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Terrorisme

A l'université, l'insertion des handicapés sacrifiée pour lutter contre le terrorisme

Handicapés en fauteuil roulant à Nantes en 2015. (illustration)

Handicapés en fauteuil roulant à Nantes en 2015. (illustration) - JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP

Vigiles supplémentaires ou insertion des handicapés à la faculté? Face aux risques sécuritaires actuels, le gouvernement tranché.

Sont-ils une variable d'ajustement budgétaire? Face à la réaffectation de la part de budget consacrée à l'insertion des Handicapés au profit de la lutte contre le terrorisme, les associations ont la gueule de bois. Un arbitrage du gouvernement qui fait grincer des dents.

Ainsi, rappelle un article EducPros.fr (pour le site de L'Etudiant), Najat Vallaud-Belkacem a annoncé le 31 août, lors de la soirée de la Conférence des présidents d'universités (CPU) que 30 millions tirés de la contribution des universités au FIPHFP (Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique) allaient servir à "accompagner et apporter des conditions de sécurité renforcées à la rentrée 2016".

En réalité, le tout de passe-passe budgétaire est un peu plus compliqué. Comme les entreprises ou d'autres institutions, les universités sont tenues d'employer une part de travailleurs handicapés. Or, elles ne respectent pas complètement l'obligation et sont amendées. Mais par une dérogation qui prend fin cette année , les facultés ne s'acquittaient jusqu'alors que d'un tiers de la sanction pécuniaire, soit 15 millions d'euros contre un montant estimé à entre 40 et 45 millions. Les 30 millions correspondent pour la majeure partie à cette différence entre les deux montants.

Entre "soulagement" et déconvenue

Dans le monde universitaire cette réaffectation du produit des amendes (recettes non fiscales qui n'est donc pas soumise au principe de non affectation des dépenses fiscales) est plus ou moins bien perçu.

"Les universités demandaient cette mesure et l'attendaient depuis un an, rappelle dans Educ Pros Jean-Loup Salzmann, président de la CPU. C'est un vrai soulagement. Ces 30 millions sont dans nos caisses et serviront à payer les vigiles. Cela correspond à peu près à 300.000 euros par établissement." 

D'autres sont plus sceptiques sur l'opportunité de cette mesure. La critique est pour une part pragmatique, puisque selon certains présidents d'université le compte n'y toujours pas, réaffectation ou non. Pour la présidente de l'université Paris-Sud Sylvie Retailleau, sécuriser les cinq sites dont elle a la responsabilité, coûterait "800.000 euros".

La contestation est aussi éthique. Pour l'enseignant-chercheur à l'université de Nantes interrogé par Libération, le "soulagement" exprimé par le président de la CPU est condamnable à de multiples titres.

"De quel soulagement s’agit-il?", s'interroge-t-il. Et de rappeler que "prendre dans la caisse d'insertion pour les handicapés", "ne pas payer l'amende fixée par la loi", "ne pas remplir ses obligations en matière d'insertion" et enfin, "embaucher des vigiles plutôt que des personnels et des enseignants", ne devrait selon lui conduire à aucune forme de soulagement.

David Namias