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Police-Justice

Affaire Jubillar: ces éléments de l'accusation que contestent les avocats du mari

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Lors d'une audience prévue mardi 6 juillet, l'appel du placement en détention provisoire de Cédric Jubillar va être examiné par la cour d'appel de Toulouse.

Fin juin, plusieurs éléments troublants ont éveillé la suspicion des enquêteurs mobilisés pour retrouver Delphine Jubillar et ont conduit à la mise en examen de Cédric, son époux. Lors d'une conférence de presse vendredi 18 juin, le procureur de la République de Toulouse Dominique Alzéari avait pointé une liste d'incohérences dans la version du mari, bien que le suspect continue toujours de nier toute implication dans la disparition de Delphine Jubillar.

Lors d'une audience prévue mardi 6 juillet, l'appel du placement en détention provisoire de Cédric Jubillar va être examiné par la cour d'appel de Toulouse.

"Tous les arguments qui ont été avancés par le parquet peuvent être démontés par la défense", expliquait fin juin à BFMTV Maître Alexandre Martin, l'un des avocats de Cédric Jubillar. Son conseil dénonçait "un dossier qui est vide, sans aveux, sans scène de crime, pas de trace de sang, pas de trace de fluide corporel, pas de trace de lutte dans la maison et enfin un dossier sans corps".

Ses avocats contestent plusieurs éléments jugés à charge contre leur client.

C'est une phrase qui fait beaucoup parler, depuis qu'elle a été révélée dimanche par Le Parisien et confirmée par nos informations. Les enquêteurs ont appris auprès de témoins que Cédric Jubillar aurait prononcé une phrase troublante plusieurs semaines avant les faits, alors qu'il est en train de discuter sur un parking avec sa mère: "Elle m'énerve, je vais la tuer, je vais l'enterrer, personne ne la retrouvera."

Lors de sa garde à vue, les enquêteurs lui ont demandé s'il avait effectivement prononcé ces mots. Il a admis avoir dit la première partie de la phrase ('Elle m'énerve, je vais la tuer'), mais sous le coup de l'énervement, dans un contexte de séparation difficile, sans penser à mal. En revanche les avocats de Cédric Jubillar contestent qu'il ait prononcé la seconde partie ('Je vais l'enterrer, personne ne la retrouvera').

· Le véhicule de la victime garé différemment

Le 23 juin, le procureur avait notamment fait remarquer que la voiture de Delphine Jubillar avait potentiellement été déplacée dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, nuit de sa disparition. Les voisins du couple rapportent en effet que la victime avait l'habitude de garer sa Peugeot 207 devant le domicile conjugal à Cagnac-les-Mines, dans le sens de la montée. Selon eux, c'est ce qu'avait fait Delphine le soir du 15 décembre. Mais le 16 au matin, le véhicule était garé dans le sens inverse, soit celui de la descente, selon nos informations, qui viennent confirmer celles du Parisien.

Un argument qui ne tient pas, selon la défense de l'ancien conjoint de la victime, pour qui le fait de se garer dans le sens de la montée n’était pas une "règle absolue". Le camp de Cédric Jubillar explique également qu'il existe deux voies pour accéder à l'endroit où cette infirmière stationnait sa voiture.

Par ailleurs, les gendarmes se sont rendus à plusieurs reprises au domicile des Jubillar dans les heures qui ont suivi l'annonce de la disparition: notamment une première fois moins d’une heure après l’appel du mari. Or les gendarmes ne dressent à ce moment là aucun procès-verbal de constatation, affirme la défense. Ce n'est qu'ensuite, lorsqu'ils reviennent à la mi-journée pour faire des constatations, qu’ils notent l’emplacement de la voiture dans la descente. "Comment affirmer qu'elle n'a pas été changée de place dans l’intervalle?", s’interrogent ses avocats.

Un autre élément remet en cause cette version, selon la défense de Cédric Jubillar: dans cette voiture se trouvaient plusieurs sièges bébé et des coffres remplis d’affaires. Ils se demandent donc comment l'ex-époux de Delphine aurait pu cacher son corps dans un véhicule si rempli.

· Une couette retrouvée dans la machine à laver

Un autre point d'interrogation concerne la machine à laver du couple. Lorsque les gendarmes se rendent pour la deuxième fois au domicile de Cagnac, ils constatent qu'une couette s'y trouve. Cédric Jubillar explique aux enquêteurs avoir voulu laver cette couette qui se trouvait sur le canapé car l’un des chiens avait uriné dessus.

Selon les éléments relevés par le procureur, le suspect téléphone aux gendarmes et à leur arrivée, ces derniers le surprennent en train de laver la couette. Une version jugée "incohérente" et "invraisemblable" pour les avocats du suspect, car Cédric Jubillar ne semblait pas avoir caché aux gendarmes l’existence de cette couette.

· Des cris entendus dans le voisinage

Deux voisines - une mère et sa fille - disent avoir entendu des cris stridents vers 23 heures, alors qu'elles regardaient ce soir-là sur TF1 Retour vers le Futur II. Elles sortent fumer une cigarette alors que se déroule la scène du bal de promo dans le film. D'après l'heure de diffusion de cette scène, il est environ 22h49. Or, elle date ce moment à 23h07. La défense de Cédric Jubillar note que cela ne correspond pas.

Par ailleurs, la maison de ces deux femmes se trouve à 154 mètres de la maison du couple. Ils se demandent donc comment celles-ci ont pu entendre ces cris, alors que le voisin le plus proche des Jubillar - qui habite dans le même lotissement, à 5/10 mètres de chez eux - n’a lui rien entendu. Or, rappellent-ils, ce voisin a un rituel: à 23h45 après le journal d’une chaîne d’information, il sort fumer une cigarette à l’extérieur. Celui-ci est formel: ce soir-là, il n’a rien entendu, a-t-on appris de source proche du dossier.

· Leur fils témoin d'une dispute?

Le fils du couple âgé de 6 ans a été entendu deux fois par les enquêteurs: une première fois le 16 décembre, au lendemain de la disparition de sa mère. Le garçonnet n’a alors pas vu son père depuis la veille au soir, et il n’est donc pas entré en contact avec lui. À ce moment, l'enfant ne parle pas de dispute aux enquêteurs et déclare n’avoir rien entendu de particulier, selon cette même source. Il décrit même une ambiance chaleureuse au sein du foyer, et évoque "un câlin à trois".

En revanche plusieurs semaines plus tard, le jeune garçon affirme que ses parents ont prononcé des "phrases". Selon le procureur de la République, l'enfant a évoqué une dispute parentale. Une version contredite par la défense de Cédric Jubillard, pour qui "il ne s’agit ni d’une bagarre ni d’une dispute".

Après la mise en examen de Cédric Jubillar, le procureur de la République de Toulouse Dominique Alzeari avait indiqué que la "disparition criminelle (était) privilégiée" dans ce dossier avec une "présomption d'homicide". Le magistrat avait insisté que le couple se trouvait dans un "contexte de séparation très conflictuel".

Mélanie Vecchio et Alexandra Gonzalez avec J.B. et M.D.