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Paris Île-de-France

La chambre régionale des comptes met en garde Paris sur sa politique de mobilités mais salue certaines réalisations

Une rue avec des voitures à Paris (photo d'illustration)

Une rue avec des voitures à Paris (photo d'illustration) - Fred Dufour - AFP

La chambre régionale des comptes d'Île-de-France a scruté la politique des mobilités menée par Paris. De nombreux points positifs en ressortent, d'autres points de vigilance sont à surveiller.

La politique de mobilités de la ville de Paris scrutée à la loupe. La chambre régionale des comptes d'Île-de-France a rendu un rapport sur la politique des mobilités menée par la capitale, depuis 2015.

"Dans la mise en œuvre de sa politique de mobilités, la ville de Paris peut se prévaloir de réalisations indéniables depuis 2015", salue la chambre régionale des comptes.

Cette dernière souligne quelques points positifs, comme notamment la diminution de l'usage de la voiture avec "la marche et l’usage des transports en commun, modes de déplacement majoritaires à Paris", les mobilités actives qui ont fortement augmenté et la circulation piétonne favorisée, les aires piétonnes étant en hausse de 10% par rapport à 2020.

Les objectifs du plan vélo "en partie atteints"

Aspect soulevé par la chambre régionale des comptes d'Île-de-France, l'usage du vélo a fortement augmenté. "Les objectifs du premier plan vélo (2015-2020) ont été en partie atteints", déclare-t-elle.

Elle ajoute: "La création de places de stationnement pour les vélos a été supérieure à la prévision. Les dispositifs dédiés à la sécurité des cyclistes (sas vélos) et la modification des règles de circulation ('cédez le passage aux feux tricolores') ont été mis en œuvre".

Si le réseau des pistes cyclable a été étendu de près de 43%, soit de 700 km à 1.000 kilomètres, la chambre régionale des comptes note que "l’objectif de doublement n’a pas été atteint".

Le bilan carbone des véhicules partagés à surveiller

Le rapport pointe également du doigt le bilan carbone "décevant" du déploiement de flottes d'engins et de véhicules partagés.

"Selon une étude réalisée auprès d’utilisateurs de l’autopartage à Paris, chaque véhicule de location en boucle permettrait de remplacer de 5 à 8 véhicules personnels et l’autopartage en trace directe remplacerait 3 voitures. Il n’en est pas de même des trottinettes en libre accès. Plusieurs études ont montré que leur impact environnemental, souvent présenté comme négligeable, est en réalité significatif si l’on considère la totalité de leur cycle de vie", mentionne le rapport.

Des places de stationnement en moins: un impact "négatif" sur les recettes

L'autre inquiétude dans le rapport concerne la politique de diminution de la place de la voiture dans l'espace public.

"La politique de diminution de la place de la voiture dans l’espace public a un impact négatif sur les recettes de gestion de la Ville", écrit la chambre régionale des comptes d'Île-de-France.

Ces recettes s'élevaient à 348 millions d'euros et représentaient 20% des recettes de gestion de la ville en 2021. "La suppression de la moitié des places de stationnement sur la voirie aura un impact négatif sur les recettes de stationnement qui en constituaient la principale part, avec 266 millions d'euros en 2021, même en tenant compte de l’augmentation des tarifs appliqués aux visiteurs et de l’instauration du stationnement payant pour les véhicules deux-roues motorisés", relève le rapport.

Ce manque d'argent perçu ne sera pas garanti par les recettes perçues auprès des opérateurs de l'autopartage en libre-service.

L'absence d'un plan mobilités

Les magistrats de la Chambre régionale des comptes (CRC) d'Île-de-France déplorent aussi l'absence d'un plan mobilités à jour de la mairie de Paris.

La CRC recommande à la Ville de "faire précéder les décisions à venir ayant un caractère structurant en matière de mobilité à Paris", telles que l'instauration d'une zone à trafic limité (ZTL) à Paris Centre ou la transformation du périphérique après les Jeux olympiques, "par l'adoption d'un plan local de mobilité (PLM)".

En effet, selon les magistrats, "la vision d'ensemble de l'impact des projets d'aménagement de la ville sur les déplacements, notamment sur la circulation des véhicules de sécurité et de secours", fait "aujourd'hui défaut" en l'absence de "mise à jour" de ce plan.

"On peut ainsi s'étonner" que la future ZTL "puisse être mise en place à l'horizon 2024 (initialement 2022) en l'absence d'un PLM actualisé", tance la CRC francilienne.

La ville "s'engage dans l'élaboration de son PLM, tel qu'annoncé au conseil de Paris de juin 2023", a répondu Anne Hidalgo dans un courrier, soulignant que le plan de la région Île-de-France, dirigée par la droite de Valérie Pécresse, "n'est pas encore approuvé".

L'absence de ce plan actualisé par la ville de Paris est une critique récurrente du groupe d'opposition Changer Paris, mené par Rachida Dati.

"Paris ne dispose plus de PLM depuis 2020, alors que c'est obligatoire... Ce qui explique aussi le chaos dans la ville!", a fustigé mercredi sur X (ex-Twitter) ce groupe LR et apparentés.

Une réflexion à venir

Aux termes de son rapport, la chambre régionale des comptes a formulé cinq recommandations visant à améliorer la performance de la gestion. L'une d'entre elles préconise de présenter à la préfecture de police l'ensemble des projets d'aménagement projetés à une échelle pluriannuelle.

La CRC recommande aussi de diminuer le poids des voitures hybrides dont le bilan carbone est défavorable, mais aussi de se doter d'une comptabilité analytique pour mieux évaluer le coût global de la politique des déplacements mise en place.

Dans sa réponse, la maire de Paris confirme être en lien "permanent et étroit" avec les services de la préfecture "afin de mener à bien les projets sur le territoire".

L'édile revient également sur la diminution des véhicules hybrides et indique qu'une réflexion sur l'évolution du service sera lancée après que les premières conventions d'occupation du domaine public du dispositif Mobilib soient arrivées à échéance en 2024.

Solenne Bertrand