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Attentat déjoué du Thalys en 2015: le tireur Ayoub El Khazzani condamné à la perpétuité

Croquis de l'audience du 16 novembre 2020 du procès de l'attentat déjoué du Thalys avec de gauche à droite: Ayoub El Khazzani, Mohamed Bakkali, Bilal Chatra et Redouane El Amrani Ezzerrifi

Croquis de l'audience du 16 novembre 2020 du procès de l'attentat déjoué du Thalys avec de gauche à droite: Ayoub El Khazzani, Mohamed Bakkali, Bilal Chatra et Redouane El Amrani Ezzerrifi - Elisabeth De Pourquery © 2019 AFP

La perpétuité avait été requise à l'encontre du tireur du Thalys Ayoub El Khazzani reconnu coupable d'avoir voulu commettre un massacre dans la lignée des attentats commis en 2015 sur le territoire français.

"Abdelhamid Abaaoud a mis la haine dans mon coeur." Depuis le 16 novembre, Ayoub El Khazzani, l'auteur de l'attaque déjouée du Thalys qui a fait deux blessés le 21 août 2015, n'a eu de cesse de rejetter la faute sur celui qui est présenté comme le coordinateur des attentats du 13-Novembre qui lui avait commandé de s'en prendre "à des soldats américains et des membres de la commission européenne". Une version qui n'a pas convaincu la cour d'assises spéciale qui a condamné ce jeudi le Marocain de 31 ans à la prison à perpétuité, avec une période de sûreté de 22 ans.

A ses côtés dans le box des accusés, Bilal Chatra, considéré comme l'"éclaireur" qui a guidé Ayoub El Khazzani et Abdelhamid Abaaoud entre la Syrie et la Belgique, et "bombe à retardement" qui "peut rebasculer à tout moment", selon l'avocat général, a été condamné à 27 ans de réclusion criminelle. Mohamed Bakkali, le "chauffeur" des jihadistes et par ailleurs logisticien présumé du 13-Novembre, a écopé de 25 ans de prison. Une peine assortie d'une période de sûreté des deux tiers. Contre le dernier accusé, Redouane El Amrani Ezzerrifi, passeur qui a aidé Abdelhamid Abaaoud, 7 ans de prison ont été prononcé par la cour d'assises spéciale à son encontre.

La cour a également prononcé pour les quatre accusés une interdiction définitive de territoire français.

Un massacre évité

Tout au long de ce procès, l'accusation a mis en avant le massacre évité dans ce Thalys reliant Amsterdam à Paris, grâce à l'intervention de passagers et de trois militaires américains, des "héros malgré eux", qui ont désarmé et neutralisé l'assaillant, et grâce à des armes défectueuses. "Peu de dossiers d'attentats permettent de juger les auteurs, et la présence d'Ayoub El Khazzani a suscité des espoirs de compréhension", a relevé l'avocat général au cours de son réquisitoire, déplorant que "l'intéressé n'est pas à la hauteur, il a refusé d'assumer (…), s'est enfermé dans une version fantaisiste."

Ayoub Al Khazzani, un Marocain radicalisé depuis 2014, au fil des audiences et des questions de la cour, a maintenu qu'il était monté à bord de ce Thalys le 21 août 2015, muni d'une kalachnikov, de 300 munitions, un pistolet Luger, un cutter et un bidon d'essence, avec pour seule mission, donnée par son commanditaire Abdelhamid Abaaoud, de tuer des soldats américains et des membres de "la Commission européenne" présents à bord, et non commettre une tuerie de masse.

"Une version montée de toutes pièces qui ne résiste à aucun élément du dossier", a martelé l'un des avocats généraux qui estime qu'elle ne résiste à "aucun élément du dossier".

"Un pion"

Prenant la parole une dernière fois ce jeudi, avant que les magistrats professionnels de la cour d'assises spéciale ne se retirent pour délibérer, Ayoub Al Khazzani a présenté ses excuses et a remercié la justice française. "J’ai honte du fond du coeur, a-t-il dit. Pour les victimes que j’ai agressées gratuitement, franchement je regrette." Le tireur du Thalys s'est également excusé de ne pas avoir pu répondre à toutes les questions des parties civiles, et notamment sur son niveau de connaissance des attentats du 13-Novembre perpétrés trois mois après cette attaque déjouée.

Car c'était l'un des enjeux de ce procès pour l'accusation. Mais l'accusé, puis son avocate ont fait valoir qu'il n'était pas au courant des projets d'attentats à Paris puis à Bruxelles par la cellule terroriste montée par Abdelhamid Abaaoud, malgré sa proximité avec ce dernier. "C'est de la chair à canon", a plaidé Me Sarah Mauger-Poliak. Il n'est pas "un homme de confiance" ni un "opérationnel" de l'Etat islamique, a abondé son autre avocate Me Emma Lesigne. "C'est un pion sans aucune autre responsabilité que d'obéir aux ordres", "qu'on va surveiller" jusqu'à son passage à l'acte. Jusqu'à la fin l'ombre d'Abdelhamid Abaaoud, tué lors de l'assaut du Raid à Saint-Denis, aura plané sur ce procès.

https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV