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Police-Justice

Ecole catholique du Cher fermée: des enfants font état de "caresses inappropriées"

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- - L'école "L'Angélus" de Presly (Cher) - GUILLAUME SOUVANT / AFP

L'enquête se poursuit après la fermeture d'une école catholique du Cher vendredi 2 juin. Des soupçons de mauvais traitements, d'escroquerie financière et d'actes inappropriés pèsent sur l'établissement.

Trois des soixante enfants auditionnés vendredi dans le cadre d'une opération de gendarmerie à l'école catholique traditionaliste L'Angélus à Presly (Cher) ont fait état de "caresses et de massages pour le moins inappropriés" de la part du directeur de l'établissement, a indiqué mardi le procureur de la République de Bourges.

Le directeur, l'abbé Régis Spinoza, âgé de 46 ans, en soutane, jovial et souriant, est resté mardi matin derrière les grilles cadenassées de l'école, un ancien couvent austère en pleine campagne. Un communiqué de son avocat Alexandre Varaut a attribué mardi soir l'éclatement de l'affaire à la "vengeance personnelle" et aux "calomnies" de deux anciens enseignants de l'établissement. Il a ce jeudi indiqué à BFMTV.com que les dirigeants de l'école contestaient "totalement la moindre agression sexuelle".

"Poser la main sur l'épaule d'un élève, ce n'est pas une agression sexuelle. Il est certain que personne n'a été l'objet d'une agression sexuelle dans cette école", assure Alexandre Varaut, mettant hors de cause la direction.

“Des faits mineurs d’une parfaite banalité”, défend l’avocat de l’abbé

"A l'évidence, si la justice était saisie d'éléments sérieux, concordants et graves (...) des mises en examen auraient été prononcées", fait valoir Alexandre Varaut en évoquant des "événements mineurs et d'une parfaite banalité". "La direction de l'établissement, soutenue par l'association des parents d'élèves condamne l'accueil bienveillant donné à ces calomnies", conclut-il. L'abbé, qui n'a pas d'antécédents pénaux, est un homme "manifestement intelligent", a commenté le procureur Joël Garrigue.

Fermé sur décision préfectorale vendredi et jusqu'aux vacances d'été "sur le fondement de la protection de l'enfance", l'établissement catholique hors contrat, ouvert en 2010, qui accueillait 109 élèves du primaire à la terminale, est sous le coup d'une enquête judiciaire en raison de soupçons de maltraitance d'élèves et d'agressions sexuelles.

Flux financiers complexes et méthodes du XIXe siècle

Après avoir retiré leurs 4 enfants scolarisés à L'Angélus, des parents avaient déposé une plainte auprès de l'Éducation nationale pour "mauvais traitements et des comportements équivoques", a indiqué le magistrat. La plainte faisait état notamment de "comportements équivoques (de la part du directeur): des enfants qui étaient l'objet d'attentions particulières, qui étaient souvent sur les genoux de l'abbé".

Elle a été très vite étayée par les témoignages d'anciens enseignants, justifiant l'importante opération de gendarmerie menée vendredi, a précisé Joël Garrigue. "En nous renseignant sur l'école nous avons découvert des choses qui paraissent étonnantes", a commenté le magistrat: des bénévoles qui travaillaient quasiment à temps plein à côté d'une dizaine de salariés, des flux financiers complexes entre des associations, une SCI propriétaire de l'immeuble, et des méthodes éducatives "dignes du XIXe siècle".

Privations de nourriture, denrées périmées et "punition du poireau"

Les allégations de mauvais traitements, corroborées par des témoignages, allaient de privations de nourriture à l'absence de chauffage en plein hiver dans l'internat en passant par des "coups, infligés par le directeur, l'encadrement ou des corrections administrées par des plus grands sur des plus petits sur instruction de l'encadrement", a énuméré Joël Garrigue. Le magistrat a également évoqué la punition du "poireau": un élève fautif "obligé de rester dans un coin à ne rien faire, y compris la nuit, selon certains témoignages".

Outre de la documentation et la comptabilité, "d'importants stocks de denrées périmées ont été saisis" lors de la perquisition, a ajouté le procureur, en indiquant que les services vétérinaires doivent déterminer dans quelle mesure leur consommation pouvait être dangereuse pour les enfants.

"Les conditions spartiates de vie dans l'établissement, l'absence de chauffage, la mauvaise qualité de la nourriture, les flux financiers croisés entre plusieurs structures soulèvent des questions sur le cheminement de l'argent payé par les familles pour la scolarisation de leurs enfants, pouvant aller jusqu'à plusieurs dizaines de milliers d'euros par an", a relevé le magistrat.

L'archevêque de Bourges, Mgr Armand Maillard, a souhaité dans un communiqué que "la justice puisse poursuivre son travail d'enquête". Les conclusions devraient être connues d'ici la rentrée scolaire. L'avocat de l'école l'Angélus dénonce quant à lui une procédure "spectaculaire" et des "rumeurs". 

J.A. avec AFP