"Vous avez une responsabilité": Sandrine Rousseau interpelle le Festival de Cannes sur le #MeToo cinéma

La députée Sandrine Rousseau, qui a présidé la commission d'enquête parlementaire sur le #MeToo dans la culture, a appelé le Festival de Cannes à la "responsabilité" dans l'évolution des mentalités face aux violences sexuelles dans le milieu du cinéma.

La députée écologiste Sandrine Rousseau a "lancé un message" au Festival de Cannes ce mercredi 9 avril, appelant l'organisation à reconnaître sa "responsabilité" dans l'évolution des mentalités face aux violences sexistes et sexuelles dans le milieu du cinéma.

L'élue, qui a présidé la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les violences sexuelles dans la culture, présentait avec le député Modem Erwan Balanant leurs 86 recommandations pour freiner "la machine à broyer les talents".

Interrogé lors de la conférence de presse sur le rôle du Festival de Cannes dans les changements à apporter au secteur du cinéma, le rapporteur de la commission Erwan Banalant a salué la décision d'attribuer la présidence du jury de cette année à Juliette Binoche, y voyant un "signal fort". L'actrice a témoigné publiquement en 2024 des violences sexuelles qu'elle a subies dans le cadre de sa carrière. "S'ils continuaient ce qu'ils ont un petit peu commencé, ça serait bien", a estimé Erwan Banalant. "Il faut plus que cela", a alors répondu Sandrine Rousseau.

"Le Festival de Cannes doit être le lieu de ce renversement des mentalités", celui où "on dit qu'enfin, on a envie, tous et toutes" que "cela change", a déclaré la députée de Paris. "Parce que ce n'est pas acceptable."

"C'est un message que je lance au Festival de Cannes: vous avez une responsabilité. Cette responsabilité, elle est de dire: 'nous vous entendons, nous vous croyons, nous vous accompagnerons et nous ne voulons plus que ce monde-là soit structuré de cette manière'", a ajouté Sandrine Rousseau à la veille de l'annonce de la sélection officielle de la prochaine édition de ce festival (13-24 mai).

Un constat "sans appel"

Le rapport dévoilé ce mercredi établit un constat "sans appel": "les violences morales, sexistes et sexuelles dans le monde de la culture sont systémiques, endémiques et persistantes". La commission évoque le rôle de nombreux acteurs du milieu, et notamment les festivals. Ces derniers, "par la mise en lumière des œuvres et de leurs auteurs qu’ils permettent", sont "un élément fondamental de l’écosystème".

"Eux aussi possèdent un pouvoir prescripteur dont ils n’ont pas toujours usé avec discernement au cours des dernières décennies, et même dans un passé récent", critiquent les auteurs du rapport.

"Que penser, par exemple, de l’omerta qui a longtemps régné à Cannes à propos des habitudes de certains producteurs qui se faisaient 'livrer' des jeunes femmes dans leur chambre d’hôtel pendant le festival? Certes, la direction du festival n’est pas directement responsable de ces pratiques, mais dans la mesure où celles-ci étaient très largement connues, continuer à inviter les personnes se comportant de la sorte revient à cautionner leurs actes", ajoute le rapport.

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Dans son rapport, la commission d'enquête pointe notamment Thierry Frémaux, délégué général du festival, qui a invité en 2023 "sur la Croisette l’acteur américain Johnny Depp, accusé de violences conjugales". Le délégué général avait assuré qu'il n'était "pas au courant" de cette affaire et qu'il "s'en foutait un peu".

La présidente du Festival de Cannes Iris Knobloch et Thierry Frémaux avaient été interrogés par la commission d'enquête début décembre. Au total, quelque 350 personnalités de la culture ont été entendues tout au long de ses six mois de travaux.

Sophie Cazaux