GRAND ANGLE - François Hollande: sa nouvelle vie après l'Élysée

"Penser au temps qui passe, et surtout au temps qui reste"; c’est avec ces mots que François Hollande décrit sa nouvelle liberté, depuis qu’il a quitté l’Élysée. L’ancien chef de l’État, qui a passé le flambeau à Emmanuel Macron il y a un an, mène désormais une vie bien différente de celle qu’il a connue durant son quinquennat.
Pendant trois mois, BFMTV a pu suivre le nouveau quotidien de François Hollande. Nouveaux loisirs, nouvelle occupation professionnelle, nouveau rapport aux médias et à son successeur: l’ancien chef de l’État a retrouvé une liberté de tous les instants… avec un humour et une spontanéité qu’il avait un peu perdus pendant ces cinq années à occuper la plus haute fonction de l’État.
"Quiétude et bonheur personnel"
La présidence, qu’il qualifie d’"exigeante", a laissé place à une certaine sérénité: "J’ai pu retrouver une liberté (…) de me déplacer, de me promener, de quiétude et de bonheur familial, personnel." En témoigne l’étreinte qu’il n'hésite pas à offrir à sa compagne, Julie Gayet, devant les caméras. Une romance révélée par Closer en janvier 2014, restée discrète jusqu’à la fin de son quinquennat, et affichée aujourd’hui; comme un symbole, pour signifier que la page de l’Élysée est bel et bien tournée.
Ce jour-là, le couple accompagne des personnes handicapées venues vivre l’expérience de la voltige dans des avions à deux places. L’ancien président se prête même au jeu; un plaisir qui lui aurait été interdit du temps de sa présidence.
Nouveau travail, nouveau bureau
À 63 ans, François Hollande travaille dans son nouveau QG, rue de Rivoli, à deux pas de l’Élysée. Six collaborateurs, un maître d’hôtel et un cuisinier lui sont attribués pendant trois ans. François Hollande touche 5000 euros de retraite comme président et 10.000 euros pour les autres postes qu’il a occupés. Il bénéficie également d’un appartement de fonction de 300 mètres carrés; C’est là-bas qu’il a rédigé Les leçons du pouvoir, paru en avril, consacré à sa période élyséenne. Une période dont il ne regrette ni "le cadre" ni "le protocole", contrairement à certains autres aspects:
"L’activité peut me manquer. La décision, quand elle concerne le plus grand nombre, peut effectivement aussi me manquer", reconnaît-il, installé à son nouveau bureau. "Je vois ce que j’aurais pu faire et dire dans certaines circonstances. Mais à un moment, il faut aussi admettre de ne plus être président. On ne l’est pas à vie."
Presque en campagne
Après avoir quitté le costume de chef de l’État, François Hollande a pris la présidence de la fondation La France s’engage. Il enchaîne les déplacements à travers le pays pour promouvoir des entreprises privées d’intérêt général. Découvertes d’associations, d’écoles, de start-ups innovantes que l'organisation soutient, ou pourrait soutenir. C’est ainsi qu’il se retrouve à goûter des substituts de viande à la farine d’insectes, immortalisé comme à chaque étape par des dizaines de smartphones alentour.
On le croirait presque en campagne. François Hollande n’est pas candidat, il n’est plus président, il s’est défini un nouveau rôle: celui d’entrepreneur social. Il prend le temps d’expliquer, d’échanger. Mais l’animal politique n’est jamais bien loin: lorsqu'il croise le maire PS de Villeurbanne lors d'un déplacement, François Hollande évoque ses anciens collègues. Sans prononcer le nom d’Emmanuel Macron, même quand il analyse la stratégie de son successeur.
Macron et Hollande, une relation toujours compliquée
Les deux hommes séparés par une trahison ont été réunis, le 28 mars dernier, pour l’hommage de la nation à Arnaud Beltrame. L’ancien président était présent, tout comme son prédécesseur Nicolas Sarkozy, aux Invalides pour saluer la mémoire du colonel de gendarmerie qui a trouvé la mort en se substituant à une otage, dans l’attaque terroriste au Super U de Trèbes, dans l'Aude. Un événement qui ravive les heures les plus sombres de son mandat, marqué notamment par les attentats de Charlie Hebdo, de l'Hyper Cacher, et du 13 novembre 2015.
C’est l’une des rares fois où Emmanuel Macron et François Hollande se sont côtoyés. Depuis la passation de pouvoir sur les marches de l’Élysée, les deux hommes se sont recroisés mais jamais reparlé:
"J’ai toujours pensé que le président élu devait l’être sans avoir besoin de recueillir l'avis de son ou ses prédécesseurs", explique François Hollande. "Comme il avait été mon collaborateur, comme il avait été mon ministre, qu’est-ce qu’on aurait pensé s’il était venu chercher mon assentiment ou mon conseil?"
Après avoir laissé deviner leurs dissensions politiques ("S'il me l’avait demandé, peut-être qu’il n’aurait pas pris certaines décisions"), François Hollande laisse la porte ouverte à d’éventuelles retrouvailles: "Il faut toujours que le dialogue soit possible, ça ne me pose aucune difficulté, mais il faut qu’il soit discret s’il doit l’être, et franc parce que c’est nécessaire."
"Injustice", "ingratitude", "amnésie"
Après avoir connu l’amour puis le désamour des Français, celui dont le quinquennat fait l’objet de nombreuses contestations peut compter sur certains de ses alliés politiques, comme Bernard Cazeneuve. Son ancien Premier ministre, en pleine sortie au théâtre avec l’ancien président et leurs compagnes respectives, défend ce bilan:
"Si François Hollande n’avait pas conduit l’action qu’il a conduite pendant le quinquennat, les résultats sur la croissance, l’investissement des entreprises, ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui", estime-t-il. "Et je pense que ses amis ont le devoir de le dire puisque les autres ne le disent pas."
Et de laisser échapper une pointe d’amertume, quant à l’opinion générale concernant le travail de l’ancien président: "Je pense qu’il y a beaucoup d’injustice, une forme d’ingratitude, et pour certains une certaine forme d’amnésie."
François Hollande, lui, veut croire à des lendemains meilleurs et à une forme de revanche sur Emmanuel Macron, qu’il gagnera peut-être avec le temps: "Il y a des comparaisons qui se font, c’est souvent comme ça qu’on arrive à comprendre le passé par rapport au présent, et peut-être pouvoir éclairer l’avenir aussi", estime-t-il.