Redoine Faïd, la cavale en famille

L'ADN de Rachid Faïd a été retrouvé dans un véhicule utilisé par le braqueur. - AFP
Faute de réseau et de moyens financiers, Redoine Faïd s'est-il retourné vers sa famille et son quartier? C'est ce que laissent imaginer les trois mois de cavale du braqueur multirécidiviste, une cavale qui s'est achevée ce mercredi dans un appartement de Creil, à seulement un kilomètre du lieu de son enfance. Dans cet appartement, surveillé depuis trois jours, se trouvaient également son frère aîné et deux de leurs neveux. Tous étaient sous le coup d'un mandat de recherche.
Dans l'histoire de Redoine Faïd, sa famille est centrale. Au sein d'une fratrie de dix, "l'écrivain", comme il est surnommé, est l'avant-dernier. Son premier méfait, il le commet avec l'un de ses frères en sortant d'un supermarché un caddie rempli de bonbons. Rapidement, il gagne la réputation de "terreur de Creil". Au fil des années et de ses condamnations, la dernière remontant à avril dernier, pour le braquage d'une fourgon blindé au cours duquel une policière municipale est morte, sa famille ne lui a jamais tourné le dos. Le jour de son évasion de la prison de Réau, en Seine-et-Marne, il était au parloir avec son frère Brahim, qui venait le voir régulièrement, et mis hors de cause depuis.
Son frère déjà condamné
Tout au long de cette dernière cavale, à en croire les indices laissés derrière euxn, c'est un autre membre de la fratrie qui a suivi Redoine Faïd dans ses activités de braqueur, et qui risque désormais dix ans de prison. Le 24 juillet dernier, l'ADN de Rachid Faïd a été découvert dans un véhicule retrouvé sur le parking d'un centre commercial à Sarcelles, dans le Val-d'Oise, après une course-poursuite avec les gendarmes. Dans cette voiture faussement immatriculée, des pains d'explosifs ont été retrouvés, mais aussi des produits de la vie de tous les jours, des produits sanitaires, des vêtements et des flacons de produit anti-moustiques.
Rachid Faïd, 60 ans, ancien gérant d'une entreprise de BTP, est toujours resté au contact de son frère. En 2004, il avait déjà été interpellé alors qu'il tentait de faire évader Redoine Faïd de la prison de Saint-Maur, dans l'Indre. Il avait alors été condamné à 30 mois de prison, dont la moitié avec sursis, pour trafic de voitures volées, destiné à financer l'évasion. Plus récemment, Rachid Faïd jouait les intermédiaires entre le "roi de l'évasion" et un parrain corse, Jacques Mariani, pour que ce dernier lui fournisse des armes et des explosifs afin de sortir de la prison de Réau.
Jusqu'à trois ans de prison pour les complices
"Lorsqu'on n'a pas assez d'argent nécessaire pour échapper aux radars, on accorde sa confiance à ses proches et ses proches, ce sont sa famille", analyse Thierry Colombié, spécialiste du grand banditisme. Redoine Faïd, son frère Rachid et deux de leurs neveux avaient trouvé refuge à Creil chez une femme, ancienne adjointe à la sécurité au sein de la police et désormais hôtesse en zone aéroportuaire. "Il s'enterre car il n'a pas la surface financière pour s'échapper, estime encore Thierry Colombié. Il choisit un lieu qu'il connaît, où il peut être protégé par ses proches. Soit il s'agissait d'un temps de refuge, soit un temps de préparation. Il lui fallait un endroit où il se sente en sécurité pour préparer un nouveau vol à main armée".
Pour l'heure, rien ne dit que les personnes arrêtées ce mercredi ont fait partie du commando qui a aidé Redoine Faïd à s'échapper de prison le 1er juillet dernier. "Aider quelqu'un à sortir de prison est totalement différent que de l'accueillir chez soi", rappelle Stéphane Babonneau, avocat pénaliste.
Les complices de l'évasion ayant fourni une aide matérielle ou participé à la préparation encourent jusqu'à dix ans de prison et 150.000 euros d'amende. Ceux qui ont aidé le braqueur dans sa cavale pourraient se voir infliger une peine allant jusqu'à trois ans de prison et 45.000 euros d'amende. Peut être exceptée de ces dispositions, la famille proche des auteurs ou complices d'infraction.