BFMTV
Parlement

Couverture chauffante et thé bouillant: les députés frigorifiés à l'Assemblée

L'Assemblée nationale commence le 28 novembre 2022 l'examen d’une sensible proposition de loi anti-squat

L'Assemblée nationale commence le 28 novembre 2022 l'examen d’une sensible proposition de loi anti-squat - MARTIN BUREAU © 2019 AFP

Dans des bureaux qui ne dépassent pas toujours les 16,5°C, les élus du Palais-Bourbon utilisent différentes méthodes pour se réchauffer. Considérés comme des passoires thermiques, ces locaux ont été équipés de thermomètre par l'administration. Dans les rangs des députés Renaissance, on refuse de se plaindre.

La France a froid, les députés aussi. Face à la chute des températures, les parlementaires utilisent le système D à l'Assemblée nationale, véritable passoire thermique.

"Moi, je suis sous les combles et dans mon bureau, la température dépasse rarement les 16,5°C. Je ne suis pas frileuse mais quand même... J'utilise une couverture chauffante qui est très efficace", raconte une élue socialiste à BFMTV.com.

"Deux doudounes"

L'Assemblée nationale, construite en 1722, compte de nombreuses fenêtres de très grande taille, rarement dotées de double vitrage. "Les faire remplacer par du double vitrage représente un coût exorbitant", reconnaît un membre de la direction des Affaires immobilières de l'Assemblée nationale.

À l'exception de la verrière de l'hémicycle, très endommagée et qui a bénéficié de travaux d'ampleur à l'automne 2021, rares sont les bâtiments, même ceux plus modernes, à avoir été mis aux normes d'isolation énergétique.

L'institution tente cependant bien de faire respecter les 19°C demandés par le gouvernement. Avec un objet: un thermomètre désormais installé dans chaque bureau de député.

"C'est une très bonne idée. Mais même avec le chauffage à fond, je dépasse rarement les 18°C. Mais j'ai la parade: je mets une doudoune fine sans manches et une grosse doudoune par-dessus et je carbure au thé bouillant toute la journée", lâche un député LR considéré comme un vieux routier du Parlement.

"Des courants d'air glaciaux"

L'administration n'hésite pas non plus à prendre des libertés avec les règles sanitaires pour tenter de réchauffer l'atmosphère. Alors que les portes de l'hémicycle étaient toujours ouvertes depuis le Covid-19 pour renouveler l'air, elles sont désormais à nouveau fermées et les grands rideaux de velours utilisés pour bien les isoler.

"Le gros problème de cette maison, ce sont les courants d'air glaciaux. En salle des Quatre Colonnes, dès qu'on ouvre la porte qui donne sur les jardins, on perd quelques degrés. On n'a jamais installé de sas, c'est très dommage", avance encore le socialiste Arthur Delaporte.

Au Palais-Bourbon, on rappelle que Yaël Braun-Pivet a lancé début août un groupe de travail sur le "développement durable" au sein de l'institution, chargé de plancher sur des mesures de "sobriété énergétique" et pour dans quelques mois sur un "plan de transition écologique".

Froid en plein vote sur les énergies renouvelables

Le bureau, la plus haute instance de l'Assemblée, a également acté mercredi 2,3 millions d'euros de crédits supplémentaires pour 2022 afin de faire face notamment aux "effets de l'inflation sur les dépenses énergétiques" de l'institution.

"On est une passoire thermique comme une autre à Paris", tance de son côté le député LR Antoine Vermorel-Marques.

La plupart des ministères sont logés à la même enseigne. Souvent installés dans d'anciens hôtels particuliers, ils sont bien souvent inchauffables convenablement en l'état.

"L'administration doit être exemplaire. On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts pour isoler leur maison et de notre côté ne pas faire les travaux nécessaires. On est quand même en train de voter un texte sur les énergies renouvelables, c'est très paradoxal", fait remarquer cet élu de la Loire.

"Malvenu de se plaindre"

Sur les bancs de Renaissance, pas question de se plaindre. Il faut dire que l'exécutif marche sur un fil. Après avoir alerté contre de possibles coupures d'électricité au début du mois de décembre, les ministres se sont fait sévèrement recadrer par Emmanuel Macron.

"Les scénarios de la peur, c’est non", a tranché le président, en déplacement en Albanie, assurant que si "chacun à notre niveau fait des efforts", "il n'y a pas de raison d'avoir un scénario qui va vers des jours plus sombres".

Autant dire que les élus de la majorité présidentielle font profil bas en la matière. "Je respecte les 19°C, donc je mets un costume d'hiver. Il serait franchement malvenu de se plaindre quand on voit ce qui se passe en Ukraine", assure ainsi le député Hadrien Ghomi.

Le parlementaire suit l'exemple d'en haut: Élisabeth Borne, Agnès Pannier-Runacher et Bruno Le Maire portent depuis le mois de septembre col roulé et doudoune.

Marie-Pierre Bourgeois