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Politique

Le spectre du redécoupage électoral inquiète les députés

Christian Jacob, le chef de file des députés LR, le 4 juillet 2017 à l'Assemblée nationale.

Christian Jacob, le chef de file des députés LR, le 4 juillet 2017 à l'Assemblée nationale. - CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Avec la réforme des institutions, l'exécutif souhaite réduire d'un tiers le nombre de parlementaires et introduire une dose de proportionnelle dans les législatives d'ici au scrutin de 2022. Au total, 40% des circonscriptions pourraient disparaître.

Devant le Congrès réuni à Versailles lundi prochain, Emmanuel Macron devrait notamment défendre l'épineuse réforme des institutions. Lors de son premier passage devant le Congrès, à Versailles en juillet 2017, il avait annoncé ce chantier lorsqu'il avait fixé le cap de son action pour le quinquennat. Après la réforme de la SNCF et avant celle des retraites, c'est le dossier sur lequel se concentre l'exécutif, et auquel se confronteront les députés avant la pause estivale.

Déclinée en trois volets, un projet de loi constitutionnelle, un projet de loi organique et un ordinaire, la réforme contient notamment la réduction d'un tiers du nombre des parlementaires et l'introduction d'une dose (15%) de proportionnelle. Elle implique un redécoupage électoral des circonscriptions pour les législatives de 2022, qui sera le quatrième de la Ve République. Selon le projet de loi organique, l'Assemblée nationale passera de 577 à 404 sièges, et le Sénat de 348 à 244. L'examen du projet de loi constitutionnelle débutera mardi dans l'hémicycle, au lendemain du Congrès.

"Compétition interne ridicule" entre les députés LaREM

Si les négociations sont compliquées avec le Sénat, dont le soutien est indispensable pour valider le volet constitutionnel, l'exécutif doit aussi faire face à un risque de fronde chez les députés, y compris de la majorité, inquiets d'une réforme qui intensifiera la compétition pour obtenir un siège.

Début juin, le chef de file des députés LR, Christian Jacob, dénonçait ainsi en choeur avec les socialistes une "compétition interne ridicule" dans l'hémicycle entre les élus LaREM. D'après lui, ceux-ci "déposent des amendements à tour de bras", notamment pour apparaître "plus présents que leur voisin avant le redécoupage des circonscriptions".

40% de circonscriptions en moins?

Au total, 40% des circonscriptions actuelles pourraient sauter avec la réforme de la carte électorale. "Les députés de La République en marche commencent à comprendre la réalité des choses: qu'ils vont se détester entre eux", martèle Christian Jacob, cité par Le Figaro ce mardi. Mathématiquement, les 313 élus de la majorité seront en effet les plus touchés. L'ancien ministre Alain Marleix, secrétaire d'Etat aux collectivités territoriales lors du redécoupage de 2010, affirme quant à lui n'avoir jamais vu "une opération de ce type".

"C'est demander à sa propre majorité aujourd'hui de se faire hara-kiri", estime-t-il. "C’est la première fois que des députés vont accepter de se suicider institutionnellement", s’étonnait aussi le député MoDem Patrick Mignola dans Le Monde.

"Il y a de quoi s'inquiéter"

Pour le député de l'Essonne Nicolas Dupont-Aignan, qui accueille favorablement la réduction du nombre des parlementaires mais refuse de "cautionner" la réforme, "il n'y a rien de plus difficile que de redécouper les circonscriptions à la baisse".

"Et quand on connaît la partialité d'Emmanuel Macron, il y a vraiment de quoi s'inquiéter", estime-t-il dans le quotidien.

Outre le nombre de places limitées dans le nouveau dispositif électoral, ce sont aussi les modalités du redécoupage qui inquiètent certains élus. Interrogé par Le Figaro, l'élu Nouvelle gauche David Habib propose ainsi de faire appel à des spécialiste neutres, comme des géographes ou des économistes. Fin juin, Richard Ferrand, le chef de file des députés LaREM, promettait que "les découpages à la papa" "c'est terminé, et tant mieux", grâce à l'examen de la carte par une commission "et sous contrôle du Conseil constitutionnel".

Ces députés tentés par les municipales

Quant à une possible grogne de ses élus, elle pourrait se transformer en tentation pour les municipales de 2020. "La moitié des parlementaires de mon groupe n'a jamais eu de mandat local ou national. Donc je crois qu'ils ont eu envie de donner cinq ans de leur vie à leur pays, mais ils ne sont pas configurés dans une logique de carrière politique à tout prix", déclare-t-il dans Le Figaro. Avant de concéder: "Je crois qu'il y en a une petite dizaine qui pensent aux municipales". Même lecture du côté de Pacôme Rupin. "Au sein du groupe, beaucoup ont intégré qu’ils ne feront qu’un seul mandat", affirmait dans Le Monde le vice-président du groupe LaREM à l'Assemblée. 

Charlie Vandekerkhove