Lot-et-Garonne: accusée du meurtre de ses filles handicapées, une mère condamnée en appel à 14 ans de prison

Le tribunal d'Agen - Image d'illustration - Google StreetView
La mère jugée depuis le lundi 24 mars en appel à Auch pour le meurtre de ses deux filles handicapées, portées disparues depuis fin 2016 dans le Lot-et-Garonne, a été condamnée ce jeudi 27 mars à 14 années de réclusion criminelle, comme en première instance en juin dernier.
La cour d'assises du Gers a ainsi suivi les réquisitions de l'avocate générale Corinne Chateignier, qui représentait déjà le ministère public lors du premier procès à Agen.
Naïma Bel Allam, 57 ans, a déjà passé cinq ans en prison. Cette ex-comptable d'origine marocaine, qui s'est dite "innocente du crime abominable dont on (l')accuse" dans sa dernière déclaration à la barre, dispose de 10 jours pour se pourvoir en cassation.
"Elle ne le reconnaîtra jamais"
Ses deux filles, nées avec de lourdes malformations, étaient âgées de 12 et 13 ans quand elles ont été vues pour la dernière fois le 7 décembre 2016 dans l'institut spécialisé de Tonneins (Lot-et-Garonne) où elles étaient prises en charge. Des recherches menées en 2017 et 2022, dans et autour de la maison familiale, sont restées infructueuses.
"La découverte d'un corps ou de restes humains n'est pas constitutive d'un meurtre", a rappelé Corinne Chateignier jeudi matin. "Ses filles ne sont plus vivantes, en raison du passage à l'acte meurtrier de Madame Bel Allam. Elle ne le reconnaîtra jamais, car elle ne peut pas le reconnaître, s'étant auto-convaincue des nombreux scénarios qu'elle a développés depuis huit ans".
L'avocate générale a évoqué l'existence de nombreux indices, notamment l'analyse scientifique d'une tache brunâtre retrouvée sur le parquet, et "l'odeur nauséabonde de mort dans cette chambre pourtant aérée, qui avait frappé les gendarmes".
S'il a été impossible d'établir la présence de sang, la composition de la tache ayant pu être "altérée" par un nettoyage intensif, son analyse a permis d'identifier l'ADN des deux adolescentes, puisque des cellules de la peau ont été retrouvées, a précisé un expert mardi.
Elle dit avoir confié ses filles à une connaissance en 2017
"Cette tache, qui est devenue un totem", "ne constitue pas une preuve", puisque l'analyse n'a pas permis d'établir de certitude, a rétorqué jeudi l'avocat de la défense Me Jean-François Renaudie, qui estime que "cette condamnation ne permet pas de répondre aux questions qui restent en suspens dans ce dossier".
Depuis l'instruction, comme au premier procès, Naïma Bel Allam a soutenu que ses filles étaient "toujours en vie". Mercredi, lors d'une audition où elle s'est mise plusieurs fois emportée, elle a affirmé qu'elle les avait "revues physiquement" depuis qu'elle les a "confiées à une connaissance en mars 2017", sans apporter de preuve de vie.
"À qui les a-t-elles confiées et où? Sur une aire d'autoroute entre la France et l'Espagne? Au Maroc? Un autre pays européen? Elle a changé quinze fois de version, ça ne tient pas la route", a plaidé Me Virginie Belacel pour les parties civiles.
Avocate de la grand-mère et de l'oncle des fillettes, elle s'est dite "satisfaite" de la décision. "Mes clients ne sauront jamais la vérité, c'est une vérité judiciaire, mais ils vont pouvoir faire leur travail de deuil", a-t-elle ajouté.