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Gouvernement

Censure de Barnier: le gouvernement estime que le RN et la gauche risquent "d'envoyer la France dans le mur"

Maud Bregeon à l'Assemblée nationale le 26 novembre 2024

Maud Bregeon à l'Assemblée nationale le 26 novembre 2024 - Bertrand GUAY / AFP

En cas de motion de censure adoptée à l'encontre du Premier ministre, la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon juge que le Rassemblement national (RN) et la gauche devront "assumer la responsabilité d'un affaiblissement durable de la France".

Faire monter encore un peu la pression. Après l'interview de Michel Barnier ce mardi 26 novembre sur TF1, la porte-parole du gouvernement fait le service après-vente pour éviter à tout prix une motion de censure qui renverserait le Premier ministre. Avec une stratégie: renvoyer la responsabilité dans le camp des oppositions.

"Ceux qui prendraient le risque d'envoyer le pays dans le mur, devront assumer la responsabilité d'un affaiblissement durable de la France", tance Maud Bregeon ce mercredi sur France info.

"S'enfoncer dans le déficit"

Depuis plusieurs jours, l'exécutif tente de sauver politiquement le chef du gouvernement. Et pour cause: Michel Barnier a toutes les chances d'être renversé autour du 20 décembre à l'Assemblée nationale.

Le Premier ministre a redit au journal de 20h qu'il allait "assurément" avoir recours au 49.3 pour faire adopter le budget afin de tenter de réduire le lourd déficit du pays. Son activation permettra aux oppositions de déposer une motion de censure.

Pour y parvenir, elles doivent récolter au moins 289 voix. Si les voix de toute la gauche et du RN s'additionnent, elles comptent 320 députés, largement assez donc pour faire tomber Michel Barnier.

Si son gouvernement tombe, "il y aura une tempête probablement assez grave et des turbulences graves sur les marchés financiers", a encore mis en garde Michel Barnier.

"On a le choix entre relever la tête, accepter un budget de redressement (...) ou s'enfoncer dans un déficit dont on sait où il mènera, vers un affaiblissement durable sur le plan économique", a soutenu de son côté Maud Bregeon ce mercredi matin.

Des outils pour avoir un budget même sans Premier ministre

Ces mises en garde seront-elles suffisantes pour convaincre le RN et une partie de la gauche, notamment les socialistes de ne pas soutenir la motion de censure? Rien n'est moins sûr.

D'un point de vue constitutionnel et législatif, les outils existent pour avoir un budget, même avec un gouvernement renversé que ce soit par le recours d'un projet de loi spécial ou encore par un recours aux ordonnances.

Première option : l'article 45 de la loi organique relative aux lois de finances qui permet de s'appuyer sur un "projet de loi spéciale" pour "continuer à percevoir les impôts existants" jusqu'au vote d'un budget en bonne et due forme l'an prochain.

Seconde option: le recours aux ordonnances que permet la Constitution si les débats se prolongent au-delà de 70 jours, comme le fixe l'article 47. Cette année, la fin de ce délai constitutionnel interviendra le 21 décembre à minuit.

Mais d'un point de vue politique et financier, la donne pourrait se compliquer. Les investisseurs sur les marchés ont montré ces derniers jours des signes de nervosité.

Une dette française toujours attractive

L'écart entre les taux d'intérêt de l'emprunt de référence sur dix ans entre la France et l'Allemagne a atteint son plus haut niveau depuis 2012 - un signe qui pourrait laisser montrer que Paris aurait peut-être à terme des difficultés à faire acheter sa dette par les marchés.

Le constat reste cependant à relativiser: en 2012, l'Allemagne empruntait à des taux d'intérêt parmi les plus bas de son histoire, augmentant mécaniquement la différence avec la France.

Quant à "la qualité de sa dette", autrement dit les chances pour les investisseurs d'être toujours remboursé, elle reste parmi les meilleures des pays évaluées, malgré une rétrogradation en juillet dernier par l'agence Standard&Poor's alors que la France était en pleine crise politique.

Marie-Pierre Bourgeois