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Police-Justice

Au procès Merah, l'autre frère dénonce la "haine" qui gangrène sa famille

Croquis d'Abdelkader Merah au procès en première instance, le 13 novembre 2017.

Croquis d'Abdelkader Merah au procès en première instance, le 13 novembre 2017. - Benoit PEYRUCQ / AFP

Devant la cour d'assises spéciale de Paris, Abdelghani Merah a déclaré qu'à cause de son frère, "Mohamed est devenu un tueur d'enfants".

À la cour d'assises spéciale de Paris ce mercredi, l'aîné de la fratrie Merah a décrit une famille ancrée dans la violence et la haine, affirmant que son cadet Abdelkader, rejugé pour complicité des assassinats de son frère Mohamed, avait fait du petit dernier "un tueur d'enfants".

Pas un regard pour Abdelkader

Abdelghani Merah, 42 ans, est témoin de l'accusation. Il est le dissident, le "traître" qui a dénoncé les siens après la mort de Mohamed Merah, tué par la police après avoir abattu trois militaires, un enseignant et trois enfants juifs à Montauban et Toulouse les 11, 15 et 19 mars 2012.

Ses premiers mots sont pour les victimes. Il égrène leurs noms, sa silhouette frêle ployant sous l'émotion. "Je suis désolé", dit-il à Samuel Sandler, père et grand-père de victimes de l'école juive Ozar Hatorah. "La dernière fois qu'on a tué des enfants juifs, c'était les nazis."

Pas un regard pour Abdelkader, de six ans son cadet, qui le fixe depuis le box. "Je n'arrive pas à me tourner vers cette personne, ce n'est pas mon frère, c'est celui qui a envoyé Mohamed Merah à la mort". Il estime qu'Abdelkader, condamné en 2017 à 20 ans de réclusion mais acquitté du chef de complicité, "a beaucoup de chance d'être jugé par la France". 

Une jeunesse modelée par la violence

Il demande pardon de n'avoir pas vu plus tôt la dérive radicale de ses frères, tant il a baigné, lui aussi, dans la violence familiale. Lui aussi a donné des coups, frappé ses frères, entraîné Abdelkader qui l'admirait dans la drogue et l'alcool dès ses dix ans.

"Si c'est de ma faute ce qu'est devenu Kader, je veux lui dire qu'à cause de lui, Mohamed est devenu un tueur d'enfants", a-t-il déclaré à la barre.

Ses certitudes plongent leurs racines dans une jeunesse modelée par la violence: le père qui bat la mère, démissionnaire, les fils qui se battent entre eux. "Pour connaître la famille Merah, il faut être né dans le même seau de haine", dit-il.

Une fascination pour Ben Laden

En février 2003, les relations avec son frère Abdelkader sont devenues détestables. Ils s'acharnent sur leurs voitures respectives, l'un à coup de batte, l'autre de club de golf, et Abdelkader finira par donner "sept coups de couteau" à Abdelghani par vengeance, selon ce dernier.

Quant à Mohamed, "c'était quelqu'un de déchiré, il était complètement en roue libre". "Il a été ultra-battu par Kader". Une violence "normale" dans la famille, la cité, a tenté d'expliquer Abdelkader, que le quartier avait surnommé "Ben Ben" du fait de sa fascination pour Ben Laden après le 11 septembre 2001, qualifiant Mohamed de "petit Ben Ben".

Esther Paolini avec AFP