“Dégagez-les”, quand Le Pen imite Mélenchon

“Dégagez-les! Ils vous ont suffisamment fait souffrir!”. Ces quelques mots prononcés lors du meeting de la candidate frontiste à Nice ce jeudi ne sont pas sans rappeler ceux de Jean-Luc Mélenchon.
> Le "dégagisme", néologisme créé par Mélenchon
“Il y en a marre, assez, vous vous êtes assez fichus de nous”, s’exclamait le candidat de "La France insoumise” le 19 avril. Outre les mots, les gestes y sont aussi: le bras assuré, les doigts pointés face à elle, toute son attitude fait écho à celle de Jean-Luc Mélenchon.
Cette posture nouvellement adoptée par Marine Le Pen, c’est celle du “dégagisme”. Une notion anti-système insufflée par Jean-Luc Mélenchon lors de sa campagne, et inspirée de la révolution tunisienne de 2011. Une pensée qui consiste à vouloir évincer les hommes politiques en place.
> Le rejet de l'oligarchie, marque de fabrique de la France insoumise
Marine Le Pen emploie ce néologisme pour se poser en candidate du peuple, qui fait face aux puissants de la République, dont ferait partie son adversaire à la présidence Emmanuel Macron.
“C’est un régime oligarchique où domine une caste au service des puissances d’argent, une société où la seule loi est la loi du plus fort. [...] Nous sommes David contre Goliath, c'est avec notre amour pour notre pays, que nous terrasserons la soumission, l'abandon, la capitulation, la trahison que l'on cherche à imposer à notre peuple", s’est-elle écriée.
Un refrain sur l’opposition entre le peuple et les puissants qui est la marque des discours de Jean-Luc Mélenchon. En meeting à Lille le 12 avril, il avançait que “les puissants vous parlent de haut avec arrogance”, qu’ils “se fichent des gens qui meurent de maladie professionnelle”, “détruisent le système universitaire français”, ou encore qu’ils ont “une indifférence en béton armé face à la nature.” Avant d’appeler les électeurs à se rebeller : “Vous allez régler vos comptes avec des bulletins de vote. […] Allez les gens, secouez-vous un bon coup!”.
Une attaque aux “puissants” qu’il a émise tout au long de sa campagne, comme par exemple le 25 mars à Paris.
“La décadence des moeurs des puissants, elle a une origine: c’est le mépris et l’ignorance de la condition de vie du quotidien des gens. [...] On a besoin que revienne dans le pays un souffle d’intérêt social, pour les gens qui vivent”, avait-il déclaré lors du blocage d'un restaurant de la chaîne McDonald's.
> Opération séduction en marche
La candidate frontiste joue désormais la carte de la protection des “plus faibles” pour rallier les électeurs de Jean-Luc Mélenchon, qui avait réuni 19,60% des voix lors du premier tour et n'a jusqu'à présent donné aucune consigne de vote pour le second. Certains se montrent sensibles à cet argument.
"Au début je pensais m’abstenir, quel que soit le candidat, si Jean-Luc Mélenchon n’était pas au deuxième tour. Finalement je vais voter contre: contre quelqu’un qui risquerait de casser encore les plus faibles. Ces gens plus modestes qui travaillent et qui malheureusement, n’arrivent pas à joindre les deux bouts", déclarait Nathalie, une électrice ”‘insoumise” au micro des Grandes Gueules mardi.
Selon un sondage de l'institut Elabe pour BFMTV et L'Express publié ce mardi, 31% des électeurs du candidat de "La France insoumise" seraient encore indécis. Une importante réserve de voix que Marine Le Pen espère bien attirer dans ses filets.