"Une chape de peur a disparu": Riad Sattouf s'exprime sur la situation en Syrie

Heureux mais aussi "ultra-méfiant" après la chute du régime de Bachar al-Assad, l'auteur de BD franco-syrien Riad Sattouf a commenté ce mercredi sur BFMTV la situation en Syrie.
"Tout le monde pensait que la dictature des Assad allait durer éternellement. La chute de Bachar si vite a déjà surpris tout le monde", souligne l'auteur de L'Arabe du futur. "Ça a fait naître un espoir immense."
Pour le dessinateur, dont le père était un admirateur de la dynastie al-Assad, "c'est un moment historique pour les Syriens". "Ils doivent le saisir. Il y a une chape de peur et de terreur qui a disparu d'un seul coup."
"C'est le moment où tout est possible", insiste-t-il. "Il faut garder espoir. Il faut observer ce qui se passe et espérer l'organisation d'élections démocratiques le plus rapidement possible."
Soulagement
En contact avec des membres de sa famille vivant sur place, il assure que "les Syriens sont extrêmement pressés de reprendre une vie et d'aller de l'avant" après 13 ans de guerre civile et 50 ans de dictature.
"Les gens sont extrêmement soulagés", poursuit-il. "Ils sont persuadés que tout va se passer pour le mieux." Et d'ajouter: "Évidemment, il faudrait être ultra-méfiant. Étant ultra-pessimiste, je dirai qu'il faut attendre de voir."
Alors que les rebelles syriens ont nommé Mohammad al-Bachir comme chef de gouvernement transitoire, il espère que la "dictature terrible" d'al-Assad ne sera pas remplacée "par une autre dictature".
Selon lui, il va falloir "protéger absolument" les minorités dont les chrétiens et les alaouites: "Il ne faut pas qu'il y ait de vengeance aveugle qui s'abatte sur eux. C'est ça qu'il faut regarder maintenant. Seul l'avenir nous le dira."
Le dessinateur a retenu les leçons de l'histoire récente: "Il s'est passé pareil avec la révolution iranienne et rapidement tout s'est effondré. On a vu ça dans d'autres pays depuis. Mais peut-être que ça sera différent en Syrie. Je ne saurais vous en dire plus."
Une BD sur la chute d'al-Assad?
Il ne sait pas encore s'il consacrera une bande dessinée à cette page de l'histoire syrienne - et s'il retournera sur ses terres natales. "J'avoue que j'aimerais bien. L'idée de pouvoir revenir en Syrie un jour n'a jamais été aussi crédible que ces derniers jours."
"Je ne suis pas rentré en Syrie depuis les années 1990", précise-t-il. "J'ai donc une expertise très limitée sur le sujet. La vie qui a été la mienne a été la vie dans un petit village."
Et de conclure: "Je n'ai pas plus d'attache émotionnelle avec le pays que ça. Mais évidemment j'ai de la famille là-bas. J'adorerai pouvoir y retourner. On verra si ça sera possible."
Dans les premiers tomes de son best-seller L'Arabe du futur, ce fils d'un père syrien docteur en histoire, et d'une mère bretonne racontait son enfance entre la France et la Syrie, dans les années 1980.
Dans Moi, Fadi, le frère volé, sorti à l'automne, il évoque cette histoire du point de vue de son jeune frère, enlevé par leur père à l'âge de 5 ans et élevé en Syrie, loin de sa mère et de ses deux frères aînés.
S'il raconte dans ces livres sa vie et celle de sa famille, les relations conflictuelles entre ses parents, Riad Sattouf évoque en creux la situation du pays et la géopolitique de la région. Bachar al-Assad figure d'ailleurs sur la couverture du tome 6.