Comment le gouvernement veut amadouer les maires des petites communes

Edouard Philippe arrivant à Eppe-Sauvage. - FRANCOIS LO PRESTI / AFP
Le Premier ministre a choisi son auditoire. Ce vendredi, c'est devant le congrès de l'association des maires ruraux de France, l'AMRF, réuni à Eppe-Sauvage, dans le Nord, qu'il se présente avec son plan ruralité. C'est cette même AMRF qui le 16 décembre dernier 2018, avant même que le président de la République n'envoie sa lettre aux Français, et bien avant qu'il n'initie sa tournée du débat national, avait diffusé un "appel au Peuple français". Car au sommet de l'Etat, à l'évidence, l'heure, à la fois post-émergence des gilets jaunes et pré-municipales, est à l'établissement d'un lien avec ces petites communes dont les habitants ont souvent le sentiment d'être laissés pour compte par les pouvoirs publics.
Un rapport remis en juillet
La feuille de route que le chef du gouvernement dévoile ce vendredi est tirée d'un rapport remis en juillet dernier à Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires, au terme d'un travail de trois mois mené par Daniel Labaronne, député La République en marche élu en Indre-et-Loire, Patrice Joly, sénateur socialiste de la Nièvre, Dominique Dhumeaux,maire de Fercé-sur-Sarthe, Cécile Vorey, maire de Vorey en Haute-Loire, et Pierre Jarlier, maire de Saint-Flour dans le Cantal.
La veille, ce jeudi, Edouard Philippe a, sans trop en dire, tenté d'évacuer l'une des craintes des élus. A Uzès, dans le Gard, face à l'association des petites villes de France, l'APVF, il a assuré que la suppression de la taxe d'habitation ne pèserait pas sur les communes.
Promesses
Mais pour lier contact avec les maires, il faudra surtout ne pas venir les mains vides. Le Figaro a détaillé, ce vendredi, ce qu'on pourra trouver dans la besace, nantie de 173 propositions, d'Edouard Philippe. Il n'y aura pas que du neuf: les projets de loi déjà lancés, les rappels, les mesures adoptées mais pas encore appliquées, se coudoient, tout en jouxtant quelques nouvelles propositions. Les domaines couverts sont vastes, tant les besoins des villes rurales sont grands: retrouver un meilleur maillage des services publics, lutter contre les déserts médicaux, améliorer la connexion de ces territoires à internet et à la téléphonie, et conjuguer un chapitre écologique aux thèmes précédents. Dans le rapport rédigé par les parlementaires et les élus, on notait ainsi l'idée d'une mise en place "d'un fonds de solidarité environnementale (...) pour rémunérer les services environnementaux rendus par les territoires vertueux".
"J’ai la conviction, et sûrement la crise des gilets jaunes l’a renforcée, qu’il faut aussi regarder les petites villes, celles qui font centralité dans les zones rurales, où elles sont essentielles pour irriguer la vie sociale avec un minimum de services, de commerces", a posé Jacqueline Gourault auprès de L'Union.
Parmi les mesures attendues, on note notamment le permis à un euro par jour dans les territoires ruraux, le recrutement de médecins dans les zones frappées de plein fouet par une sous-densité en la matière. Enfin, on évoque la possible de créer de nouvelles licences IV afin de ne pas voir mourir les cafés, les brasseries, les restaurants.
"Changement de pied"?
Ces preuves d'amour parlent-elles au cœur des intéressés? Après tout, c'est le but de la manœuvre. Oui, à en juger par les mots du député encarté au PS Christophe Bouillon, élu en Seine-maritime, relayés ici par Le Point: "Il y a un vrai changement de pied, que je crois sincère, qui est de considérer qu’il y a des solutions dans les petites villes et de voir les élus comme des facilitateurs".
D'après une confidence d'un député LaRem en vue à BFMTV.com, le parti présidentiel n'a jamais eu vocation à faire "une razzia sur les villes" à l'occasion des municipales. Cependant, le scrutin a des airs de juge de paix pour le mouvement en raison de sa jeunesse mais aussi de son image, très urbaine, et des reproches faits au pouvoir qu'elle soutient: un élitisme qui se marie mal avec la vie publique locale.