Alain Baraton, le jardinier en chef de Versailles veut "donner envie aux enfants de devenir jardinier"

Le jardinier le plus médiatique de France, Alain Baraton, rêve de susciter des vocations chez les enfants. Il publie un ouvrage jeunesse ultra-complet et plein d'humour, qui donne envie de plonger les mains dans la terre et de planter des arbres.

Il a parlé jardin avec la reine d'Angleterre et Michael Jackson, et préside à la destinée du "plus beau jardin de France". Alain Baraton est sans doute le meilleur ambassadeur des jardiniers.

Jardinier en chef du parc de Versailles, il a écrit des dizaines d'ouvrages et parle plantes et jardins chaque semaine sur France Inter et sur France 5. Alain Baraton publie chez Glénat Jeunesse, Leur jardin expliqué aux enfants (et aux parents!), illustré par Laure Monloubou, un livre pour enfants - son premier - et rêve de susciter des vocations pour "le plus beau métier du monde".

Volubile et passionné, il nous parle de son envie de transmettre, de la façon d'initier un enfant aux joies du jardinage et de son jardin idéal.

A quoi voudriez-vous que serve votre livre?

Mon rêve ultime, c'est de donner envie aux enfants de devenir jardinier. Longtemps, le métier qui est le mien était réservé aux jeunes gens en échec de la vie - scolaire ou en difficulté à trouver une place dans la société. C'est ainsi que j'ai moi-même débuté. J'aimerais que des enfants découvrent ce métier, qui est le plus beau métier du monde. Un métier où l'on récolte ce que l'on a semé dans tous les sens du terme. C'est un métier de liberté, un métier utile et c'est un métier qui donne le sourire. Quand on voit un jardinier on lui sourit!

Depuis quand êtes-vous animé de cette envie de transmettre?

Depuis toujours! André Le Nôtre, le créateur des jardins de Versailles, lui ne transmettait pas. Quel odieux bonhomme! Voilà un type qui gagnait une fortune, et qui avait une réputation mondiale, qui était entouré de collaborateurs de première importance, il n'avait même pas l'idée de transmettre son savoir!

Il y a une citation chinoise merveilleuse qui dit "le meilleur moment pour planter un arbre, c'était il y a 20 ans". Ce livre, j'aurais dû l'écrire il y a 20 ans.

Le livre évoque à la fois la vie des plantes, l'histoire des jardins, les outils, les saisons...

Dans le métier de jardinier, pas une seule journée ne ressemble à une autre. Nous sommes liés aux conditions météo, à la saison. Pour mériter le métier de jardinier, il faut connaître les plantes, les gestes du jardinier, les animaux du jardin. Cet ouvrage s'intéresse à tous les aspects de la profession. On y parle de la terre, de l'eau, du soleil, des grands jardiniers, de comment vit une plante...

Images de "Leur jardin" d'Alain Baraton © Glénat Jeunesse

Quel est le meilleur moyen d'initier un enfant au jardinage?

Si je pouvais d'un claquement de doigts émettre un vœu, ce serait que chaque enfant qui a la chance d'avoir des parents qui possèdent un petit bout de terre, et qui a cet ouvrage, de laisser l'enfant s'occuper seul d'une partie du jardin, pas grande, un ou deux mètres carrés, cela suffit largement. Le laisser tout seul cultiver ce dont il a envie. L'enfant apprendra à regarder, fera preuve de patience, corrigera ses erreurs. C'est la plus belle façon de devenir jardinier.

Comment est née votre propre vocation?

Je voulais être photographe. Je suis entré à Versailles comme caissier, pour gagner de l'argent. On m'a proposé un poste d'aide-jardinier stagiaire, que j'ai accepté. Je découvre un parc, en 1976, qui est pas mal, un château qui est pas mal, une histoire qui est quand même pas mal, mais il n'y a rien d'extraordinaire, sauf les arbres. Je tombe amoureux des arbres de Versailles. Je suis rentré à Versailles pour me faire de l'argent de poche, et je suis resté pour les arbres.

Le jardinage devrait-il être enseigné à l'école?

C'est aberrant que ça ne le soit pas! On nous parle de climat, de l'importance de respecter la forêt amazonienne, et on n'est même pas capable d'apprendre aux enfants à distinguer un chêne d'une salade.

Vous dites que le métier de jardinier se féminise...

Le monde du jardinage était un monde exclusivement masculin. Quand je suis arrivé à Versailles en 1976, il n'y avait pas une femme dans les jardins. Quand j'ai voulu recruter la première, en 1982, on m'a dit 'mais comment va-t-elle faire pour porter les morceaux de bois?'. Mais il y a du matériel pour ça! Les femmes qui aujourd'hui travaillent à Versailles ont apporté leur créativité, leur esprit calme et posé, leur délicatesse, leur relation avec le vivant. Les femmes et les hommes sont vraiment complémentaires en jardinage.

Quel est votre jardin idéal?

Mon jardin idéal n'existe plus, c'était le jardin de mon grand-père. Mes grands-parents avaient une très modeste maison en bois à la Celle-Saint-Cloud avec un grand jardin potager. C'était pour moi le paradis. Il y avait un prunier qui donnait des quetsches merveilleuses, des alignements de poireaux, de salades, de carottes. Et au milieu mon pépé, avec son bleu de travail et son chapeau de paille. C'était le lieu où il était le plus heureux. Ma grand-mère rêvait de croisières, lui voulait rester dans son jardin. Je crois que j'ai hérité de mon grand-père.

Leur Jardin d'Alain Baraton, illustré par Laure Monloubou © Glénat Jeunesse

A quoi ressemble votre jardin ?

J'ai la chance d'avoir dans le parc [de Versailles] un jardin qui m'est affecté. J'ai un peu honte de vous le dire, mais dans ce jardin, je n'y fais absolument rien. Parce que quand je sors, généralement c'est pour parler jardin. Quand je rencontre des gens, ils me demandent des conseils de jardin. Quand je suis en déplacement, on me fait toujours visiter le jardin du coin. Je parle jardin à la radio, j'écris jardin dans mes livres, je montre des jardins à la télévision. Donc, dans mon jardin, je fais tout, sauf du jardin!

Vous avez écrit de nombreux livres sur les arbres, quel est votre arbre-totem?

C'est le chêne. C'est tellement beau un chêne. C'est un arbre qui est massif. Il y a un chêne en France, en Charente-Maritime, qui aurait 1500 ans et peut-être davantage. L'idée que ce végétal ait résisté aux tempêtes, aux guerres, aux révolutions. Il est là et il ne bouge pas, je suis admiratif.

Leur jardin expliqué aux enfants (et aux parents), collection "Quand ça va, Quand ça va pas", par Alain Baraton, illustré par Laure Monloubou, 64 pages, 15 euros.

https://twitter.com/Radegonde Magali Rangin Cheffe de service culture et people BFMTV