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Les attaques de Valls contre le FN: une stratégie payante?

Manuel Valls

Manuel Valls - KENZO TRIBOUILLARD - AFP

Très impliqué dans la campagne des départementales, le Premier ministre Manuel Valls ne cesse de sortir la carte du péril Front national. Une stratégie qui doit permette de mobiliser l'électorat socialiste afin de minimiser une défaite annoncée mais aussi de s'imposer comme un leader volontaire de la gauche.

Si l’ambition de Manuel Valls était de provoquer des réactions chez les électeurs, le résultat est atteint... chez les politiques. En déclarant dimanche qu’il "assumait de stigmatiser Marine Le Pen et le Front national" à deux semaines du premier tour des élections départementales, le Premier ministre a (encore) attaqué frontalement le Front. "J’ai peur pour mon pays qu’il se fracasse contre le FN", a-t-il poursuivi, jugeant que le parti de Marine Le Pen est en mesure de remporter l’élection présidentielle en 2017.

"On observe cette nouveauté dans le vocabulaire des responsables politiques de gauche comme de droite, pose le politologue Jean-Yves Camus, interrogé par BFMTV. On dit enfin que le FN n’est plus une force marginale, vouée à rester un spectateur de l’alternance". La semaine passée François Hollande avait aussi déclaré "vouloir arracher les électeurs au vote FN". Mais agiter la menace FN en étendard s’avère-t-il payant pour Manuel Valls?

"Une stratégie faute de mieux" 

"La gauche court un vrai risque de séisme électoral, notamment à cause de ses divisions, lors des départementales, assure Yves-Marie Cann de l'institut CSA. Dramatiser la question du FN, c'est faire appel aux valeurs de gauche pour mobiliser un électorat PS" tenté par l'abstention et qui compte moins se rendre aux urnes (UMP 56%, FN 52% et PS 44%) les 22 et 29 mars prochain que celui du FN ou de l'UMP.

Surtout, admet le sondeur, "c'est une stratégie faute de mieux car le bilan politique n'est pas à la hauteur des attentes et la popularité de l'exécutif baisse à nouveau après l'embellie de janvier. Quant à la baisse légère du chômage aucun effet notable existe. La lutte contre le FN permet de rattraper une partie de l'électorat de François Hollande en 2012". 

"Chaque sujet est rattaché au FN"

Pour l’UMP, par la voix de Brice Hortefeux, Manuel Valls est "l’agent électoral du Front national. (…) Le rôle d’un Premier ministre n’est pas d’avoir peur mais d’obtenir des résultats. Et ce sont les échecs de la majorité qui dopent le FN". Sur BFMTV, Xavier Bertrand tance également les "formules chocs" à défaut de "mesures pour l’emploi" quand le patron du MoDem, François Bayrou, rejette un "vocabulaire de la peur" qui "ne devrait pas être celui des gouvernants".

"Il faut arrêter de faire peur aux gens, c’est irresponsable. Le principal carburant au Front national c’est Manuel Valls qui rattache tout le sujet au Front national, juge pour sa part le politologue Thomas Guénolé sur BFMTV.

Incarner les valeurs de la gauche

Toutefois, à titre personnel, Manuel Valls peut utiliser cet épisode pour "s'affirmer comme le leader de la majorité" et "répondre aux procès en illégitimité" de la gauche de la gauche, pointe Yves-Marie Cann. 

Avec des projections à 29% des voix au soir du premier tour des départementales, le Front national pourrait sortir en tête le 22 mars, selon les résultats du sondage CSA pour BFMTV. Un score inédit qui permettrait au camp de Marine Le Pen de faire mieux qu'aux élections européennes de 2014. 

Samuel Auffray