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Sarah El Haïry salue la création d'une brigade loup et fâche les écologistes

Sarah El Haïry à l'Élysée le 20 juillet 2023

Sarah El Haïry à l'Élysée le 20 juillet 2023 - Bertrand GUAY / AFP

La nouvelle secrétaire d'État à la biodiversité s'est réjoui de l'arrivée d'une brigade loup dans l'Averyon, une promesse d'Emmanuel Macron. Ce dispositif qui permet d'utiliser des "tirs de défense" contre les canidés et donc de les tuer suscite la colère des écologistes. "On se doit de concilier l'activité humaine et la présence du loup", défend son cabinet.

Après les passes d'armes autour du Service civique universel, place à celles autour des animaux sauvages. Sarah El Haïry, fraîchement nommée à la Biodiversité lors du dernier remaniement, a salué "la mise en place de la deuxième brigade loup aujourd’hui à Rodez". De quoi faire réagir sur les bancs de la gauche.

"Commencer la prise de fonction biodiversité par tuer les loups", avance ainsi la députée écologiste Sandrine Rousseau.

Une patrouille et ses "tirs de défense renforcée"

Même son de cloche pour certaines figures de défense de l'environnement à l'instar de Mathieu Orphelin, ex-président de la ligue de protection des oiseaux. "Tuer plus de loups est contre-productif car détruisant les meutes et l'effet d'apprentissage", a fait savoir l'ancien parlementaire écologiste, un temps Renaissance.

Macron veut "réguler" le nombre de loups de manière "pragmatique"

Ces brigades du loup, qui s'appellent en réalité "brigade grands prédateurs terrestres", était une promesse d'Emmanuel Macron à l'été 2022. Interpellé par des éleveurs de mouton lors d'un déplacement dans les Pyrénées, le chef de l'État avait longuement discuté de leurs difficultés, avant de leur annoncer la création d'une brigade, opérationnel pour l'été 2023.

Cette sortie n'avait rien d'une surprise: le président avait déjà expliqué vouloir "réguler" de manière "pragmatique" le nombre de loups lors du salon de l'agriculture en 2019.

Deux brigades sillonnent désormais les territoires concernés en étant basées à Gap et à Rodez. Très concrètement, elle interviennent auprès des éleveurs qui ont subi des attaques répétées, et patrouillent dans les alpages où elle sont habilitées à intervenir. Elles peuvent utiliser des tirs de "défense renforcée", pouvant donc mortellement toucher un loup.

Le nombre de loups a fortement augmenté ces dernières années. Ils sont passés de 430 en 2017 à 906 en 2022. Revers de la médaille: le nombre d'animaux tués. Le ministère de la Transition écologique avance le chiffre de "1400 victimes indemnisables" (des animaux pour lesquels les assurances des éleveurs prennent en charge la mort NDLR). De quoi susciter leur colère.

"Pour que le loup ait peur, il faut en tuer beaucoup"

"Le loup, il faut qu’il ait peur et pour qu’il ait peur, il faut en tuer beaucoup", a résumé le conseiller politique de la Fédération nationale des chasseurs, Thierry Coste, et proche d'Emmanuel Macron dans une vidéo sur Facebook.

Les associations environnementales demandent, elles, l'usage de "tirs d'effarouchement" au lieu de tirs possiblement mortels contre les loups. Ces tirs faits sans balle létale et sans viser l'animal cherchent à contraindre le loup à aller chasser sur un autre territoire.

"Le loup qui a subi un tel tir établit vraisemblablement un lien entre celui-ci et le troupeau convoité, et mémorisera le territoire ainsi protégé en l'évitant à l'avenir", précise une tribune commune regroupant plusieurs associations de défense des animaux.

La ministre veut "concilier l'activité humaine et la présence du loup"

Il faut dire que le loup est classé comme "vulnérable" sur la liste de l'Union internationale pour la conservation de la nature.

Du côté du cabinet de la ministre, on assume la démarche.

"On se doit de concilier l'activité humaine et la présence du loup. On veut répondre à la perte économique pour un éleveur tout en tenant compte de la sauvegarde du loup", précise son entourage auprès de BFMV.com

Sarah El Haïry a d'ailleurs fait les frais d'une précédente polémique. À peine nommée, des photos de son rendez-vous avec la fédération nationale de la chasse de Loire-Atlantique, sa circonscription d'élection, ont circulé sur les réseaux sociaux. C'est Sarah El Haïry qui les a elle-même mises en ligne en avril dernier.

La secrétaire d'État avait alors salué le travail de ces "passionnés", qui "préservent et protègent la nature sans "cesser d'évoluer pour apporter des solutions aux enjeux de biodiversité".

De quoi agacer fortement le député écologiste Aymeric Caron qui l'a accusé de ne "rien connaître" aux enjeux de son ministère tout en "encensant les chasseurs".

"Notre ligne directrice est de parler à tout le monde, des chasseurs aux défenseurs de l'environnement. Notre but est de mettre tous les points de vue autour d'une table pour se parler", défend le cabinet de Sarah El Haïry.

Sa prédécesseure Bérangère Couillard avait présenté en janvier dernier un plan chasse. Si l'idée d'instaurer une journée sans chasse avait été écartée, le gouvernement avait annoncé un meilleur encadrement de la pratique, en l'interdisant sous l'emprise de l'alcool.

Marie-Pierre Bourgeois