Jacques Vergès, mort de "l'avocat de la terreur"

L'avocat Jacques Verges est mort à 88 ans. - -
Personnage de roman, avocat aussi redouté que controversé, Jacques Vergès, décédé jeudi à Paris à l'âge de 88 ans s'était imposé comme le défenseur de personnalités condamnées par l'Histoire au motif que, selon lui, "les poseurs de bombes sont des poseurs de questions".
Ce pénaliste narcissique et médiatique a mêlé au long de sa carrière un esthétisme intellectuel le conduisant à volontiers philosopher et un profond militantisme qui l'a engagé dans la lutte anti-colonialiste.
De petite taille, rond, le visage lisse et ironique, portant de fines lunettes rondes et une coupe en brosse, cet amateur de cigares et collectionneur de jeux d'échecs, auteur d'une vingtaine de livres, était proche de personnalités politiques du monde entier mais aussi de militants de l'ombre.
"J'aurai défendu Hitler"
Il s'était rendu célèbre par sa "défense de rupture" - consistant à se servir du tribunal comme d'un porte-voix - adoptée durant la guerre d'Algérie quand il était l'avocat de militants du FLN. Il épousera d'ailleurs Djamila Bouhired, héroïne de l'indépendance et poseuse de bombes condamnée à mort mais finalement graciée.
"J'aurais défendu Hitler", clamait ce bretteur en colère, pour ne pas dire en guerre, contre "les bonnes intentions, les procès truqués et l'ordre mondial". "Quand un homme traqué frappe à ma porte, c'est toujours pour moi un roi dans son malheur", ajoutait celui que Barbet Schroeder a dépeint dans un film comme "l'avocat de la terreur".
Ses clients avaient un point commun: ils faisaient en général l'unanimité contre eux en Occident, à l'instar de membres de l'internationale terroriste des années 70 et 80, du "révolutionnaire" vénézuélien Carlos, de l'activiste libanais Georges Ibrahim Abdallah, du criminel de guerre nazi Klaus Barbie, du dictateur yougoslave Slobodan Milosevic ou de l'ancien dirigeant Khmer rouge Kieu Samphan.
Quelques mois avant la fin du dictateur libyen Mouammar Kadhafi, il s'était porté volontaire avec l'ancien ministre Roland Dumas pour déposer plainte pour "crimes contre l'humanité" contre le président français Nicolas Sarkozy dont le pays a pris la tête des opérations de la coalition internationale en Libye.
Me Vergès a aussi défendu, en vrac, des dirigeants africains (comme l'ivoirien Laurent Gbagbo), la fille de Marlon Brando, l'intellectuel négationniste Roger Garaudy, le jardinier Omar Raddad, la trésorière "occulte" du RPR Yvonne Casetta, le tueur en série Charles Sobhraj ...