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Police-Justice

Vendanges: deux enquêtes ouvertes pour "traite d'êtres humains" en Champagne

Des vignes en Champagne, (photo d'illustration)

Des vignes en Champagne, (photo d'illustration) - François Nascimbeni

Le parquet de Châlons-en-Champagne a ouvert deux enquêtes après la fermeture par la préfecture de la Marne d'hébergements collectifs de vendangeurs parce que jugés "insalubres".

Des conditions de travail qui posent question. "Deux enquêtes pour traite d'êtres humains" ont été ouvertes dans le cadre des vendanges en Champagne, a annoncé ce vendredi le parquet de Châlons-en-Champagne, en Champagne. Cette décision intervient après la fermeture par la préfecture de la Marne d'hébergements collectifs de vendangeurs à Nesle-le-Repons, dans la Marne, jugés "insalubres" et "indignes".

La vice-procureure de Châlons-en-Champagne Céline Fassey a précisé à l'AFP que l'ouverture de ces enquêtes vise "plusieurs sociétés", sans davantage de précisions sur les faits présumés ni les entreprises visées.

Elles n'ont en revanche "aucun lien avec les décès des vendangeurs", a-t-elle indiqué, alors que quatre vendangeurs sont morts en Champagne depuis début septembre.

Quatre morts en quelques jours

"Deux hommes ont trouvé la mort ces derniers jours alors qu'ils étaient aux vendanges sur notre ressort", avait indiqué le parquet de Châlons-en-Champagne dans un premier communiqué mi-septembre, mais "aucune infraction" n'avait alors été relevée.

Une femme était par ailleurs morte chez elle, après avoir fait un "malaise" quelques jours plus tôt, quand elle faisait les vendanges.

Enfin une quatrième personne, un homme de 19 ans, est morte à l'hôpital après avoir "chuté d'un enjambeur" le 8 septembre à Rilly-la-Montagne, dans la Marne. Une affaire dépendant du parquet de Reims.

L'appel à des sous-traitants "sans contrôle", selon la CGT

Le comité régional CGT avait mentionné vendredi l'ouverture d'une enquête par ce parquet, dénonçant, dans une lettre ouverte à la préfète du Grand-Est, "des méthodes intolérables concernant l'utilisation des saisonniers".

"Les donneurs d'ordre font appel à des sous-traitants en cascade sans aucun contrôle, mettant en danger la vie des saisonniers issus d'Afrique de l'Ouest", pointe le syndicat, décrivant des situations de "malnutrition" et de "santé précaire".

La préfecture de la Marne avait ordonné le 15 septembre la fermeture à Nesle-le-Repons d'hébergements jugés "indignes" et "insalubres" de saisonniers "provenant dans leur grande majorité d'Afrique de l'Ouest". Elle avait enjoint à la propriétaire, également employeur des travailleurs, de prendre à sa charge le relogement des salariés des sites concernés.

Une "omerta" dans le milieu de la vigne?

José Blanco, secrétaire général de l'intersyndicat CGT du Champagne, avait alors fustigé auprès de l'AFP "l'omerta" qui règne "dans le monde du Champagne".

"Tout le monde ferme les yeux parce que c'est le raisin le plus cher du monde", avait-il regretté.

La Confédération paysanne, syndicat agricole marqué à gauche, a pour sa part demandé vendredi un "plan de vigilance et d'amélioration des conditions de travail et de rémunération" pour les saisonniers.

Fin août, les vignerons de Champagne ont obtenu de l'État un assouplissement des règles d'hébergement des travailleurs saisonniers pendant les vendanges. Ils peuvent notamment accueillir jusqu'à dix saisonniers par chambre, contre six auparavant.

Quatre gérants de trois sociétés de prestations viticoles avaient été condamnés en septembre 2020 à des peines de six mois à trois ans de prison avec sursis, pour avoir fourni de la main d'oeuvre employée dans des conditions indignes.

Juliette Desmonceaux avec AFP