Nanterre: ce que l'on sait du refus d'obtempérer qui a conduit à la mort d'un adolescent

Un adolescent a été tué, ce mardi matin, lors d'un contrôle routier, par un policier qui a fait usage de son arme à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, a appris BFMTV de sources policières, qui évoquent un refus d'obtempérer. Le policier qui a tiré a été placé en garde à vue pour "homicide volontaire", a annoncé le parquet de Paris en fin de journée.
La voiture s'est encastrée contre un poteau quelques mètres plus loin, ont ajouté ces mêmes sources. Malgré l'intervention des secours, le jeune homme de 17 ans, Naël M., a succombé à ses blessures. Un autre passager a été interpellé et un troisième a pris la fuite, il est toujours "recherché", a fait savoir le parquet de Paris.
· La police évoque un refus d'obtempérer
Selon les premiers éléments de l'enquête, les faits se sont déroulés ce mardi matin, vers 8h20, avenue Frédéric-et-Irène-Joliot-Curie à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine. Les policiers remarquent un véhicule Mercedes, qui commet plusieurs infractions au Code de la route. Ils s'approchent de la voiture pour contrôler le conducteur.
D'après la version fournie par une source policière, un fonctionnaire de police se place à l'avant du véhicule pour le stopper, le conducteur lui fonce alors dessus. Le policier fait usage de son arme et tire une fois. Le véhicule s'encastre quelques mètres plus loin dans un poteau.
Invité sur le plateau de BFMTV, Laurent Nuñez, préfet de police de Paris, a expliqué que les policiers avaient tenté une première fois de contrôler le véhicule, "qui ne s'est pas arrêté".
"Ce véhicule a commis un premier refus d'obtempérer, puis il a été bloqué dans le flot de la circulation où il y a eu une nouvelle tentative de contrôle par les deux policiers", a détaillé Laurent Nuñez.
"À ce moment-là que le conducteur, qui avait d'abord éteint le moteur, a redémarré le véhicule, puis est parti. C'est dans ce contexte que le policier a fait usage de son arme à feu", a précisé le préfet de police de Paris, pour qui ce geste "interpelle".
Selon plusieurs sources, la balle tirée par les policiers l'a atteint à la poitrine, côté gauche. Malgré le massage cardiaque, Naël M. n'a pas pu être réanimé, et a succombé à ses blessures. Un autre passager, également mineur, a été interpellé et placé en garde à vue. Un troisième passager a pris la fuite et est toujours recherché.
· Une vidéo contredit la version policière
La version policière partiellement contredite par une vidéo publiée sur Twitter. On y voit un véhicule jaune à l'arrêt, contrôlé par deux policiers. L’un est au niveau de la vitre, l’autre un peu en retrait, son arme de service braqué en direct conducteur. L'un d'eux sort son arme. La voiture redémarre et le policier, qui se trouve toujours sur le côté du véhicule, semble tirer un coup de feu en direction du conducteur.
"Ces policiers ont menti ce matin en affirmant que le véhicule du jeune Naël avait tenté de les percuter", a réagi mardi l'avocat de la famille, Yassine Bouzrou, sur BFMTV. "La vidéo dément formellement ce que les policiers ont affirmé."
"On voit clairement un policier abattre un jeune homme de sang-froid, sans raison juridique puisqu'un refus d'obtempérer ne permet pas un tir à bout portant", explique le conseil.
"Nous sommes totalement éloignés de la légitime défense, toutes les règles élémentaires ont été violées et c'est clairement un homicide volontaire", conclut l'avocat.
· Le conducteur était âgé de 17 ans
Né en 2006, Naël M. est un adolescent de 17 ans, déjà connu des services de police, notamment pour conduite sans permis et refus d'obtempérer.
"Mon client avait 17 ans, il travaillait, il était livreur et il a été abattu aujourd’hui, voilà ce qu’on sait avec certitude", a rétorqué l'avocat de la famille, Yassine Bouzrou, sur BFMTV. "Être connu des services de police, ça ne veut absolument rien dire. (…) Ces fichiers (de police) manquent de précision."
"C'était un gentil gars", a déclaré la grand-mère du jeune homme à BFMTV. "Il n'a que 17 ans, même s'il fait quelque chose, il n'a que 17 ans", a-t-elle ajouté. "J'ai perdu un enfant de 17 ans, j'étais toute seule avec lui, ils m'ont enlevé un bébé", a témoigné, très émue, sa mère dans un live sur les réseaux sociaux. "C'était encore un enfant, il avait besoin de sa mère".
· Plusieurs enquêtes ouvertes, des plaintes déposées
Une enquête en flagrance a été ouverte par le parquet de Nanterre pour refus d'obtempérer et tentative d'homicide volontaire sur personne dépositaire de l'autorité publique. Elle a été confiée au commissariat de Nanterre et à la Sûreté territoriale des Hauts-de-Seine.
Une seconde enquête en flagrance a été ouverte, là aussi par le parquet de Nanterre, pour homicide volontaire par personne dépositaire de l'autorité publique confiée à l'inspection générale de la Police nationale (IGPN). L'enquête de l'IGPN doit permettre de déterminer dans quelles circonstances le policier a fait usage de son arme et s'il y a, ou non, légitime défense. Le policier qui a touché mortellement le jeune homme, a été placé en garde à vue mardi en fin de journée, selon le parquet.
Invité de BFMTV, l'avocat de la famille, Yassine Bouzrou a annoncé le dépôt de trois plaintes: une pour "homicide volontaire", visant le policier incriminé, une autre contre son collègue, pour "complicité d'homicide volontaire" et une troisième pour "faux en écriture publique".
"J'attends que la lumière soit faite le plus rapidement possible sur ces faits", a réagi Laurent Nuñez, préfet de police de Paris, sur le plateau de BFMTV.
"Évidemment, ce geste m'interpelle, me choque, mais il y a une enquête qui devra déterminer les conditions dans lesquelles tout ça s'est produit", a déclaré le préfet de police de Paris.
"Que s'est-il passé à l'intérieur du véhicule ? Les policiers se sont-ils sentis menacés ? Le conducteur, qu'a-t-il fait ? Quelle a été sa réaction ? Je ne le sais pas. Ils seront entendus par la justice et nous verrons si ces gestes étaient appropriés ou pas", a poursuivi Laurent Nuñez.