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Police-Justice

Ce que montre la vidéo complète des perquisitions au siège de la France insoumise

Jean-Luc Mélenchon.

Jean-Luc Mélenchon. - Alain JOCARD / AFP

Mercredi soir, l'émission Quotidien de TMC a diffusé sa captation complète des perquisitions au siège de la France insoumise le 16 octobre 2018. Ces images longues de quarante minutes permettent de mieux comprendre le déroulement des événements.

C'était le 16 octobre 2018 mais les turbulences de l'événement continuent de secouer la France insoumise. Ce jour-là, les policiers débarquaient au 43 de la rue de Dunkerque, dans le 10e arrondissement de Paris, siège du mouvement, afin d'y mener des perquisitions dans le cadre de deux enquêtes préliminaires distinctes. L'une portait sur les comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, l'autre sur les assistants des eurodéputés insoumis après la dénonciation d'une élue à l'époque frontiste. 

Les images des perquisitions, pour le moins mouvementées, ont été filmées par une caméra de l'émission de TMC Quotidien. Depuis, certaines déclarations de Jean-Luc Mélenchon, dont son fameux "ma personne est sacrée", et ses altercations avec un procureur de la République et certains policiers ont été largement diffusés.

Pour autant, la France insoumise a protesté avec constance contre le montage présenté. Mercredi soir, TMC a donc diffusé, près d'un an après les faits, l'intégralité de la captation. Jean-Luc Mélenchon s'est réjouit dans la foulée que la "vérité éclate".

"Depuis un an Quotidien cachait ces moments où Corbière et moi rassurons les policiers et appelons au calme. C’est le contraire de ce que montrent depuis octobre derniers les 30 secondes que diffusent Quotidien et tous les moutons de Panurge de l’officialité médiatique", a-t-il écrit sur son blog.

Ces rushes montrent-ils vraiment "sous un autre jour" la perquisition, comment l'affirme Jean-Luc Mélenchon? Leur visionnage permet en tout cas une meilleure compréhension de l'événement. 

Des insoumis d'abord très calmes

Au moment où cette vidéo de 40 minutes et 53 secondes commence, la perquisition a débuté. Des députés de la France insoumise, dont Bastien Lachaud, Loïc Prud'Homme, Caroline Fiat, Eric Coquerel, Adrien Quatennens, arrivent dans le hall de l'immeuble. Dans un premier temps, les policiers leur refusent l'accès aux locaux du parti où s'affairent les membres des forces de l'ordre, ce qui entraîne la colère des parlementaires.

Réduits à l'immobilité devant les portes fermées du siège, les différents interlocuteurs conservent toutefois à ce moment-là leur calme, le député Eric Coquerel se bornant à affirmer: "C’est étonnant que vous n’ayez pas été envoyés chez Macron et tout ça quand même. Je sais que vous n’avez pas le droit de commenter mais on est un peu étonné de la manière dont les choses se passent."

L'arrivée tonitruante de Jean-Luc Mélenchon

Une voix tonitruante retentit bientôt dans l'escalier: Jean-Luc Mélenchon rejoint ses camarades. "Allez, entrez ! Ce n’est pas de la justice, pas de la police. Ce n’est pas l’Etat républicain. Vous appliquez des ordres immoraux et illégaux. Enfoncez-moi ces portes, on verra si on m’empêche de rentrer dans mon local. On n’est pas des voyous, pas des bandits", conteste-t-il. 

Il s'approche bientôt d'un des policiers en faction devant l'huis. Après un contact, l'agent lance: "Ne me touchez pas monsieur." "Je fais ce que je veux", lui rétorque Jean-Luc Mélenchon qui lui reproche à son tour de l'avoir touché: "Je suis un parlementaire ! Ma personne est sacrée ! Ne me touchez pas !"

Si cette "sacralité", à travers laquelle Jean-Luc Mélenchon faisait référence à l'inviolabilité parlementaire, a été moquée, une autre sortie du leader insoumis, parfois raillée, est mieux compréhensible lorsqu'on écoute ses propos en longueur: le fameux "la République c'est moi", dont le contexte immédiat nous montre qu'il indiquait qu'il pensait devoir être protégé par la police.

"Vous êtes au service de gens qui dénoncent n’importe qui, n’importe quoi ! Vous êtes des policiers républicains, vous n’êtes pas Benalla. Vous êtes des policiers républicains, la République c’est moi ! C’est moi qui suis parlementaire. Poussez-vous de là et ouvrez-moi cette porte !" dit-il. 

"Ne vous inquiétez pas, il n'y a pas personne de violent ici"

N'obtenant pas gain de cause, Jean-Luc Mélenchon ordonne alors: "Enfoncez la porte camarades ! On verra qui a le dernier mot ici." A une élue de son camp qui veut dissuader les siens d'employer "des méthodes de voyous", Jean-Luc Mélenchon répond vivement: "Ça va toi, on ne t’a pas demandé ton avis ! Si c’est pour faire ça, c’est pas la peine."

Dans la cohue, il se trouve à nouveau au contact des policiers. A voix basse, il tient alors des propos plus amènes à leur égard. A l'un s'inquiétant pour son arme de service, il souligne qu'il y a "une sécurité", à l'autre il glisse: "Ne vous inquiétez pas, il n'y a personne de violent ici". 

Un face-à-face avec le procureur

Empruntant une autre voie, les parlementaires parviennent enfin à entrer dans leurs locaux. Et les esprits s'échauffent à nouveau. Un policier plaque violemment au sol l'une des personnes présentes, et sans que la vidéo permette de connaître le motif d'une telle intervention. Le député élu en Seine-Saint-Denis, Alexis Corbière, est furieux: "Vous l’avez étranglé ! Vous allez arrêter ! On ne touche pas à un camarade".

Avisant un policier debout sur une table, Jean-Luc Mélenchon sermonne: "On ne donne pas d’ordre chez moi, descendez de cette table ! On ne salit pas le matériel. (...) Et vous le policier je ne veux plus vous voir monter sur une table, c’est une maison propre ici !" L'ancien candidat à la présidentielle pousse ensuite le procureur de la République et échange quelques mots acerbes avec un policier après que celui-ci a ostensiblement épousseté son brassard, effleuré par le député. 

"On ne vous empêche pas de faire votre travail"

Puis, il se radoucit à nouveau: "Mesdames, messieurs, on aurait aimé vous recevoir dans de meilleures conditions. Vous pourrez revenir un jour où vous êtes désarmés, on vous recevra avec le sourire. Aujourd’hui, le cœur n’y est pas."

Il explique une dernière fois sa position au procureur de la République tandis que les policiers quittent les lieux: "Vous prenez ce que vous voulez, on ne vous empêche pas de faire votre travail. Seulement, il faut que vous le fassiez sous les yeux des gens."

Jean-Luc Mélenchon et cinq de ses proches, dont Alexis Corbière et Bastien Lachaud, doivent comparaître les 19 et 20 septembre en raison de ces altercations. 

Robin Verner