. Au total, une centaine de députés socialistes n'auraient pas encore choisi leur candidat pour le second tour.
"J'ai l'impression de vivre la mort annoncée du PS. C'est violent", lâche Sébastien Pietrasanta, député des Hauts-de-Seine, dans Le Figaro ce mercredi.
"Si Hamon gagne la primaire, ce sont les frondeurs qui seront aux manettes. Comme réformateur, j'aurai le choix entre trahir mes convictions ou aller vers Macron", réfléchit le député de l'Ardèche Pascal Terrasse. "Je me pose des questions pour la suite. Ce sont deux projets de société diamétralement opposés qui nous sont présentés", explique aussi l'élu parisien Roger Madec, selon lequel beaucoup de militants s'interrogent également.
L'avertissement de Michel Rocard
"Certes, Hamon et Valls ont des parcours différents et le quinquennat est passé par là, mais ils viennent de la même boutique rocardienne. Hamon saura conserver la machine du PS", fait valoir un autre parlementaire, plus optimiste. Michel Rocard, dans son dernier entretien, publié dans Le Point en juillet 2016, mettait en garde contre les risques de disparition du PS, et n'épargnait justement pas ceux qui se réclament de son héritage. "La conscience de porter une histoire collective a disparu, or, elle était notre ciment. Macron comme Valls ont été formés dans un parti amputé. Ils sont loin de l'Histoire", estimait-il.
Lors d'un discours prononcé en 2014 dans le cadre des Etats généraux du socialisme, il adressait un dernier avertissement à ses semblables, qu'il enjoignait à respecter "le temps long":
"A ne s'occuper que du court terme on risque des écarts et l'éloignement de l'objectif (...) Il ne faut jamais, dans les tempêtes du présent, perdre l'essentiel de vue. Or l'essentiel se joue sur la longue durée".