BFMTV
Politique
Alerte info

Le Conseil d'État annule la dissolution des Soulèvements de la Terre

Des affiches et cartes postales vendues en soutien au collectif Les  Soulèvements de la terre, lors d'un rassemblement le 28 juin 2023 à Nantes

Des affiches et cartes postales vendues en soutien au collectif Les Soulèvements de la terre, lors d'un rassemblement le 28 juin 2023 à Nantes - Sebastien SALOM-GOMIS © 2019 AFP

Le Conseil d'État, qui avait suspendu en août dernier la dissolution demandée par Gérald Darmanin, confirme sa décision. Les Soulèvements de la Terre vont pouvoir continuer leurs actions. Leur dissolution demandé par le gouvenrement ne constitue pas "une mesure adaptée et nécessaire", a estimé la juridiction administrative.

Un sérieux revers pour Gérald Darmanin. Le Conseil d'État, qui avait suspendu la procédure de dissolution des Soulèvements de la Terre en août dernier après son annonce en Conseil des ministres en juin, a continué sur sa lancée ce jeudi 9 novembre en annulant définitivement la dissolution du collectif écologiste. Le mouvement va pouvoir poursuivre sa mobilisation.

"Aucune provocation à la violence contre les personnes ne peut être imputée aux Soulèvements de la Terre", avancent les juges dans leur décision.

De Sainte-Soline au contournement autoroutier de Rouen en passant par la future ligne Lyon-Turin, ce collectif a été très actif ces derniers mois pour dénoncer des projets d'infrastructures aux conséquences délétères sur l'environnement, au grand dam du gouvernement.

Une dissolution difficile à concrétiser

Ce mouvement, créé en janvier 2021 depuis la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, vise à développer les actions de désobéissance civile contre des projets qu'il juge dangereux en pleine accélération du réchauffement climatique.

Derrière ce collectif qui n'a pas d'existence légale, on retrouve un regroupement d'associations dont certaines sont implantées de longue date en France comme la Confédération paysanne ou Attac, d'autres plus récentes comme Extinction Rebellion on encore des fermes engagées en permaculture.

Le 28 mars, au lendemain d'une nouvelle manifestation à Sainte-Soline qui compte une quarantaine de gendarmes blessés et des manifestants dans le coma, Gérald Darmanin avait annoncé sa volonté de vouloir dissoudre "ce groupuscule" qui "appelle à l'insurrection".

Le gouvernement dénonce "les actes violents" des Soulèvements de la Terre

Le ministre de l'Intérieur peine cependant à trouver des motifs juridiques concrets. La donne change finalement après des affrontements fin juin entre des militants écologistes et les forces de l'ordre sur le chantier de la future ligne TGV Lyon-Turin, pour dénoncer son impact sur la biodiversité.

Plus de trois mois après l'annonce de la dissolution, un décret est finalement signé. Il se fonde sur le code de la sécurité intérieure et pointe un "groupement de fait" "qui provoque des manifestations armées ou des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens".

Alors que la gauche dénonce "une atteinte à la liberté d'association", Élisabeth Borne dénonce "les actes violents" qu'auraient commis les Soulèvements de la terre.

La mobilisation de figures des luttes climatiques

Cette annonce provoque dans la foulée une forte mobilisation. Plusieurs figures de la lutte pour le climat prennent ainsi position en faveur du collectif, de l'écrivain de science-fiction Alain Damasio à l'activiste canadienne Naomi Klein, en passant par le réalisateur Cyril Dion ou encore Valérie Masson-Delmotte, la coprésidente du Giec.

Le collectif décroche une première victoire en août lorsque la dissolution est suspendue par le Conseil d'État. "Ni les pièces versées au dossier, ni les échanges lors de l’audience, ne permettent de considérer que le collectif cautionne d’une quelconque façon des agissements violents envers des personnes", expliquent alors les juges dans un communiqué.

Dans la foulée, le ministère de l'Intérieur rappelle que "cette décision ne préjuge pas de la décision que le Conseil d'État prendra au fond concernant cette dissolution".

La dissolution, "pas une mesure nécessaire"

Mais les services de Gérald Darmanin ne sont pas parvenus cette fois-ci non plus à convaincre les juges. La juridiction administrative estime, certes, que Soulèvements de la Terre "se sont livrés à des provocations, à des agissements violents à l'encontre des biens".

Mais leur dissolution ne constitue pas "une mesure adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d'être portés à l'ordre public".

Une telle mesure constitue "une atteinte grave à la liberté d'association" et ne peut "être mis en œuvre que pour éviter des troubles graves à l'ordre public", avancent encore les juges.

Les Soulèvements de la terre n'ont pas cessé leurs actions ces derniers mois, en organisant notamment un "Convoi de l'eau" qui a traversé la France à la fin de l'été pour "dénoncer la privatisation des nappes phréatiques" ou encore en se mobilisant massivement mi-octobre contre la création d'un prolongement d'autoroute entre Castres et Toulouse.

Marie-Pierre Bourgeois