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Après d'intenses débats, le gouvernement dégaine finalement le 49.3 pour adopter le budget

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Attendue depuis le début de l'examen du projet de finances, l'exécutif a finalement dégainé cette arme constitutionnelle ce mercredi pour éviter le rejet de son budget. Le gouvernement a attendu le dernier moment pour couper court à toute accusation de passage en force.

Après huit jours de discussion au Palais-Bourbon, le gouvernement a fini par dégainer le 49.3 pour faire adopter le budget 2023. L'exécutif ne faisait pas mystère depuis des semaines de sa volonté de recourir à cette arme constitutionnelle pour faire adopter son projet de loi de finances.

"En responsabilité, nous devons donner un budget à notre pays", a fait valoir, devant les députés et dans une ambiance houleuse, Élisabeth Borne.

"Les oppositions ont toutes réaffirmé leur volonté de rejeter le texte", a encore avancé la Première ministre pour justifier son geste, mettant en avant l'impossibilité de tenir "les délais prévus" alors que "bon nombre d'amendements sont encore à examiner".

Mise en scène du dialogue

Sans majorité absolue depuis les législatives de juin dernier, Matignon avait bien tenté en septembre de mettre en scène sa main tendue aux oppositions.

Quelques jours après la rentrée, Gabriel Attal, le ministre délégué aux Comptes publics, organisait même les "dialogues de Bercy" pour permettre aux députés de travailler en amont avec le ministère de l'Économie sur le budget.

La manœuvre visait à mettre en scène "la nouvelle méthode démocratique" promise par Emmanuel Macron tout en cherchant à convaincre Les Républicains de voter le projet de loi de finances ou au moins de s'abstenir.

Dans le même temps, le gouvernement assumait qu'il passerait par le 49.3 si nécessaire pour le faire adopter in fine. En cas de risque d'un vote contre qui serait majoritaire, cela "laisserait peu d'autres choix que son utilisation", avait même averti Gabriel Attal quelques jours après la rentrée.

Le calendrier du 49.3

Mais l'organe de discussion lancé par l'exécutif ne convainc guère, pas plus que les réunions entre la Première ministre et les présidents des groupes parlementaires. De quoi pousser à passer à la vitesse supérieure pour préparer les esprits au recours au 49.3, depuis la mi-septembre.

Seule demeure une inconnue: celle du tempo. Si certains plaident pour des débats rapides à l'instar d'Aurore Bergé, la présidente des députés Renaissance, Bercy décide de jouer le jeu dans l'hémicycle. Alors que plusieurs piliers de la majorité craignent d'abord l'obstruction parlementaire, les discussions avancent et permettent à Bruno Le Maire d'affirmer sa volonté de dialogue.

Sur fond de grogne sociale, entre marche contre la vie chère de Jean-Luc Mélenchon, mobilisation syndicale, inflation record et grève dans les raffineries, le pouvoir veut aussi éviter toute accusation de passage en force.

"Si on voulait squeezer la fatigue des séances et des députés qui sont KO, il fallait aller vite. Mais là, en faisant le choix de faire durer les débats, on a bien montré qu'on a essayé de dialoguer avec tous les députés", décryptait auprès de BFMTV.com un conseiller ministériel après plusieurs jours de discussions.

La faute aux oppositions pour Le Maire

Jusqu'à ce mercredi et le recours au 49.3, alors que le vote pour le budget approchait et que l'exécutif avait officiellement prévu la fin des débats pour cette journée. Il y avait urgence alors que l'hémicycle doit plancher dès jeudi sur le projet de loi de finances de la sécurité sociale. Charge désormais à Bercy de renvoyer la responsabilité aux oppositions.

"Vous avez refusé le compromis. C’est vous qui avez choisi le 49.3 (...). Après le temps du débat, vient le temps de la décision", a déjà tancé le ministre de l'Économie dans l'hémicycle ce lundi.

Mais plus encore que le recours à ce dispositif constitutionnel qui était dans l'air depuis des semaines, c'est la méthode choisie par Bercy qui a déplu au plus haut point ces derniers jours.

Dans un texte adopté avec le 49.3, le gouvernement a toute latitude sur son contenu. Il peut ainsi enlever des amendements votés ou encore en ajouter certains qui ont été rejetés. De quoi pousser le ministère à choisir parmi les amendements adoptés ceux qu'il voulait faire figurer dans le budget finalement retenu par le gouvernement.

"On ne fait pas son marché" avec les amendements votés

Parmi ceux-ci, on trouve des amendements portés par les socialistes, comme le maintien de la TVA à 5,5% sur les masques chirurgicaux ou la hausse du plafond des tickets restaurants par le groupe LR.

Mais des amendements beaucoup plus politiques et votés dans l'hémicycle pourraient ne pas être retenus, comme celui sur la taxe sur les super-dividendes, défendue par le MoDem et votée très largement dans l'hémicycle.

"L’Assemblée nationale, c’est pas la Samaritaine. On ne fait pas son marché. (...) Les amendements sont votés que vous les trouviez bons ou mauvais", a lancé Marine Le Pen à Bruno Le Maire lundi dans l'hémicycle.

La France insoumise et le Rassemblement national devraient désormais déposer chacun des motions de censure, sans grande chance d'aboutir au renversement du gouvernement.

Marie-Pierre Bourgeois