Au fait, à quoi sert un président de la République française?

L'Elysée - AFP
Les Français sont de nouveau appelés aux urnes ce dimanche 24 avril pour élire le président de la République. Chef de l'exécutif, il est à la tête des institutions selon les règles de la Constitution de la Ve République. S'il a des pouvoirs connus de tous, comme le rôle de chef des Armées, il a aussi des titres plus confidentiels.
En France, le pouvoir exécutif est en théorie partagé entre le président de la République, et le Premier ministre, chef du gouvernement. Mais en pratique, lorsque la majorité parlementaire est acquise au chef de l'Etat, c'est lui qui concentre les pouvoirs exécutifs.
• Quels sont les pouvoirs propres au président de la République?
Chef de l’exécutif
Le président de la République nomme le Premier ministre et peut mettre un terme à ses fonctions. Ensemble, ils définissent la composition du gouvernement. Le chef de l'Etat préside aussi le Conseil des ministres, qui réunit chaque semaine l’ensemble des membres du gouvernement pour discuter des projets de lois, ordonnances et décrets. Dans les faits, il est courant que le Conseil des ministres abrite aussi des discussions sur l'actualité politique et les réponses du gouvernement.
Chef des armées
Le président de la République est garant de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire. C’est donc lui qui décide de l’emploi des forces et de l’utilisation de l’arme nucléaire. Il préside les conseils et comités supérieurs de la Défense nationale. En revanche, c’est le gouvernement qui "détermine et conduit la politique de la Nation" et "dispose de la force armée".
Garantir l’autorité judiciaire
Le premier alinéa de l’article 64 de la Constitution énonce que "le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire". Dans cette fonction, il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature. Il a également le pouvoir de nommer les magistrats professionnels.
Dissoudre l’Assemblée nationale
La dissolution de l’Assemblée nationale permet de résoudre une crise ou un blocage institutionnel. Il s’agit d’un moyen de solliciter les électeurs pour désigner une nouvelle majorité. Le président de la République doit consulter le Premier ministre et les présidents des deux assemblées, mais n’a pas l’obligation de suivre leurs avis. De nouvelles élections législatives ont lieu 20 à 40 jours après la dissolution, comme ça a été le cas en 1997, lors du septennat de Jacques Chirac, alors qu'Alain Juppé était à Matignon.
Mettre en œuvre des pouvoirs exceptionnels
Cette disposition intervient en situation de crise. Deux conditions doivent être réunies pour appliquer l’article 16 de la Constitution: une "menace grave et immédiate" doit peser sur "les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux" et le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels doit être interrompu. En cas d’application, le Président dispose de pouvoirs exceptionnels. Ses décisions sont soumises pour avis au Conseil constitutionnel. L’article 16 n’a été appliqué qu’une fois, en 1961, à la suite de la tentative de putsch militaire à Alger.
Communiquer par messages avec le Parlement
Le président de la République n'a pas le droit d'entrer à l'Assemblée nationale ou au Sénat pour s'adresser aux parlementaires. Toutefois, il peut les réunir en congrès, à Versailles, pour leur adresser un message. Ou faire lire un message présidentiel par un représentant, comme le Premier ministre. Cela arrive généralement lors de la prise de fonction du président de la République, du début d’une nouvelle législature après des élections législatives, du renouvellement de l’Assemblée nationale ou de circonstances exceptionnelles.
Avoir recours au référendum
Le président de la République peut organiser un référendum pour deux raisons. La plus courante est l’adoption d’une loi. Il a été utilisé neuf fois sous les Ve République. Dans un autre cas de figure, le référendum peut servir à réviser la Constitution.
Signer des ordonnances
Une ordonnance est une mesure que peut prendre le gouvernement dans un domaine qui relève normalement de la loi, afin de mettre en œuvre son programme. Le Parlement doit voter une loi de réhabilitation pour fixer les domaines et la durée de l’ordonnance. C’est le président de la République qui se charge de la signer.
Promulguer les lois
Une fois le texte de loi définitivement voté par le Parlement, c’est au président de la République de promulguer la loi dans les 15 jours qui suivent. Il ne peut pas refuser cette promulgation, qui prend la forme d’un décret, contresigné par le Premier ministre et les ministres chargés de faire appliquer la loi.
Incarner l’autorité de l’Etat
Le président de la République assure le "fonctionnement des pouvoirs publics et la continuité de l’Etat". C'est l'essence même du pouvoir exécutif: par son arbitrage, il veille également au respect de la Constitution et dispose d’un pouvoir d’interprétation. Il nomme trois des neuf membres du Conseil constitutionnel et a un droit de saisine de cette institution.
• Quels pouvoirs sont partagés avec le Premier ministre ou le gouvernement?
Nommer les ministres
Sur proposition du Premier ministre, le chef de l’Etat désigne et révoque les ministres. En période de cohabitation, il peut refuser de nommer certaines personnes.
Nommer certains postes civils et militaires de l’Etat
Sont nommés par le président de la République, en Conseil de ministres: les préfets, les conseillers d’Etat, les ambassadeurs, le grand chancelier de la Légion d’honneur, les recteurs d’académie, les directeurs d’administration centrale, les magistrats de l’ordre judiciaire, les professeurs de l’enseignement supérieur ou encore les officiers des armées de terre, de mer et de l’air et de la gendarmerie.
Gracier
Gracier un condamné consiste à le dispenser d’effectuer tout ou partie de sa peine. Le président de la République dispose de ce droit, mais le décret doit être contresigné par le Premier ministre et le ministre de la Justice. Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, il n’est plus possible d’accorder une grâce collective, elle doit être individuelle.
• Quels sont les autres titres du président de la République?
Coprince d’Andorre
Les coprinces de la république d’Andorre sont l’Evêque d’Urgell (en Catalogne espagnole) et le président de la République française. Leur rôle est symbolique mais ils disposent de certaines compétences comme le droit de grâce ou la nomination des membres du Conseil Supérieur de la Justice et du Tribunal Constitutionnel.
Chanoine honoraire de Saint-Jean de Latran
Ce titre honorifique remonte à la royauté. Tous les rois de France puis chefs d’Etat sont chanoine honoraire depuis le XVIIe siècle. Les chanoines réguliers de Latran sont une congrégation de membres du clergé catholique, liée aujourd’hui à la basilique Saint-Jean de Latran, à Rome. Ce titre ne donne aucun pouvoir au président français, ni religieux ni autre. Cela permet toutefois de renforcer les liens avec le Vatican.
Chanoine d’honneur de Saint-Jean de Maurienne (Savoie)
Ce titre a été exigé par François 1er lors de l’invasion de la Savoie en 1536. Il est simplement honorifique.
Proto-chanoine de la cathédrale d’Embrun (Hautes-Alpes)
Ce titre a été donné pour la première fois à Louis XIII et le général de Gaulle a été le dernier à le réclamer. Il est également honorifique.
Protecteur du Domaine national de Chambord
Ce domaine situé dans le Loir-et-Cher et sur lequel se trouve un château est placé "sous la Haute protection" du président de la République et sous la tutelle des ministres chargés de l’agriculture, de la culture et de l’environnement.
Protecteur de l’Académie française
Le cardinal de Richelieu a été le premier "chef et protecteur" de l’Académie française, une institution dédiée à la langue française. Le chef de l’Etat a le pouvoir d’approuver ou non l’élection d’un membre.