Le plan de l'Elysée pour contrer Juppé
Face à la menace Alain Juppé, le camp Hollande contre-attaque. Dans l'entourage du chef de l'Etat, l'adversaire visé en priorité à droite a longtemps été Nicolas Sarkozy. Désormais, c'est Alain Juppé, favori des sondages pour la présidentielle, qui fait peur. Et pour tenter d'endiguer la menace, l'entourage de François Hollande est en train de mettre en place un argumentaire pour mettre à mal celui qui est désormais perçu comme son premier rival.
"Cher électeur de gauche"
Le maire de Bordeaux est en effet la cible d'une lettre émanant d'un proche du président de la République, un fidèle déjà impliqué dans la campagne de 2012, qui vise à livrer un argumentaire aux élus locaux et régionaux pour dissuader les sympathisants de gauche d'aller voter pour lui à la primaire de la droite et du centre, fin novembre.
"Cher électeur de gauche", débute ce courrier intitulé "Lettre à un électeur de gauche qui envisage de voter Juppé à la primaire de la droite". "Tu souhaites la victoire de la gauche en 2017. Tu la souhaites tellement que tu es prêt à aller voter Juppé à la primaire de la droite pour éviter Sarkozy. Mais pour que la gauche gagne en 2017, il faut que le candidat de la gauche soit présent au second tour de la présidentielle", fait valoir la lettre, avant de lister une série d'arguments visant à faire changer d'avis les électeurs.
"En participant à la primaire de la droite, tu valideras un candidat de droite qui appliquera un programme autoritaire et inégalitaire", (...) "en allant voter aux primaires de la droite, tu renforces le pronostic des sondages qui ne voient qu'un duel entre la droite et l'extrême droite en 2017", met en garde le courrier, avant d'avertir le lecteur: "ce n'est pas en se résignant à une hypothétique défaite de la gauche et en faisant tout pour éviter Sarkozy que tu aideras la gauche à se préparer à l'élection présidentielle".
Juppé attaqué sur son passé politique et ses ennuis judiciaires
Le courrier s'attache ensuite à décrédibiliser le choix d'Alain Juppé par l'électeur de gauche. L'ancien ministre est notamment attaqué sur son passé politique:
"Lui Président, ce n'est pas la modernité, ni le renouvellement, c'est une très longue carrière ministérielle, commencée en 1986. Il a été Premier ministre de Jacques Chirac en 1995, il a mis la France dans la rue par sa réforme brutale des retraites".
Mais aussi sur ses déboires judiciaires. "Lui Président, ce n'est pas la République exemplaire. (...) Il a été condamné à 14 mois de prison avec sursis et 1 an d’inéligibilité pour prise illégale d'intérêt. (...) Il a été un élément clé d'un système de financement occulte d'emplois au sein du RPR", souligne ainsi le courrier.
Le programme d'Alain Juppé est également passé au crible. La lettre rappelle ainsi qu'il compte augmenter l'âge de départ à la retraire, supprimer l'ISF, et faire passer la durée du travail de 35 à 39 heures. "Electeur de gauche, ne t'y trompes pas. L'élégance des mots ne doit pas cacher la violence des propos. (...) Préserve-toi, préserve ton vote pour la primaire de la gauche. C'est là qu'il sera utile et non pas perdu au milieu des voix de la droite", conclut le texte.
Dissuader les électeurs de gauche
Une attaque en règle, qui démontre que l'Elysée redoute un vote Juppé par des électeurs de gauche, lors de la primaire de la droite et du centre. "On voit bien qu'il y a une curiosité et une tentation. Le fait qu'il y ait eu près de 6 millions de téléspectateurs qui ont suivi le premier débat de la primaire montre bien que l'intérêt pour cette primaire va très au-delà de la droite", fait remarquer au micro de BFMTV Jérôme Sainte-Marie, politologue et président de l'institut Polling Vox.
Parmi les électeurs se disant certains d’aller voter les 20 et 27 novembre, 10 à 16% seraient de gauche. A ceux-là, le courrier prononce cet avertissement: