Les "fake news" qui ont émaillé la campagne présidentielle

Emmanuel Macron en campagne à l'usine Whirlpool d'Amiens, entre les deux tours du scrutin présidentiel, le 26 avril 2017. - Eric Feferberg - AFP
Les députés doivent commencer à débattre ce jeudi de deux textes visant à lutter contre la "manipulation de l'information". Les deux propositions de loi découlent de la volonté d'Emmanuel Macron, réaffirmée en janvier dernier, de lutter contre la propagation des "fake news". La dernière campagne présidentielle a particulièrement été marquée par la diffusion de fausses nouvelles ou de rumeurs visant à déstabiliser les candidats, parfois même sur leur vie personnelle.
Si les deux propositions de loi sont adoptées, un candidat ou un parti pourra saisir un juge en référé pour faire cesser la propagation d'une fausse nouvelle. Dans un délai de 48 heures, le magistrat pourra décider de demander aux hébergeurs de contenu et fournisseurs d'accès à Internet de retirer l'intox.
Retour sur trois "fake news" de la dernière campagne présidentielle, dont l'influence aurait pu être limitée avec le nouvel arsenal législatif.
Jean-Luc Mélenchon et les "menus sans porc"
En mars 2017, le candidat de La France insoumise propose d'instaurer des menus sans viande dans les cantines scolaires. Dans une émission diffusée sur C8, il répond à un enfant qui ne trouve "pas normal" de ne pas avoir de viande alternative au porc qu'il peut "se passer" de viande tout court. Mais avant l'argument religieux, Jean-Luc Mélenchon avance alors surtout la carte écologique.
Le site "Résistance républicaine", convaincu que le candidat "hait le christianisme", ne tarde pas à publier un article intitulé "Mélenchon veut interdire le porc dans les cantines scolaires pour qu'il n'y ait plus de problèmes" et s'inquiète d'un monde où "tout le monde (serait) au beurre de cacahuètes et aux lentilles". Le détournement peut paraître anodin, mais doté d'une grande viralité, il peut être repris pour argent comptant par des lecteurs éventuels sur les réseaux sociaux.
Alain Juppé et la "grande mosquée de Bordeaux"
En novembre 2016, à quelques jours du second tour de la primaire à droite, Alain Juppé se dit victime "d'attaques absolument ignominieuses, calomniatrices".
Et d'ajouter: "On m'a d’abord prêté la construction d’une grande mosquée à Bordeaux, on m’a qualifié d’'Ali Juppé', aujourd’hui je suis 'salafiste' et 'antisémite'. Je n’ai jamais entendu Fillon s’en indigner. Cette campagne continue, elle m’a fait beaucoup de tort."
Pour ne pas s'être opposé à un projet de "centre culturel et cultuel musulman" dans sa ville en 2008, le maire de Bordeaux est affublé du surnom "Ali Juppé" par des membres de l'extrême droite depuis les années 2000.
Le surnom est même repris par l'essayiste et chroniqueur Eric Zemmour après la primaire à droite, qui déclare: "C'est Ali Juppé qui a perdu la primaire, l'homme de l'identité heureuse, d'un multiculturalisme qu’il voulait croire pacifié, des accommodements raisonnables avec l'islam".
Le "compte offshore" d'Emmanuel Macron aux Bahamas
Quelques heures avant le débat télévisé entre les deux tours de l'élection présidentielle, un internaute anonyme affirme sur le forum 4chan publier des "documents prouvant l'évasion fiscale de Macron".
"Si nous pouvons faire en sorte que hashtag #MacronCacheCash monte en France pour le débat de ce soir, cela pourrait décourager les électeurs français de voter Macron", explique-t-il alors.
La publication est largement relayée et transmise aux communautés en ligne soutenant notamment Marine Le Pen, détaille Le Monde qui a retracé l'itinéraire de la rumeur.
Jusqu'à ce que la présidente du Front national lance à son rival, pendant le débat: "Faites attention à ce que vous dites, monsieur Macron. J'espère qu’on n’apprendra rien dans ces quelques jours (…). J'espère qu’on n’apprendra pas que vous avez eu un compte offshore aux Bahamas."
Le lendemain, le vice-président du parti Louis Aliot évoque même "deux sites américains aujourd'hui qui parlent justement d'une évasion fiscale de monsieur Macron, on verra ce que c'est". "Sûrement que ça sortira dans la journée", ajoute-t-il. Marine Le Pen assure n'avoir été au courant de rien et qu'il s'agissait d'une simple question.