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Terrorisme

La sécurité de Charlie Hebdo présentait-elle des failles?

Le 7 janvier 2015, les frères Kouachi ont pénétré dans les locaux de Charlie Hebdo sans se voir opposer de résistance.

Le 7 janvier 2015, les frères Kouachi ont pénétré dans les locaux de Charlie Hebdo sans se voir opposer de résistance. - Anne Gelbard - AFP

Les familles de certaines victimes, notamment la femme de Franck Brinsolaro, le policier qui assurait la sécurité de Charb, mettent en cause le dispositif de sécurité mis en place autour de la rédaction du journal satirique, pourtant visé par de nombreuses menaces terroristes.

La rédaction de Charlie Hebdo était-elle suffisamment protégée? Les journalistes avaient-ils conscience du danger qui pesait sur leur vie? Un an après l'attaque des frères Kouachi qui a ensanglanté la rédaction, les proches des disparus s'interrogent. L'Inspection générale de la police nationale a lancé une enquête administrative.

Ce 7 janvier 2015, Chérif et Saïd Kouachi arrivent à bord de leur véhicule. Les deux terroristes ont pris leur temps de scander leurs revendications au milieu de la rue avant de pénétrer dans l'immeuble du 10 rue Nicolas Appert dans le XIe arrondissement parisien. Après avoir abattu, un agent d'entretien dans le hall, ils obtiennent facilement le code pour monter au deuxième étage où se tenait la conférence de rédaction et commettre leur tuerie.

Manque de finances

A aucun moment, ils ne vont rencontrer une quelconque résistance. Et pour cause: l'immeuble était peu sécurisé et les autorités avaient allégé le dispositif de surveillance des journaliste. Au moment de l'emménagement de Charlie Hebdo, six mois auparavant, la préfecture de Paris avait pourtant conseillé à la direction de renforcer sa protection.

"Quand l’audit a été fait par la préfecture de Paris, un service spécialisé des sites sensibles, car c’était un site sensible, on avait demandé à Charlie Hebdo de faire des travaux, de créer un sas, de 'bunkeriser' l’accueil, de badger les portes, toutes sortes de recommandations qui n’ont pas été suivies par manque de finances", témoigne, Maryse Wolinski, la veuve du dessinateur.

Dans le même temps, le fourgon de police stationné en permanence devant le 10 rue Nicolas Appert est remplacé par des rondes régulières des effectifs policiers. "Lorsque ce véhicule, qui se trouvait en permanence en bas de Charlie, disparaît, personne ne s’en est inquiété plus que mesure, raconte la journaliste de Charlie Hebdo, Zineb el-Rhazoui. La plupart d’entre nous a interprété ça comme une baisse de la menace."

"Il y aurait dû avoir 7 policiers"

Certaines personnes, en charge de la sécurité des membres de la rédaction, se sont tout de même inquiétées de cette légèreté. C'est le cas de Franck Brinsolaro, le policier en charge de la sécurité de l'ancien directeur de la rédaction, Charb, qui s'était confié à son épouse. "Il me disait 'on manque de moyens'", raconte Ingrid Brinsolaro, qui a décidé de porter plainte contre X

"Comment on peut se retrouver sur ce type de menace avec une protection allégée?", s'étonne-t-elle, alors que Charb était une cible annoncée des islamistes depuis 2013. Un dispositif qui étonne cet ancien commissaire au service de protection des personnalités, auquel appartenait Franck Brinsolaro. "Il y aurait dû avoir sept policiers, estime Eric Stemmelen. Ca coûte de l’argent, ça coûte des effectifs, mais on connaît les résultats."

Revoir le système

"Il y a une chose qui est certaine, c’est que les familles sont en deuil et il est tout à fait compréhensible qu’on soit dans la recherche de l’explication", estime sur BFMTV Céline Berthon, du syndicat des commissaires de la police nationale. Pour elle, il ne faut pas oublier que "les seuls responsables de la mort des journalistes et des policiers, ce sont les auteurs des faits".

Aujourd'hui, la logique est de savoir comment mieux faire pour protéger la France du terrorisme. "Il faut une réponse beaucoup plus utile, estime Gilles Sacaze, ancien membre de la DGSE. Ce n'est pas de rechercher des responsables pour condamner les uns, dédouaner les autres." Pour la représentante de la police et pour lui, il faut désormais revoir la logique de fonctionnement des services de sécurité pour faire face à ce nouveau type de combat.

J.C.