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Stromae: comment est né l'avatar numérique qui accompagne la sortie de son album

L'avatar de Stromae

L'avatar de Stromae - nWave Pictures Distribution

Le chanteur belge, qui revient ce vendredi avec "Multitude", est accompagné sur scène lors de sa tournée par un avatar animé. Un personnage imaginé par deux studios d'animation, qui racontent sur BFMTV cette aventure.

Un Stromae peut en cacher un autre. La véritable star de la nouvelle tournée du chanteur belge, qui fait son grand retour ce vendredi avec Multitude presque une décennie après le triomphe de Racine carrée, n'est pas l'artiste en lui-même, mais un avatar numérique, créé spécialement pour ses clips et ses concerts. Un personnage qui permet au chanteur de s'effacer, lui qui s'est tenu éloigné de la scène publique pendant des années après son burn-out.

L'avatar de Stromae est l'œuvre de deux studios d'animation, l'un français, Werlen Meyer, et l'autre belge, nWave. Basé à Paris, Werlen Meyer a mené "de longues réflexions et recherches artistiques" avec Stromae, Luc Van Haver (son frère) et Coralie Barbier (son épouse) pour intégrer de l’animation à la scénographie de cette nouvelle tournée, raconte Yann Germain, cofondateur de ce studio né en 2018:

"Notre mission consistait à déterminer une direction artistique et une mise en scène qui leur plaise tout en étant 'fabricable' ensuite en animation dans les contraintes du projet de tournée et du studio d’animation nWave, choisi d’emblée par Mosaert [la société de Stromae, NDLR]. Ils avaient besoin que nous les aidions à orienter leurs envies et réflexions vers un projet d’animation concret."

Werlen Meyer, qui a travaillé avec Wes Anderson (The French Dispatch) et Orelsan (le clip Paradis), a imaginé le personnage en 2D, avant de passer le relais à nWave pour la modélisation en 3D. "Des allers-retours et ajustements suite aux diverses réunions ont évidemment été présents, pour se rapprocher d'un personnage qui pourrait bouger et réaliser ce qui était prévu dans les diverses chansons", commente Vincent Philbert, qui a supervisé l’exécution du projet chez nWave.

Trouver le bon look

Si l'avatar ressemble trait pour trait à Stromae, il est aussi légèrement plus allongé et élastique que l'original. "Le but était de réussir à retranscrire le personnage de Paul, légèrement stylisé, sans aller dans l’extrême de l'ultra réalisme", note Vincent Philbert, avant d'ajouter:

"Il fallait surtout garder les possibilités techniques pour la simulation des vêtements et d'animation, et donc toujours trouver l'entre-deux nécessaire et ne pas se fermer des portes techniques pour aller jusqu'au rendu des images finales."

Mosaert, le label créatif de Stromae, avait donné pour consigne d'"éviter un aspect trop cartoon", souligne Yann Germain, qui lève un coin du voile sur les inspirations de Stromae pour son personnage: "Quelques références clefs étant La Manga de Hokusai, le film Le Roi et l’Oiseau de Paul Grimault ou encore le film Her de Spike Jonze."

L'avatar de Stromae
L'avatar de Stromae © NWave

On remarque également des cernes sur l'avatar de Stromae. Un apport des animateurs, et non une demande de Stromae, insiste Vincent Philbert. L'idée était d'"ajouter ce petit quelque chose de vie que les gens peuvent déceler, ou pas, mais qui permet aussi de s'affranchir des personnages 'numériques' qui manquent parfois de cet ancrage, pour rajouter du mimétisme au personnage".

La coiffure et les habits de l'avatar ont été directement inspirés de la tenue de scène de Stromae, imaginée par Coralie Barbier, conceptrice des vêtements Mosaert et directrice artistique avec Luc Van Haver du label. "Le but premier était de réussir à avoir une corrélation entre lui, le vrai Stromae, sur scène, et ce qui apparaît dans les écrans", explique Vincent Philbert. Comme si l'artiste et son double ne devaient former plus qu'un sur scène.

Trouver le bon vert

Les animateurs ont ainsi apporté un soin très particulier à la tenue de l'avatar, poursuit Vincent Philbert: "Les échanges ont été sur le tissu, par exemple. Nous avons reçu des échantillons pour pouvoir se rapprocher le plus possible du rendu réel tel qu'il le porte sur scène: le type de broderie florale qu'il a sur ses volants d'habits de scène, le galon sur le côté du pantalon, le design des chaussures..."

Couleur dominante du clip Santé, le vert a été choisi pour l'avatar, en raison de l'importance qu'il revêt dans l'univers de Stromae. "Nous avions proposé une palette de couleurs pastel. La couleur verte faisait partie des premières pistes que nous avions proposées, et c’est une couleur récurrente chez Mosaert", indique Yann Germain. C'est aussi "une association chromatique de couleur avec le vert qu'il porte sur scène et qui rend le tout assez doux pour ce morceau entraînant", complète Vincent Philbert:

"Les échanges sur les choix artistiques autant que techniques (car l'écran sur scène émet beaucoup de lumière, donc c'est à prendre en considération pour retrouver le même vert que sur un écran d'ordinateur, par exemple) ont amené beaucoup de tests sur les teintes de vert pour l'harmonie, ainsi que pour choisir le bon [vert] en rapport avec les autres chansons aussi."

Animer Stromae

Stromae s'est enfin livré à des séances de danse pour aider les animateurs "à retranscrire la chorégraphie qu'il a créée avec Marion Motin", précise Vincent Philibert. "Ils se sont donc filmés, l'un et l'autre, en habits de scènes, avec les mouvements et chorégraphies de certaines chansons, pour ensuite devoir les recréer suivant le tempo de la chanson par nos animateurs, avec comme référent la danse en vidéo."

Un travail méticuleux, pour que les vidéos soient parfaitement synchronisées avec ce qui est prévu sur scène par Stromae. Le résultat est d'autant plus impressionnant que nWave produit de l'animation key-frame, c'est-à-dire image par image, et non "en motion-capture, avec des capteurs sur une vraie personne, que l'ordinateur enregistre et interprète", précise Vincent Philibert: "Notre équipe a donc dû tout recréer à la main."

Le résultat plaît au public des premiers concerts et aux fans du chanteur. L'avatar réapparaîtra-t-il dans d'autres vidéos? "Nous préférons laisser la surprise aux spectateurs!", s'amuse Yann Germain. "On est heureux que le public ait enfin découvert tout cela", conclut de son côté Vincent Philibert. "Le but ultime de tout ce travail, c'est de voir la réaction du public qui vient s’évader pendant 90 minutes et va passer du bon temps et vivre des émotions et un moment à part du quotidien."

https://twitter.com/J_Lachasse Jérôme Lachasse Journaliste BFMTV