Incendie mortel dans l'Hérault: le procès de cinq responsables des pompiers a débuté ce lundi

Un camion de pompiers patrouille dans le massif de la Gardiole, au nord de Frontignan (Hérault), dans le sud de la France, le 19 août 2024. Photo d'illustration - Pascal GUYOT / AFP
Il y a près de 9 ans, quatre pompiers ont été pris au piège lors d'un incendie ravageant plus de 200 hectares au nord de Béziers, dans l'Hérault. L'un d'entre eux est mort, et les trois autres ont été gravement blessés. Face à ce drame, un procès pour "homicide involontaire" et "blessures involontaires" de cinq anciens responsables des pompiers de l'Hérault s'est ouvert ce lundi 24 mars à Béziers.
Ces cinq hommes âgés de 47 à 65 ans, dont l'ancien chef du service départemental d'incendie et de secours (Sdis), doivent répondre à des titres divers de la mort du jeune pompier professionnel et des blessures subies par ses coéquipiers.
Au premier rang de la salle du tribunal correctionnel, se trouvent les trois pompiers survivants, Didier Bourdelier, David Fontaine et Lucas Canuel. Ce dernier porte encore sur son visage les stigmates des brûlures subies le 10 août 2016 lors de leur intervention sur un feu de forêt entre Gabian et Roquessels. Ses narines sont manquantes et ses mains ont été amputées de tous leurs doigts.
Derrière eux, au second rang, la mère et le frère, pompier lui aussi, de Jérémy Beier, le pompier professionnel de 24 ans décédé de ses blessures après 42 jours de coma.
Défaillances du camion des victimes
Les quatre pompiers, qui avaient entre 22 et 24 ans, occupaient le "CCF3", l'un des quatre camions-citernes feu de forêt (CCF) d'un Groupement d'Intervention feux de forêts (GIFF) affecté sur le flanc gauche du feu en août 2016.
Les quatre camions ont été surpris dans une clairière par un brusque changement de direction de l'incendie. Les occupants des quatre camions ont alors cherché à enclencher leur système d'autoprotection, qui diffuse de l'eau autour du véhicule pour protéger ses occupants, mais celui du "CCF3" ne s'est pas activé.
Encerclés par le feu, ses occupants ont quitté la cabine surchauffée et irrespirable, sans parvenir à trouver immédiatement refuge. Ils ont été ensuite évacués par hélicoptère au service des grands brûlés de l'hôpital de Montpellier.
Les débats, devant se tenir jusqu'à jeudi, devraient en premier lieu évoquer les nombreuses défaillances du camion des victimes: radio en panne, système d'autoprotection non-fonctionnel, non-étanchéité de la cabine, absence de diffuseur d'air.
"Manquements opérationnels"
Les deux plus haut gradés répondront de "fautes" dans la gestion du service, notamment Christophe Risdorfer, alors directeur du Sdis 34, qui a notamment pris la responsabilité d'engager sur le terrain le "CCF3", pourtant vétuste et habituellement destiné à la formation.
L'accusation lui reproche également d'avoir laissé sans suite les signalements relatifs aux problèmes des véhicules les plus anciens. Son adjoint chargé du matériel, Michel Coste, est également jugé pour avoir négligé ces problèmes.
L'enquête a aussi mis en lumière des "manquements opérationnels" lors de l'intervention, dont étaient responsables le "chef de secteur" Olivier Laurent et le "chef de groupe" Franck Ravel, également poursuivis.
Dernier prévenu, Gilles Marcos était l'officier "AERO" lors des faits, chargé d'assurer la sécurité au sol depuis un hélicoptère. Selon l'instruction il n'a pas réalisé de reconnaissance préalable des lieux ni ordonné les largages d'urgence réclamés.
"Il y a eu des dysfonctionnements à tous les niveaux. On a privilégié le budget à la sécurité, on a préféré envoyer de jeunes garçons courageux à la mort", avait cinglé à la veille du procès l'avocat de la plupart des parties civiles, Luc Abratkiewicz.