Mort d’Agathe Hilairet: quel suivi pour les détenus une fois libérés?

À peine libéré et déjà de retour en prison. Le suspect du meurtre d'Agathe Hilairet a été mis en examen pour "meurtre suivi, accompagné ou précédé d’un autre crime, à savoir enlèvement ou séquestration" et placé en détention provisoire, ce vendredi 12 septembre.
Un nouveau passage par la case justice pour cet homme de 59 ans, déjà condamné à deux reprises à 12 et 30 ans de prison pour des faits de viols et d'agression sexuelle et inscrit au fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS), selon le parquet de Poitiers.
Le quinquagénaire avait écopé d’une première peine de 12 ans de prison en 1994 pour des faits de "viol commis sous la menace d’une arme", puis de 30 ans de réclusion lors d’un second procès pour "viol commis sous la menace d’une arme en récidive légale".
Il a été libéré en avril 2024, soit un an avant la découverte du corps de la joggeuse, à la suite d’une décision du juge d’application des peines. Sa peine avait alors été aménagée sous la forme d'un placement dans la Vienne. La possible récidive du suspect soulève ainsi la question du suivi des détenus une fois leur peine purgée.
Un suivi dans le cadre d’aménagements de peine
En France, la justice ne laisse pas les anciens condamnés totalement sans surveillance à leur sortie de prison. Un ex-détenu peut être suivi par le juge d’application des peines et par un service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP).
En cas de libération anticipée, comme ce fut le cas pour le suspect du meurtre d’Agathe Hilairet, l’accompagnement se fait dans le cadre d’un aménagement de peine. Ce dispositif permet à une personne condamnée d’exécuter tout ou partie de sa peine en dehors de la prison.
Le détenu peut par exemple bénéficier d’une détention à domicile sous surveillance électronique, d’une semi-liberté qui l’oblige à passer ses nuits en prison, ou encore d’une libération conditionnelle.
Dans ce dernier cas, il doit se soumettre à des obligations fixées par le juge, telles que répondre aux convocations, résider dans un logement déterminé ou informer le SPIP de tout déplacement supérieur à 15 jours. Il peut également lui être interdit de fréquenter certains lieux ou certaines personnes.
Un suivi en fonction de la dangerosité
Si jamais un détenu va au bout de sa peine, il peut tout de même être suivi par la justice une fois dehors dans le cadre d'une rétention de sûreté ou d'une surveillance judiciaire.
"Ces deux mesures peuvent être prononcées à l’encontre d’un ancien détenu considéré comme dangereux, car susceptible de récidiver", précise le ministère de la Justice sur son site.
La rétention de sûreté consiste à placer un criminel jugé très dangereux dans un centre de soins dès la fin de sa peine. "Le type de crimes pouvant entraîner un placement en rétention de sûreté dépend notamment de l’âge de la victime (majeure ou mineure)", indique le ministère. "Dans tous les cas, cette mesure ne peut être envisagée que si le criminel a été condamné à une peine d’au moins 15 ans de réclusion criminelle", abonde-t-il.
Quant à la surveillance judiciaire, elle peut être décidée lorsqu’une personne a été condamnée à une peine privative de liberté égale ou supérieure à sept ans, notamment en cas de récidive. "Le jugement précise les obligations auxquelles le condamné est tenu, leur durée, et fixe son lieu de résidence à compter de sa libération. Le condamné fait également l’objet de mesures d’assistance et de contrôle destinées à faciliter et vérifier sa réinsertion", rappelle le ministère.
Une "réforme nécessaire"?
Invité sur le plateau de BFMTV vendredi 12 septembre, Jean-Yves Le Borgne, avocat pénaliste au barreau de Paris, estime qu"'il est préférable" que le suspect "demeure en prison". "Lorsqu'on libère quelqu'un après 20 ans de prison (...) comment peut-on savoir qu'il va récidiver?", poursuit-il.
Même son de cloche pour l'avocat Vincent Brengarth, également invité de BFMTV, qui appelle à "générer un débat public" sur "la question de la prise en compte de la récidive" et voir si "une réforme est nécessaire" face à ce qui semble être un "dysfonctionnement" de la justice.
Faut-il durcir la loi pour une personne qui récidive? Pour Jean-Yves Le Borgne, tout est une question de mise à l'écart de l'individu. "Il existe un certain nombre d'individus qui sont définitivement inadaptés à la vie sociale, et que l'on pourrait faire en sorte, peut-être en les libérant, de ne pas avoir de contact avec la vie ordinaire", avance l'avocat. "On voit bien que ses conditions de surveillance ne servent à rien", ajoute Jean-Yves Le Borgne.
L'homme a reconnu avoir été en "contact" avec Agathe Hilairet et lui avoir donné deux coups, mais sans vouloir la tuer. Il reste présumé innocent.