Marne: une fillette et sa mère retrouvées mortes, la piste d'un infanticide suivi d'un suicide étudiée

Une mère et sa fille ont été retrouvées mortes sur un terrain près de Vitry-le-François, dans la Marne, lundi 4 avril 2022. - Capture d'écran Google Street View
S'agit-il d'un meurtre suivi d'un suicide ou d'un double meurtre? Une femme et sa fille ont été retrouvées mortes lundi, près de Vitry-le-François, dans la Marne. Les services de police ont découvert les corps alors qu'ils venaient interpeller les parents d'Anaïs, âgée de 9 ans. Ils étaient soupçonnés d'avoir enlevé leur fille, qui avait été placée en foyer par l'Aide sociale à l'enfance, le 10 février dernier.
Les équipes de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) s'approchaient de la caravane dans laquelle ont été localisés le couple et l'enfant, lorsqu'elles ont alors entendu deux coups de feu retentir à l'intérieur.
Touchées par balles, Nathalie Lerouge et sa fille n'ont pas pu être sauvées, malgré l'intervention des secours une dizaine de minutes plus tard.
Une information judiciaire ouverte contre X
Jérôme Mauvais, le père, se trouvait accroupi dans un coin de la caravane, précise ce mercredi le procureur de Reims lors d'une conférence de presse. Il n'a pas opposé de résistance face aux policiers, qui l'ont ensuite placé en garde à vue.
Après l'ouverture d'une enquête par le parquet de Châlons-en-Champagne pour des faits d'homicide sur mineur de moins de 15 ans et homicide par conjoint, le parquet de Reims s'est finalement saisi du dossier.
Le procureur de Reims, Matthieu Bourrette, annonce ce mercredi l'ouverture d'une information judiciaire contre X, des chefs d'homicide volontaire et d'homicide sur mineure de moins de 15 ans.
L'implication du père en question
Si Jérôme Mauvais a été placé en garde à vue ce mercredi pour enlèvement en bande organisée pour des faits remontant au 10 février, le procureur ajoute ne pas disposer d'assez d'éléments contre lui pour le mettre en examen dans le cadre de l'enquête pour homicide.
Deux pistes majeures sont selon lui à l'étude: celle du meurtre de la petite fille par sa mère, avant le suicide de celle-ci, et celle d'un double meurtre par le père. L'hypothèse selon laquelle Jérôme Mauvais aurait abattu Nathalie Lerouge après que celle-ci a tiré sur leur fille paraît "moins solide", déclare le procureur.
D'après les premières expertises, des résidus de poudre ont été retrouvées en quantité importante sur les mains de la mère, moins sur les mains de son époux. Ce qui pourrait orienter les enquêteurs à explorer davantage la piste du meurtre de la fillette par Nathalie Lerouge, avant son suicide.
Sa mère refusait qu'Anaïs soit de nouveau placée
Le récit que Jérôme Mauvais a livré lors de sa garde à vue va dans le sens de cette hypothèse: il a déclaré que son épouse avait déjà affirmé qu'elle ne laisserait pas la police les arrêter vivants, et qu'elle refusait que leur fille soit placée en foyer à nouveau. Le couple suspectait qu'Anaïs ait pu être violée lorsqu'elle avait été prise en charge par les services sociaux.
D'après le compte-rendu du procureur ce mercredi, le mis en cause déclare que son épouse a tiré sur sa fille alors que la BRI allait intervenir, puis a retourné l'arme contre elle.
Selon lui, sa compagne avait déjà évoqué son intention de tuer la fillette puis de se suicider si la police venait à les interpeller, ce qu'a confirmé un témoin auprès des enquêteurs.
La petite fille avait été enlevée en février
Les parents, qui avaient un casier judiciaire vierge, sont décrits comme des marginaux socialement défavorisés et sans activité professionnelle par le procureur de la République. Ils appartenaient à la communauté des gens du voyage.
Ils sont soupçonnés d'avoir enlevé le 10 février dernier leur petite fille placée en foyer dans le cadre d'une mesure d'assistance éducative. Ce jour-là, deux personnes s'en sont pris en effet à l'éducatrice qui accompagnait l'enfant lors d'une sortie et ont emmenée cette dernière en voiture. Le faits se sont passés sur le parking du McDonald d'Auxerre.
Le parquet d'Auxerre avait alors ouvert une information judiciaire du chef d'"enlèvement" et un appel à témoins a été lancé le 1er mars, avec les photos de Jérôme Mauvais et Nathalie Lerouge. Les investigations ont conduit à la localisation des parents lundi, à 150 kilomètres environ d'Auxerre.
Un premier enlèvement en 2019
Anaïs avait été placée en novembre 2021, ses parents ayant été interpellés quelques jours plus tôt sur une aire d'autoroute près d'Aurillac, dans le Cantal. Deux ans auparavant, en 2019, ils l'avaient soustraite une première fois aux services de l'aide sociale à l'enfance, qui l'avaient placée en foyer à cause d'une absence de scolarisation, mais aussi une mauvaise prise en charge en terme d'hygiène et de soins par ses parents.
Pour cet enlèvement, les parents d'Anaïs devaient être jugés le 22 février dernier. Ils étaient absents lors de l'audience, et le procès a été renvoyé au 16 juin 2022, le juge estimant que l'affaire devait être examinée en formation collégiale, c'est-à-dire avec un président de cour et des assesseurs.
"C'est une famille que les services connaissent bien", reconnaît auprès de BFMTV.com le procureur d'Auxerre, qui confie qu'il ne s'attendait pas à une telle issue.