Matignon pousse pour que les médecins puissent faire leur pub

Édouard Philippe - JOHN THYS / AFP
"Pour une consultation offerte, l'autre gratuite!" Qu'on se rassure, si Matignon a bien missionné le Conseil d'Etat pour revoir l'interdiction faite aux professionnels de santé de s'adonner à la réclame, ce genre de message publicitaire ne devrait pas voir le jour en France.
Selon l'autorité administrative, l'interdiction stricte en vigueur depuis 70 ans doit toutefois être remplacée par un droit à une communication libre avec le public, à condition qu'elle ne soit pas commerciale. Les honoraires des médecins spécialistes seront par exemple consultables sur internet, avant rendez-vous.
Encadrement professionnel
"Il ne faudrait pas, sous prétexte de suppression de l'interdiction de la publicité pour ces professions, que l'on puisse faire n'importe quoi", prévient Yves Doutriaux, président du groupe de travail du Conseil d'Etat chargé de la rédaction d'un rapport sur la question.
"La communication du professionnel de santé devra, entre autres, être loyale, honnête, ne faire état que de données confirmées et s'abstenir de citer des témoignages de tiers", préconise donc le rapport.
L'assouplissement de ces restrictions concerne les professions dotées d'un ordre professionnel, donc d'une autorité disciplinaire: médecins, chirurgiens-dentistes, infirmiers, sages-femmes, pédicures-podologues, masseurs-kinésithérapeutes et pharmaciens (déjà autorisés à faire de la publicité pour la parapharmacie). Les ordres en question seront chargés d'encadrer les pratiques "d'information et de communication".
Jurisprudence européenne
"L’encadrement strict des informations que les praticiens peuvent aujourd’hui rendre publiques ne paraît plus répondre totalement aux attentes légitimes du public, désireux de pouvoir bénéficier (...) d’une plus grande transparence", constate le rapport.
La prolifération d'informations et d'offres en ligne a poussé le Premier ministre Édouard Philippe à solliciter le Conseil d'Etat sur ce dossier. Le chef du gouvernement est également aiguillonné par une évolution de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, qui a jugé, dans un arrêt récent, "qu’une prohibition générale et absolue de la publicité relative à des prestations de soins est contraire au Traité".
La réforme envisagée pourrait également mettre fin à un paradoxe: en France, les publicités vantant les mérites de dentistes hongrois ou de cliniques bulgares sont légales.