Complicités, fuite en Italie, mobile... Les zones d'ombre après la reddition du suspect du meurtre dans une mosquée du Gard

La mosquée de La Grand-Combe, dans le département du Gard. - Google Maps
L'enquête avance, mais les zones d'ombre demeurent. Après trois jours de traque, Olivier A., principal suspect du meurtre d'Aboubakar Cissé, un jeune fidèle, dans la mosquée de La Grand-Combe dans le Gard, s'est rendu à la police en Italie dimanche 27 avril aux alentours de 23h30, accompagné d'un avocat et d'un parent.
Vendredi dernier, le corps d'Aboubakar Cissé, un jeune Malien âgé d'une vingtaine d'années, était retrouvé criblé de plusieurs dizaines de coups de couteau dans la mosquée de la petite commune gardoise. Son meurtrier présumé et principal suspect de l'affaire, Olivier A., avait filmé sa victime agonisante et insulté sa religion.
Le parquet d'Alès a été dessaisi du dossier au profit du pôle criminel du tribunal de Nîmes ce lundi. Un juge d'instruction va être nommé aujourd'hui et une information judiciaire va être ouverte. L'enquête devra déterminer des circonstances exactes du drame.
• Quelles complicités?
L'une des premières zones d'ombre de l'affaire concerne les éventuelles complicités dont aurait pu bénéficier Olivier A. pour prendre la fuite et échapper, trois jours durant, aux forces de l'ordre et aux enquêteurs. Le suspect avait par ailleurs été identifié et repéré ce week-end, mais était parvenu à de nouveau se volatiliser.
"L'enquête va se poursuivre pour vérifier s'il a pu bénéficier de complicité pour prendre la fuite et quitter la France", souligne ce lundi sur BFMTV Abdelkrim Grini, qui ajoute que l'hypothèse sur la question va dans le sens de la positive.
"Ce que l'on sait, c'est qu'il a bénéficié de complicités pour quitter le territoire national", assure le procureur, qui déclare qu'Olivier A. a bien été "pris en charge par certaines personnes. Est-ce que c'était des amis ou sa famille, pour le moment, nous ne le savons pas."
Après les faits, Olivier A. s'est rendu en train en Italie. Il s'est rendu sans bagage à Pistoia, où vit une tante paternelle. À son arrivée ce samedi soir, il lui a tout raconté. Elle a insisté pour qu'il se rende aux autorités avec un avocat qu'elle connaissait.
Face aux enquêteurs, le suspect s'est montré "très silencieux, taciturne, renfermé". Depuis qu'il s'est rendu, sa tante a quitté temporairement Pistoia par peur des représailles. La famille du suspect de 21 ans se demande s'il faisait une dépression. Selon elle, il passait son temps dans sa chambre et ne voulait parler à personne depuis plusieurs mois.
• Un rapatriement en attente
Arrêté en Italie, Olivier A. se trouve en garde à vue au commissariat de Pistoia. La France a lancé une procédure de transfèrement, nécessaire à son rapatriement en France. Un juge d'instruction a été désigné ce lundi matin en vue de notifier un mandat d'arrêt européen.
"Ce matin, la procédure judiciaire va s'activer pour que le nécessaire soit fait pour que nous puissions le récupérer le plus tôt possible", assure sur BFMTV Abdelkrim Grini. "C'est une question de temps", résume le procureur, soulignant que la mesure "peut prendre quelques jours, quelques semaines."
"En tout cas, on fera tout pour que ce soit le plus rapidement possible", affirme-t-il.
À sa remise aux autorités, Olivier A. ne sera pas placé en garde à vue. Il sera directement présenté à un juge d'instruction pour être mis en examen, dans le cadre de son interrogatoire de première comparution.
• Le mobile en question
Olivier A. est, selon la description du procureur d'Alès, "un jeune homme de vingt ans, né en France et de nationalité française, d'origine bosnienne, qui était inconnu des services de police et de la justice, qui jusqu'à présent était passé sous les radars" avant le meurtre d'Aboubakar, dans lequel il est le principal suspect.
Mais concernant le mobile du jeune homme, les explications ne sont pas arrêtées. Sur BFMTV, Abdelkrim Grini "confirme que la piste (d'un crime) anti-musulman ou à connotation islamophobe est la piste privilégiée, compte tenu des circonstances de la commission des faits qui lui sont reprochés". Le parquet de Nîmes, qui s'est saisi des faits ce lundi, a d'ailleurs retenu le caractère raciste de l'acte.
Olivier A. est "considéré par les enquêteurs et le parquet d'Alès comme extrêmement dangereux, compte tenu du sang-froid dont il a fait preuve notamment à travers cet horrible assassinat", ajoute Abdelkrim Grini, qui souligne que le suspect "était en revendication de commettre de nouveaux meurtres".
Parmi les autres mobiles évoqués, "peut-être des motivations de fascination de la mort, d'envies de donner la mort, d'envies d'être considéré comme un tueur en série", détaille le procureur de la République, qui insiste sur le fait que "tout ceci doit être vérifié pour cerner les motifs de passage à l'acte."
D'après son avocat italien, Olivier A. était confus à son arrivée en Italie et a expliqué avoir voulu tuer "la première personne qu'il croisait". La question de sa responsabilité pénale devrait donc se poser au cours de l'instruction pour savoir si son discernement était altéré ou aboli au moment des faits. Pour ces faits, l'individu encourt la réclusion criminelle à perpétuité.