"Moi, Fadi, le frère volé": Riad Sattouf raconte l’histoire de son frère dans sa nouvelle BD

Le dessinateur raconte dans sa nouvelle BD l'enfance de son frère cadet, enlevé par leur père au début des années 1990 et élevé en Syrie.

Riad Sattouf est de retour. Alors que tous ses lecteurs croyaient terminée sa série à succès L'Arabe du futur (2014-2022), le dessinateur franco-syrien relance ce mardi la saga avec Moi, Fadi, le frère volé. Un livre où il raconte l'enfance de son frère cadet, enlevé par leur père au début des années 1990.

Fadi grandit dans l'insouciance d'un élève de maternelle à Rennes. Puis un jour, son père Abdel-Razak, qui se sent rejeté en France et veut convaincre sa femme de retourner dans sa ville d'origine, Ter Maaleh près de Homs en Syrie, l'emmène avec lui en avion. Sa mère et ses deux frères ne le reverront pas pendant 20 ans.

Mémoire exceptionnelle

L'album s'appuie sur des témoignages de Fadi recueillis par Riad Sattouf en 2011 et 2012, lorsqu'ils se sont retrouvés après deux décennies séparés l'un de l'autre. "Ce frère que je n'avais pas vu depuis vingt ans, quand il est revenu, c'est ce qui a déclenché chez moi l'envie de faire L'Arabe du futur", confie Riad Sattouf à BFMTV.

"Toutes les histoires que m'a racontées mon frère ont ravivé chez moi la mémoire de ma propre jeunesse", complète le dessinateur. "J'adore les histoires qui interrogent les différents points de vue qu'on peut avoir sur un événement."

Riad Sattouf a pu s'appuyer sur la mémoire exceptionnelle de son frère pour raconter son histoire. "La sienne a été dix fois meilleure que la mienne. Sans doute que le traumatisme qu'il a vécu a rendu ses neurones très vifs. Il n'a pas du tout cette amnésie infantile." Selon lui, l'histoire de son frère "réclamait d'être racontée."

Garder le secret

Le dessinateur, sacré Grand Prix d'Angoulême en 2023, surprend une fois ses lecteurs avec un récit plus sombre que les précédents. Le tome retranscrit les craintes du jeune Fadi, qui débarque en Syrie sans en connaître la langue. Certaines scènes proposent des ambiances dignes d'un film d'horreur.

"Il a fallu que j'aie 46 ans pour être capable de raconter (cette histoire). Pour moi, en tant qu'auteur de bandes dessinées, c'était un défi", souligne Riad Sattouf. "L'histoire de mon frère est quelque chose d'inracontable, d'irracontable. Elle porte en elle un drame."

Mais Riad Sattouf refuse d'en dire plus pour le moment. Et de révéler s'il est encore en contact avec ce frère longtemps disparu. "Pour qu'un livre fonctionne bien, il faut garder une part de mystère (...) et je ne répondrai pas à cette question (...) pour ne pas briser le sortilège. Vous le saurez en lisant la suite." Deux autres tomes sont prévus.

Tout en préparant son troisième film en tant que réalisateur, avec les Inconnus Didier Bourdon, Pascal Légitimus et Bernard Campan, Riad Sattouf va raconter également la disparition de Fadi du point de vue leur mère. Il publie chaque mois dans Notre temps les planches de ce livre qui s'intitule L’Arabe du futur, le livre de la mère.

Jérôme Lachasse avec Nicolas Behar